La loi Pacte, néfaste pour les TPE ?

Si micro-entrepreneurs et PME trouveront leur compte parmi les 70 articles de la loi Pacte, les artisans, commerçants et dirigeants de TPE n’y récolteront que des outils de simplification destinés à… leur liquidation !

Les échanges avec Bercy le confirment : le projet de loi Pacte favorise à titre essentiel, sinon exclusif, les micro-entrepreneurs en activité partielle, ainsi que les entreprises moyennes et grandes.

Hors le cas particulier des start-up, aucun dispositif ne permet de valoriser le gisement de croissance et d’emplois que constitue le segment des artisans, commerçants, chefs d’entreprises de moins de 20 salariés, soit 98% des entreprises.

Un détricotage méthodique des dispositifs d’équilibre entre les différentes formes d’exercice d’entrepreneuriat individuel

La mission Grandguillaume de 2013 sur l’auto-entrepreneuriat (devenu micro-entrepreneuriat depuis) entendait mettre un terme à des déséquilibres concurrentiels dénoncés par les professionnels de l’artisanat notamment.

La loi Pacte supprime le stage préalable à l'installation en chambre de métiers ainsi que l’obligation de détenir un compte bancaire dédié à l’activité.

Même les organisations de micro-entrepreneurs ne sont pas entièrement convaincues. Ainsi, à la vision entrepreneuriale du micro-entrepreneur informé et structuré, préparé à assumer la croissance de son activité, s’oppose celle de l’émergence d’une classe de travailleurs indépendants pauvres (70% des micro-entrepreneurs réalisent un chiffre d'affaires annuel inférieur à 5.000€). Cette dernière vision est manifestement privilégiée par le gouvernement, malgré la bombe à retardement qu’elle représente à terme pour la protection sociale dans toutes ses composantes, maladie et retraite notamment.

Le gel de seuils d’effectifs… loin d’être atteints par l’immense majorité des TPE !

Le projet de loi Pacte propose propose de geler pendant une durée de cinq ans les effets du franchissement de certains seuils, notamment ceux de 10, 20 et 50 salariés. Il convient de souligner ici que seuls les effets liés aux charges financières induites sont gelés, à l’exclusion des conséquences sociales telles que la mise en place d’institutions représentatives du personnel à partir de 11 salariés.

Or, à tort ou à raison, le frein fondamental du responsable d’une entreprise de 10 salariés en croissance est moins le coût marginal induit par un salarié supplémentaire que la crainte de devoir cogérer son entreprise avec un représentant d’une organisation syndicale de salariés à l’occasion des réunions régulières, obligatoires sous peine du "délit d’entrave", pénalement sanctionné.

En tout état de cause, la première question à soulever concernant la croissance des entreprises de moins de 11 salariés relève en premier lieu des moyens à mettre en œuvre pour hisser à ce seuil les 85% de TPE qui emploient entre 1 et 5 salariés.

La question du financement abordée sous un angle très éloigné des besoins des TPE

Avec la loi Pacte, le gouvernement a beaucoup travaillé sur la question du haut de bilan, sur le renforcement des fonds propres des entreprises de croissance, en omettant singulièrement d’aborder la question des frais financiers de nature bancaire liés aux besoins en fonds de roulement exprimés essentiellement par les artisans, commerçants et responsables de TPE.

La problématique, reconnue par les pouvoirs publics depuis des années, de la multiplication des frais bancaires sur comptes courants, et plus particulièrement les comptes courants débiteurs, ne sera traitée que pour les particuliers… au sein d’une loi destinée aux entreprises !

C’est oublier que la pérennité de l’activité d’une petite structure entrepreneuriale passe bien souvent par la stabilisation de ses frais bancaires, avant qu’elle ne puisse devenir une PME puis une ETI et envisager ainsi la question de son haut de bilan. En ne traitant que les effets on en oublie les causes...

Si la loi Pacte ne contient aucun outil pour la croissance des artisans, commerçants, dirigeants de TPE de moins de 20 salariés, elle simplifie en revanche leur cessation d’activité par le biais de l’extension de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée. Où est la croissance et la transformation quand on ne traite par la simplification que l’éventuel décès de nos TPE ? Faut-il y voir un signe ?