L'autre potentiel des PME

Et si la sortie de crise dépendait de la capacité qu'auront grands groupes et PME à travailler ensemble ? Voici les points concrets sur lesquels les deux parties peuvent agir.

Crise financière, économique, envolées stratosphériques des cours des matières premières... Les effets de la mondialisation et l'affermissement de l'euro nous ont fait entrer de plain-pied dans une récession économique globale de laquelle n'émergeront que les plus talentueux d'entre nous. Pour qu'elles réagissent, nous devons donner aux PME européennes confiance en elles. Elles doivent prendre conscience de leur talent, pour nourrir des ambitions légitimes.

Des mesures simples, peu coûteuses, faciles à mettre en place et frappées au coin du bon sens pourraient permettre de réelles avancées. C'est dans cet esprit que nous nous devons de créer le modèle collaboratif de demain, entre nos majors et ce vivier extraordinaire que représente le tissu des PME européennes.

Leaders de notre industrie, vous qui êtes les grands donneurs d'ordre, je vous invite à :

- considérer comme un potentiel non encore complètement exploré les capacités d'innovation des PME. Elles peuvent et doivent se positionner naturellement comme partenaires privilégiés d'une relation de co-développement (durable).
- évaluer les risques de la paupérisation de notre tissu industriel au profit, à court terme, des pays à bas coût. Les effets du développement industriel frénétique y sont partiellement responsables des poussées inflationnistes des principales matières premières. Posons-nous la question de la viabilité à terme des monnaies sous-évaluées et de l'abandon de notre maîtrise technologique.
- valoriser, en toute objectivité, l'apport en valeur ajoutée des activités "non stratégiques" externalisées auprès de structures plus flexibles, plus mobiles et plus agiles.
- donner accès à un plus grand nombre de PME à votre portefeuille achat en assouplissant les critères d'homologation et de référencement fournisseurs (intégration du "Pacte PME" dans les stratégies achat).
- assurer un leadership "tutorial" dans l'accompagnement des PME ou des groupements de PME à l'exportation. C'est-à-dire, considérer l'approche plateforme au regard d'une approche de pur producteur.
- considérer comme "maîtrisable" le risque de défaillance financière des petites structures par la normalisation des habitudes d'hyper-négociation et de règlement.

PME, vous qui êtes le premier employeur français et européen, vous pourriez / devriez :

- Poursuivre vos efforts d'innovation en renforçant votre collaboration avec les universités et les laboratoires publics. Vous devez être la courroie de transmission entre les centres de recherche et la grande industrie (Les pôles de compétitivité mis en place dans nos régions sont d'excellents vecteurs de cette stratégie).
- vous interroger sur la perte de productivité engendrée par la priorisation du productif sur le collaboratif, conséquence de pressions externes : la mobilisation des collaborateurs s'essoufle.
- décliner et fortement communiquer sur votre plan stratégique en vous fixant des objectifs et des critères de sélection ambitieux et transparents de potentiel client. Le rééquilibrage des positions dans la relation client-fournisseur doit absolument être réalisé.
- renforcer les approches transversales dans la gestion et le développement des grands chantiers de l'entreprise, afin de mobiliser budgets et organisations autour de "projets d'entreprise" au détriment d'objectifs individuels.
- intégrer très en amont les processus de projets de vos clients afin de privilégier le partenariat constructif à la fourniture et le coût complet d'acquisition et de détention au profit d'une simple bagarre rangée sur les prix.
- vous donner les moyens d'une discrimination positive de votre apport en valeur ajoutée afin qu'elle ne soit pas discutable sur l'échelle des simples analyses comparatives.

Je vous dirais enfin qu'il n'y aura pas de court terme demain s'il n'y a pas de vision et de stratégie à long terme aujourd'hui. L'économie est une discipline où la théorie, les faits et l'imagination intuitive s'associent confortablement à l'intelligence humaine. Nous sommes condamnés à inventer d'autres mécanismes nous permettant de sortir de l'instabilité actuelle.

Certes, les pessimistes argumenteront que les choses vont si mal qu'elles exigent des changements profonds. Les conservateurs considèrerons, eux, que la situation économique et sociale est si fragile qu'elle interdit toute initiative. Les entrepreneurs, quant à eux, redéployeront efforts et énergies à installer des organisations agiles, capables de bondir au premier soubresaut d'une économie en mal de nouveaux ancrages.

Restons simples et pragmatiques, des solutions existent. Nous les perdons de vue parfois lorsque nos fondamentaux vacillent ou que l'on recherche ailleurs ce que nous avons sous les yeux. Le monde d'aujourd'hui n'est pas seulement porteur de menaces, mais aussi d'opportunités tangibles de progrès et de prospérité.