Lettre ouverte à tous ceux qui souhaitent que l'emploi reste sécurisé

Sous couvert de l'organisation du portage salarial, l'intérim n'est-il pas en train de créer un nouveau statut qui conduirait vers plus de précarisation ? Le point de vue du président du syndicat des entreprises de portage.

Aujourd'hui la crise touche de plein fouet tous les secteurs et toutes les professions. L'Unedic prévoit 400 000 nouveaux chômeurs en 2009. Pourtant, en marge de ces terrifiantes annonces, certains acteurs cherchent à réduire les garanties pour lesquelles les syndicats se battent depuis des années.

Il en est ainsi de l'intérim. Sous prétexte que le législateur lui a confié la mission d'organiser cette nouvelle forme de travail qu'est le portage salarial, l'intérim cherche à imposer un nouveau statut entre salariat et indépendance qui conduirait à plus de précarité. L'objectif du PRISME (syndicat de l'intérim) est de vider le portage salarial de son essence même : le salariat. Ce statut ne serait plus régi par le droit du travail mais par le droit commercial. Cela supprimerait donc toute référence à une quelconque convention collective et à toutes les garanties qu'elles définissent. Autres conséquences, les prud'hommes ne seraient plus compétents en cas de litige mais les tribunaux de commerce, aucun droit à l'assurance chômage, ni aux DIF ne seraient plus d'actualité.   Le prétexte : organisation du portage salarial Depuis le 25 juin 2008, le portage salarial est enfin légalisé, dans le cadre de la loi n°2008-596 portant sur la modernisation du marché du travail. C'est l'aboutissement d'un long processus de reconnaissance de l'activité dans le droit du travail français. Dans le cadre de l'Accord National Interprofessionnel (ANI) sur la modernisation du marché du travail, l'intérim (PRISME), acteur privé, s'est vu confier l'organisation d'un secteur sur lequel il n'est juridiquement pas présent : le portage salarial. Cela constitue en soit un précédent historique. En effet, depuis longtemps déjà l'intérim cherchait à mettre la main sur le portage salarial, où la population cadre est naturellement présente, alors qu'elle fait traditionnellement défaut dans l'intérim. Dans un contexte où le nombre des salariés intérimaires est en chute libre, et ce depuis mars 2008 (pour le mois de février 2009, l'intérim a ainsi enregistré une baisse significative des salariés intérimaires - 35% par rapport à février 2008), l'intérim cherche de nouvelles opportunités.  La réalité : la création d'un nouveau statut Tout irait pour le mieux si l'intérim s'en tenait au rôle fixé par le législateur. Or, il semblerait que derrière cette mission qui lui a été confiée et en dépit d'un front commun des principaux syndicats, l'intérim fasse cavalier seul et dissimule un tout autre projet : la création d'un nouveau statut fourre-tout, allégé en protection sociale, qui mènerait indéniablement vers plus de précarisation. Le portage salarial n'aura été en réalité qu'un prétexte ?   Le SNEPS, le syndicat des entreprises de portage salarial, ainsi que la CICF, son syndicat de rattachement, et 3 organisations salariales, la CFTC, la CFDT et la CFE-CGC, ont décidé d'unir leurs forces pour éviter toute dérive. Ils invitent la CGT et FO à les rejoindre pour travailler ensemble sur les fondamentaux à respecter. Ensemble, ils demandent à être reçus par le ministère du Travail pour vérifier la conformité de la mission d'organisation du portage salarial par l'intérim. C'est en cette période particulièrement difficile pour tous, qu'il faut faire bouclier pour éviter toute dérive et proposer des statuts adaptés au contexte actuel et non les déposséder de ce pourquoi ils ont été mis en place. Le portage salarial a été créé comme solution pour un retour à l'emploi des seniors, des chômeurs longue durée, des futurs créateurs d'entreprise qui souhaitent tester leur marché... Dépouillé de ses avantages, à quoi servira t-il ? Pourquoi toutes ces années de négociations ? En effet, si l'organisation du portage salarial ne correspond plus aux avancées obtenues grâce au dialogue social, ne s'expose t-on pas au risque de voir se développer, à nouveau, un marche parallèle, non contrôlé ?