Un salarié sur 6 se plaint de comportements hostiles de ses collègues

Mépris, critiques systématiques du travail effectué voire propos dégradants... Une part non négligeable des salariés se sentent maltraités au travail. Une vaste enquête de la Dares fait le point.

17 % des salariés français se disent l'objet de comportements hostiles de la part d'une ou plusieurs personnes dans leur travail. C'est l'un des principaux résultats qui ressort de la vaste enquête menée par les médecins du travail auprès de 50 000 salariés pour le compte de la Direction générale du travail et la Dares. Cette part passe à 25 % si l'on prend en compte les comportements hostiles auxquels les salariés ont pu être confrontés dans un poste antérieur. Trois grandes catégories de comportements hostiles sont distinguées :

 Le déni de reconnaissance du travail, où la personne voit ce qu'elle fait injustement critiqué ou saboté. 8,9 % des salariés sont concernés dans leur poste actuel.

 Les comportements dits méprisants, où la personne est volontairement ignorée ou est la cible de propos désobligeants. Ils concernent 6,5 % de la population salariée.

 Les atteintes dégradantes, où le salarié est la cible de propos avilissants, de sous-entendus sur sa santé mentale ou d'avances à caractère sexuel. 1,9 % des répondants se déclarent victimes de ce type de comportements.

 
Les différents comportements dits hostiles en entreprise
Comportement Part de salariés victimes au moins une fois dans leur carrière (en %) Part de salariés victimes dans leur poste actuel (en %)
Source : Dares, mai 2008
Le déni de reconnaissance du travail 14,0 8,9
Critique injustement votre travail 12,2 7,7
Vous charge de tâches inutiles ou dégradantes 4,3 2,7
Sabote votre travail, vous empêche de travailler correctement 3,7 2,3
Les comportements méprisants 10,6 6,5
Vous ignore, fait comme si vous n'étiez pas là 7,8 7,1
Tient sur vous des propos désobligeants 10,0 6,0
Vous empêche de vous exprimer 5,7 4,5
Vous ridiculise en public 3,9 2,0
Les atteintes dégradantes 3,1 1,9
Laisse entendre que vous êtes mentalement dérangé(e) 1,2 0,9
Vous dit des choses obscènes ou dégradantes 2,0 1,3
Vous fait des propositions à caractère sexuel de façon insistante 0,6 0,1
Au moins un comportement hostile 24,8 17,3

Les femmes et les jeunes plus concernés

Toutes les populations de l'entreprise ne sont bien évidemment pas touchées de la même manière par ces phénomènes. Les femmes se déclarent légèrement plus souvent concernées que les hommes (18 % contre 16,8 %). Elles sont plus spécifiquement la cible de comportements méprisants : elles sont ainsi significativement plus nombreuses à se déclarer ignorées, non écoutées voire ridiculisées. Les professions peu qualifiées sont également plus sujettes à ce type de comportements (18 % des employés administratifs, 18,2 % des employés de service et 18,6 % des ouvriers non qualifiés, contre 16,4 % des cadres).

Les jeunes de moins de 30 ans et dans une moindre mesure les quinquagénaires souffrent plus fréquemment de ces problèmes (plus de 19 % des jeunes et 17,3 % des seniors). La Dares note enfin que les comportements hostiles se font plus rares dans les petites structures : seuls 14 % s'en plaignent dans les établissements de moins de 10 salariés contre 20 % dans ceux de 50 à 200 salariés.

Des comportements liés à l'organisation du travail

Une certaine organisation du travail dans l'entreprise semble être corrélée à une forte récurrence de ces comportements hostiles. Ainsi, un rythme de travail surveillé de près par la hiérarchie, des interruptions fréquentes qui viennent perturber le travail du collaborateur, un déficit de moyens ou de formation pour accomplir les tâches sont souvent dénoncés par les personnes se déclarant sujettes à des comportements hostiles.

De même, la Dares souligne une corrélation entre l'occurrence de ces comportements et l'état de santé du collaborateur. Si en moyenne 12 % des salariés jugent leur santé mauvaise, ils sont 20 % parmi ceux qui dénoncent aussi des comportements méprisants, 22 % parmi ceux qui s'estiment victimes d'un déni de leur travail et 34 % parmi ceux qui se disent confrontés à des atteintes dégradantes. Enfin, se déclarer sujet à des comportements hostiles est plus courant lorsqu'on est confronté à des risques psycho-sociaux forts, à savoir une charge de travail ressentie comme pesante, un manque de latitude au niveau de la prise de décision et un déficit de soutien social (voir encadré ci-dessous).

 L'enquête complète de la Dares

 
Les salariés et le "job strain"
Source : Dares, mai 2008
Dans son enquête sur l'exposition des salariés aux risques professionnels, la Dares et la DGT ont également étudié les populations les plus soumises au "job strain". C'est une situation à risque pour la santé du salarié qui se caractérise par une forte demande sur le travail à fournir (en termes de quantité, d'intensité ou de difficulté), des marges de manœuvre limitées pour faire face à ces exigences et un soutien insuffisant de la hiérarchie ou des collègues. Les femmes, les employés et les ouvriers sont plus sujets à ce "job strain". Un symptôme à ne pas confondre avec le stress dont peuvent se plaindre les cadres, qui rencontrent moins le problème de la faible latitude décisionnelle.