Sur Twitch, les marques commencent à jouer le jeu

Sur Twitch, les marques commencent à jouer le jeu Si elle est encore très fortement axée gaming, la plateforme de social streaming s'ouvre à d'autres thématiques et fait du live son principal atout pour engager les audiences

Les professionnels de l'influence marketing et de la publicité digitale voient dans la plateforme de social streaming Twitch, propriété d'Amazon depuis 2014, une excellente source d'audience engagée. L'ADN de Twitch - le live streaming suivi et commenté dans le chat – en est le premier responsable. "C'est une plateforme qui permet d'investir en direct dans l'humain – le streamer – et de capter toute l'attention de ses followers", explique Samuel Diop,  directeur du pôle influence de Heaven. Les utilisateurs (15 millions de visiteurs quotidiens dans le monde) suivent et commentent dans le chat les performances de streamers (3 millions par mois, contre moins d'un million en 2014), qui se filment en direct en train de jouer, peindre, cuisiner, chanter, voyager…  Ces audiences, âgées entre 15 et 35 ans, sont composées à 70 % d'hommes, la plupart passionnés de jeux vidéo et d'e-sport. La plateforme essaie toutefois de s'ouvrir à d'autres catégories de streams depuis 2015, comme les arts graphiques, l'artisanat, la cuisine, les talk-shows et même la musique.

"Si cette audience est rétive à la publicité traditionnelle, on y trouve de grands consommateurs"

Dans de telles conditions, Twitch peut permettre aux marques de déployer des dispositifs créatifs s'appuyant sur le charisme et la popularité du streamer, le format live et la dynamique du jeu. Cette tactique d'influence serait à privilégier à l'achat média classique. "Si cette audience est rétive à la publicité traditionnelle, on y trouve de grands consommateurs, il faut donc juste savoir entrer dans le jeu", résume Fabien Gaetan, creative strategist senior chez We Are Social.

Oeuvrant pour WWF, son agence a lancé le défi #NoBuildChallenge aux streamers de la webTV Solary, une importante communauté de joueurs de Fornite. Ces derniers devaient jouer à leur jeu préféré sans exploiter les ressources naturelles prévues initialement. L'occasion de défendre un message à portée écologique. Le principe a tellement plu que des défis similaires ont été spontanément lancés par la suite en France et aux États-Unis, y compris sur Youtube et Twitter. Un effet boule de neige qui a apporté notoriété (des millions de vues) et donations (près d'un million de dollars) à l'ONG.

Conseillé par Heaven, Samsung a, lui, réuni le streamer Gotaga (1,8 million de followers sur Twitch en septembre), le footballeur Alphonse Areola et les top dix joueurs de Fortnite pour qu'ils streament ensemble sur des téléviseurs Samsung. "Quand les gens regardent le live, ils sont concentrés et, grâce au chat, tout le monde interagit, explique Samuel Diop. La démonstration est donc directe et authentique." Selon notre expert, les contenus live génèrent six fois plus d'interactions que les vidéos classiques.

Publicité sans data

Les followers forment des communautés très attachées à leurs streamers. Ils peuvent les soutenir financièrement, en s'abonnant à leur chaîne ou en réalisant des dons, ce qui leur vaut en retour privilèges et reconnaissance. Pour Burkhard Leimbrock, directeur commercial de Twitch pour l'Europe, ce soutien s'applique aussi à la publicité : "Les utilisateurs sont réceptifs au pre-roll parce qu'ils savent que Twitch partage ses revenus publicitaires avec les diffuseurs", assure-t-il sans toutefois préciser le pourcentage reversé.

"Les utilisateurs sont réceptifs au pre-roll parce qu'ils savent que Twitch partage ses revenus publicitaires avec les diffuseurs"

La publicité vidéo (en pré et en mid-roll) est réservée aux streamers le plus populaires. Les campagnes sont négociées en gré à gré avec les agences, qui émettent des ordres d'insertion, à l'ancienne. Twitch ne dévoile pas la valeur de son CPM moyen. Les audiences sont ciblées uniquement en fonction du contexte de diffusion, par catégorie ou type de contenu. En matière de brand safety, la plateforme indique "faire beaucoup" pour garantir un environnement sûr pour les annonceurs, notamment en bannissant tout streamer qui ne respecterait pas ses engagements.

Au-delà de l'achat média, Twitch accompagne agences et annonceurs dans la mise en place d'opérations de social influence conçues sur mesure avec les streamers les plus populaires. En France, Lego, Paramount, Kelloggs ou Axe ont bénéficié de cet accompagnement. "Il est offert aux grands comptes qui achètent du média chez nous", précise Burkhard Leimbrock. Preuve du dynamisme du marché francophone, Twitch vient d'y nommer une directrice, Mélissa Simoni, qui pilotera depuis Paris une équipe dédiée aux agences et aux annonceurs de France, Belgique et Luxembourg. Cette équipe sera fonctionnelle dès 2020.

Cet article est extrait du dernier numéro d'Adtech News, le supplément mensuel du JDN et de CB News consacré à l'adtech et au martech. Au programme de ce numéro spécial gaming, un dossier sur les playable ads, une interview pour comprendre la stratégie e-sport des céréales Lion, un focus sur la start-up Bolt Influence et le baromètre du programmatique.