Le véhicule connecté bouleverse le secteur automobile

En France, l'article 13 de la loi d'orientation des mobilités habilite le gouvernement à prendre dans les prochains mois une ordonnance sur l'accès aux données automobiles.

Le développement du véhicule connecté, conjugué à celui de l’électronique embarquée, fait déjà évoluer les relations entre les constructeurs automobiles et leurs équipementiers. Ces derniers tirent profit de la digitalisation pour diversifier leur portefeuille de clients. Ainsi, Continental a développé avec Météo France un système d’enrichissement des données météorologiques grâce aux données des véhicules, par exemple celles provenant des essuie-glaces. Valeo propose de nombreux services de sécurité, de navigation, de gestion de flotte et d’autonomisation des véhicules, comme peut l’illustrer eDelivery4U, le droïde de livraison électrique et autonome dévoilé au CES 2020 à Las Vegas, construit avec Meituan Dianping (leader du e-commerce). Les équipementiers avancent cependant prudemment pour éviter de se retrouver en concurrence avec les constructeurs, leurs principaux clients, qui ambitionnent eux-aussi de devenir des opérateurs de services de mobilité.

Le véhicule connecté entraîne également l’irruption de nouveaux acteurs dans le secteur automobile. On pense immédiatement aux géants du numérique, à l’instar d’Amazon avec son assistant vocal Alexa, de Google (Waze, Android Auto) ou encore d’Apple Car Play. Les relations entre ces acteurs et les constructeurs semblent davantage relever de la coopétition que de la compétition. Les deux parties ont pour l’instant plutôt intérêt à collaborer pour profiter de leurs atouts : force de frappe financière et technologique pour les géants du numérique, maîtrise de l’accès aux données pour les constructeurs.

Le véhicule connecté suscite également un énorme intérêt de la part des acteurs de l’entretien automobile, des assureurs, ou des gestionnaires de flotte qui voudraient utiliser les données des véhicules pour enrichir leurs services ou améliorer leur performance : carnet d’entretien connecté, maintenance prédictive, assurance à l’usage, optimisation de la gestion de flottes. On observe aujourd’hui de fortes tensions entre les constructeurs et les acteurs indépendants de l’après-vente automobile. Les constructeurs mettent légitimement en avant les risques liés à la cybersécurité et au respect des données personnelles pour encadrer l’accès aux données. Les acteurs indépendants craignent eux de perdre des parts de marché au profit des constructeurs et de leurs partenaires, estimant qu’ils risquent d’être défavorisés s’ils n’ont pas un accès équitable aux données des véhicules.

Data is the new oil : le véhicule connecté est en train de rebattre les cartes dans un contexte où environ 20% des voitures françaises pourraient être connectées en France en 2020, d’après l’institut Statista. Si les constructeurs sont au centre du jeu grâce à leur maîtrise des canaux d’accès aux données, cela pourrait changer en fonction de l’évolution de la réglementation française et européenne. En cas d’obligation d’ouverture massive des données, les acteurs les plus innovants seront les mieux placés pour valoriser les données. Qui seront-ils : les constructeurs et leurs partenaires, les acteurs indépendants de l’après-vente, les géants du numérique, de nouveaux entrants ? Une belle bataille en perspective, on l’espère au bénéfice des clients finaux.