Trottinettes électriques : la responsabilité passe par l'excellence opérationnelle
Pour mettre fin à l'anarchie engendrée par l'essor fulgurant des trottinettes électriques, la Mairie de Paris a organisé un appel à candidatures qui, d'ici quelques mois, limitera le nombre d'opérateurs autorisés à opérer sur le domaine public parisien.
Pour accompagner le développement harmonieux des nouvelles mobilités, ce que recherche par-dessus tout la Mairie, ce sont des partenaires fiables et responsables. Or, dans ce domaine, ainsi que l’ont montré les difficultés du service Vélib’ après le changement d’opérateur en 2018, la responsabilité est indissociable de l’excellence opérationnelle. Car tout en découle : la qualité du service pour les usagers, l’excellence opérationnelle pour un meilleur bilan environnemental, la viabilité économique des opérateurs retenus et donc leur pérennité, la perception du nouveau mode de déplacement par l’ensemble de la population et, enfin, la crédibilité de la Mairie, qui sera jugée sur sa capacité à ramener l’ordre sur les trottoirs un an après s’être insurgée contre le "bordel généralisé". À l’époque, on dénombrait à Paris plus de douze opérateurs et plus de 40 000 trottinettes au pic de leur présence. En juin, au terme de la procédure, ils ne seront plus que trois, dotés chacun d’une flotte de 5 000 engins qu’ils exploiteront pour deux ans.
Cependant, gérer une flotte de 5 000 engins dans une ville d’une telle importance n’est pas une mince affaire, surtout si l’on veut garantir aux Parisiennes et aux Parisiens les niveaux d’exigences qu’ils sont en droit d’attendre : des engins en bon état, chargés, convenablement garés sur les emplacements désignés, et dont les bénéfices environnementaux et sur la circulation ne seront pas réduits à néant par le va-et-vient de camionnettes polluantes. Pour atteindre cette excellence opérationnelle, trois éléments sont déterminants : la technologie adaptée, les ressources humaines et la culture d’entreprise.
Pour les opérateurs de trottinettes électriques, la technologie ne doit pas s’arrêter à l’application utilisateur et n’être qu’une façade de modernité derrière laquelle les opérations seraient gérées de façon plus ou moins artisanale. Le digital doit être au cœur même du modèle de fonctionnement. Sans technologie, impossible, en effet, d’optimiser les opérations, de les industrialiser, de monter en charge sans perdre en qualité de service ni faire exploser les coûts, et d’être capable de s’adapter sans délai à l’évolution rapide des besoins des utilisateurs, de la réglementation et des attentes des parties prenantes.
L’opérateur doit ainsi s’appuyer sur une suite d’outils comme des systèmes de calcul d’itinéraire intelligents afin d’optimiser en temps réel les tournées de ses équipes, un outil de gestion de flotte puissant et faire appel à la data science pour identifier les engins qui ont une défaillance technique, réaliser de la maintenance prédictive, anticiper les besoins des usagers et optimiser le rebalancement des trottinettes. Conditionner des fonctionnalités à la géolocalisation (geofencing) permet aussi d’inciter les usagers à garer leurs trottinettes sur les emplacements autorisés, ce qui minimise à la fois les coûts et les nuisances. Enfin, grâce à des capteurs connectés sur la trottinette (IoT), on peut suivre en temps réel l’état de la flotte, sa position et son statut.
Tous ces outils réclament du personnel compétent, et c’est là le deuxième pilier de l’excellence opérationnelle. Outre l’engagement sociétal que cela représente, employer des collaborateurs en CDI, et non un volant d’auto-entrepreneurs payés à la tâche, permet de les former et de cultiver un vrai savoir-faire tant pour les opérations de maintenance que pour la logistique. En outre, pouvoir compter sur des mécaniciens compétents, des logisticiens rigoureux et l’engagement d’une véritable équipe, capable de se mobiliser en cas de nécessité, permet de garantir la qualité des opérations et d’élever le niveau d’exigence global.
Enfin, troisième facteur, l’excellence opérationnelle. Cette dernière doit être inscrite dans la culture même de l’entreprise. L’implication, l’exigence, la volonté de toujours s’améliorer ne se décrètent pas le jour où l’on en a besoin. Ce sont des valeurs fondatrices qui doivent imprégner depuis l’origine la façon dont l’entreprise aborde et gère son activité. Déployer 5000 trottinettes sur une seule et même ville nécessite un certain savoir-faire développé via de précédentes expériences : nouveaux pays, capitales, grandes villes… Un acquis qui n’est pas à la portée de tous. L’excellence opérationnelle doit ainsi considérer chaque évolution réglementaire et chaque innovation (par exemple, les batteries amovibles) comme un défi et une opportunité pour se surpasser. Dans le domaine des nouvelles mobilités, tout va très vite et, pour faire face, il faut que l’efficacité et la responsabilité fassent partie de l’ADN de l’opérateur. À partir du mois du juin, c’est sur ce type de partenaire de confiance que la Mairie de Paris espère pouvoir compter.