Du calcul d'itinéraire au véhicule autonome, l'atypique parcours de Moovit
Le calculateur d'itinéraire israélien, qui a développé des technologies de transport à la demande, doit aider son nouveau propriétaire Mobileye à développer un service de véhicules autonomes.
Quel est le rapport entre un calculateur d'itinéraires pour les transports en commun et une société spécialisée dans les technologies d'assistance à la conduite ? A priori aucun. Et pourtant, l'israélien Moovit, dont l'appli couvre 3 200 villes dans 104 pays, est passé sous contrôle de son compatriote Mobileye (filiale d'Intel depuis 2017) en mai dernier. Car derrière son application grand public similaire à Citymapper, Moovit a su développer des services et un modèle économique B2B qui le placent aujourd'hui en position d'aider Mobileye à réaliser ses ambitions dans le véhicule autonome.
Ce business parallèle de Moovit s'adresse aux collectivités, autorités et opérateurs de transport. En premier lieu, ils peuvent utiliser Moovit en marque blanche pour en faire l'appli officielle du territoire pour chercher un itinéraire en transport en commun. Elle peut également intégrer d'autres services de mobilités et prendre en charge le paiement. Parmi ses clients, Ile-de-France Mobilités, l'autorité de transport francilienne, et son appli ViaNavigo. Qu'ils soient clients ou non de cette offre, les opérateurs de transport peuvent aussi passer par Moovit pour gérer leur système de notification push en temps réel, afin de prévenir rapidement les usagers d'une interruption de service ou d'un changement d'horaire. Selon le prix payé, l'information sera uniquement intégrée à l'appli Moovit grand public, ou aussi remontée à celle de l'opérateur. "Les autorités de transport ne disposent pas de ce genre d'outils", assure Yovav Meyad, directeur de la croissance de Moovit.
6 milliards de points de données par jour
Moovit a également développé une plateforme d'analyse de données, qui permet de comparer la demande à l'offre de transport d'un client. "Nous collectons 6 milliards de points de données anonymes chaque jour sur la manière dont nos utilisateurs prennent les transports en commun, utilisent le calcul d'itinéraire, et se déplacent dans la ville", explique Yovav Meyad. "Ce qui ne nous montre pas seulement les voyages effectués, mais aussi ce que les gens cherchent, c'est-à-dire la demande", poursuit-il. De l'autre côté, Moovit dispose d'informations sur toutes les lignes de transport d'un territoire. En comparant la demande et l'offre du réseau, l'entreprise se dit capable d'identifier pour un client les zones mal desservies ou sous-servies. Une solution utilisée par des opérateurs de transport comme Keolis, ou des VTC tels qu'Uber et Lyft.
La dernière fonctionnalité développée par Moovit depuis un an est assez éloignée de son métier original. Elle permet de gérer un service et une flotte de navettes à la demande, via une appli de réservation côté client et un système d'optimisation de l'itinéraire côté chauffeur. Le système permet de limiter le nombre de passagers et d'assigner un nouveau véhicule lorsque le précédent est plein. Les usagers peuvent aussi localiser en temps réel leur navette et connaître une estimation de leur temps d'attente. Un service plutôt pensé pour des opérateurs de transport public, mais également utilisé dans le privé. Par exemple par la banque israélienne Hapoalim a souhaité mettre en place un service de navettes pour ses employés durant l'épidémie de coronavirus.
C'est grâce à ce dernier business que Moovit a attiré l'attention de Mobileye. Le géant des systèmes d'aide à la conduite automobile (ADAS) travaille sur des capteurs, une cartographie et des systèmes de conduite pour véhicules pleinement autonomes. Avec l'aide de Moovit, Mobileye pourrait étendre ses ambitions au-delà de son pré-carré pour gérer tous les aspects d'un service de véhicule autonome à la demande. Ainsi, Mobileye s'occupera des couches inférieures du service (technologies, capteurs, véhicules, cartes), tandis que Moovit prendra en charge les couches supérieures, à savoir la relation avec les utilisateurs et le réseau de transport local, ainsi que la plateforme qui permettra de réserver des courses et d'analyser les données d'utilisation du service. Les deux filiales d'Intel géreront ensemble la couche intermédiaire du service : la gestion de la flotte et des opérations depuis un centre de contrôle.