Marché de l'art : quand la technologie s'en mêle...
OVR, NFT, VR... Depuis plusieurs semaines, ces sigles fleurissent aux quatre coins du globe, repoussant encore les frontières d'un marché de l'art globalisé, spéculatif et qui finalement démontre qu'il sait s'adapter ! Et ce mois-ci plusieurs actualités ont fait le buzz, avec une incidence notoire pour le marché de l'art et des tendances fortes qui se dégagent : comme des changements dans les modèles d'acquisition et une spéculation qui redémarre notamment pour l'art contemporain...
Les "nouvelles" technologies qui n’ont aujourd'hui véritablement de "nouvelles" que leurs applications, font une entrée fracassante depuis plusieurs mois dans le monde de l’art entrainant notamment de nouvelles expériences utilisateur (UX) impactant fortement les transactions, tout en encourageant des acteurs du monde de l’art à se regrouper en vue de mutualiser leurs offres.
Décryptage : que se cachet t'il de si engageant derrière ces sigles ?
- Beeple et NFT : si Beeple est l'avatar de l’artiste américain qui a enregistré un record il y a quelques jours chez Christie’s pour le prix attribué aux enchères à une œuvre numérique * - vendue pour la modique somme de 60 millions d’euros au millionnaire indien Vignesh Sundaresan -, NFT est le sigle bien connu de la technologie Blockchain qui signifie en anglais - Non Fungible Token - soit "jeton non fongible" - . Pour rappel, la Blockchain est une technologie permettant de sauvegarder toutes sortes d'informations dans des serveurs informatiques reliés entre eux, en cryptant leurs données pour les rendre infalsifiables à ce jour. Cette technologie permet par ailleurs d’éditer et de sauvegarder des NFT, actifs numériques non fongibles, soient non interchangeables car aux caractéristiques uniques, faisant ainsi le lien avec un actif - ici virtuel -, l'œuvre d'art numérique, et agissant comme preuve de sa propriété en vue notamment des prochaines transactions la concernant. Or si l’art numérique dématérialisé (soit sans support physique), comme l’œuvre numérique vendue chez Christie's, existe depuis déjà plusieurs décennies, aujourd'hui le NFT a le "pouvoir" d'en garantir la possession en vue de collectionner ce type d’œuvres, agissant en quelque sorte comme titre de propriété et devenant une passerelle entre le monde numérique et le monde réel. Mais pourquoi utiliser des jetons non fongibles au lieu de certificats ou autres justificatifs ? Les NFT sont des actifs "numériquement rattachés ", et de façon immuable, à l’œuvre numérique, permettant ainsi d’en assurer son authenticité ainsi que sa provenance, deux critères fondamentaux pour le marché de l’art !
- OVR est le sigle employé pour « On Line Viewing Rooms », soit "salles de visionnage en ligne". Et avec le lancement de la 1ère édition de la FIAC Online Viewing Rooms qui s'est tenue du 2 au 7 mars dernier, le public français s’est familiarisé un peu plus avec la réalité virtuelle (VR). Cette nouvelle formule de la célèbre Foire parisienne proposée uniquement en ligne et accessible sur Internet pour tous les publics, a généré une nouvelle expérience utilisateur (UX) tant pour les professionnels du marché de l’art que pour les collectionneurs et les amateurs d’art. En proposant ce parcours en réalité virtuelle (VR pour Virtual Reality), les galeries participantes ont permis à chaque « visionneur » de découvrir les oeuvres sélectionnées avec une qualité d'image Haute Définition et surtout avec la possibilité d'une mise en scène plus réelle en utilisant l’option « View on a Wall » afin de percevoir les œuvres à leur véritable échelle ! Et plus encore, elles ont initié une "nouveauté" très impactante pour les transactions : l’affichage du prix des oeuvres (allant de 750 à plusieurs millions d'euros pour cette édition) ou pour certains artistes, l’indication de tranches de prix ! Et cette nouvelle transparence a fait le buzz en servant notamment à "dé-ritualiser" le comportement d’acquisition d’une œuvre d’art et donc à attirer de nouveaux collectionneurs moins aguerris (aux codes du marché de l'art), et ce, même si les plus grandes galeries d’art, d’un simple clic au préalable, proposaient de rentrer en contact avec elles afin de "faire plus ample connaissance", permettant aussi d'initier de nouveaux liens sans forcément d'intention d’achat...
Alors quand la technologie s’en mêle - comme le souligne aussi l’édition 2021 du art Market Report récemment publiée par art Basel & UBS , nombres d’acteurs du monde de l'art y trouvent leur comptes, et en premier lieu les artistes, puisque :
- 28% des galeries déclarent avoir réaliser une « meilleure année », en grande partie grâce à la diminution des frais de leur participation physique aux Foires d’art
- 45 % des 2569 collectionneurs les plus riches ont acheté lors d’une Foire d’art "OVR" , et plus d’un tiers, directement sur Instagram, tous soulignant que la transparence des prix y a été pour beaucoup
- Les ventes d’art en ligne, sur des plateformes spécialisées ou lors de ventes aux enchères sur internet, ont doublé sans néanmoins compenser la baisse globale de 22% du marché de l’art en 2020 atteignant une valeur de 50,1 milliards de dollars, soit la plus basse depuis la récession de 2009.
Et tous s’accordant à dire que l’adoption du numérique aura été finalement le plus fort soutien des ventes d'oeuvres d'art, en réduisant les coûts associés tout en favorisant l’émergence de nouveaux talents artistiques et l’apparition de nouveaux collectionneurs - les Millennials (âgés de 23 à 38 ans) ayant été les acheteurs les plus actifs en 2020 -...
Effet de mode ou Evolution définitive ? Quelle que soit la technologie utilisée dans le monde de l’art aujourd’hui, Blockchain avec les NFT, Réalité Virtuelle pour les OVR, le collectionneur et l'amateur d’art continuent en grande majorité à se référer à des Tiers de confiance, comme les galeristes et les commissaires-priseurs pour certifier leurs acquisitions, et des experts en vue d'authentifier leurs œuvres. Car sur le marché de l’art, la source de l’information doit impérativement être fiable et l’information certaine !
*« The First 5,000 Days » est un collage en ligne d’une image réalisée à partir d'un logiciel, chaque jour depuis 2007.