Rolf Heinz (Prisma Media) "Un quart de notre chiffre d'affaires digital provient de la vidéo"

Le patron de Prisma Media revient sur la fermeture de Mobvalue et Advideum et fait le point sur les leviers de croissance de son groupe.

Rolf Heinz est le patron de Prisma Media France. © S. de P. Prisma Media France

Comment se porte aujourd'hui Prisma Media ?

Côté développement, le groupe a connu sa meilleure année depuis mon arrivée il y a 10 ans. Le chiffre d'affaires publicitaire de nos marques média a crû de 2% sur l'année. La croissance du digital, de l'ordre de 35%, a permis de surcompenser une décroissance structurelle du print.  Les revenus ventes au numéro de nos titres ont augmenté de 1%. Nous avons donc gagné des parts de marché en termes de publicité et de diffusion sur nos cœurs de métiers, les marques magazine, en print et digital. Et le résultat opérationnel de notre coeur de métier est en nette croissance.

Comment y êtes-vous arrivé ?

D'abord en prenant le pari d'augmenter le nombre de parutions print avec des hors-séries ou des extensions de marque. C'est ce qui nous a permis de renouer avec une croissance de la diffusion. Ensuite, en misant sur un format qui explose sur le Web, la vidéo. Nous avons dopé notre offre vidéo grâce à nos 7 studios dédiés et un rythme de publication soutenu. Nous publions environ 10 000 vidéos par mois dont les trois-quarts sont produites par nos soins. Nous cumulons désormais près de 250 millions de vidéos vues par mois. Un quart de notre chiffre d'affaires digital provient désormais de ce format.

"La croissance du digital, de l'ordre de 35%, a permis de compenser la décroissance structurelle du print"

Qu'en est-il de la monétisation ?

Nous avons investi le programmatique et le sur-mesure. Le lancement de notre place de marché Prismadex, dont le chiffre d'affaires a doublé en 2018, permet de gérer le premier levier. Pour le second, nous avons lancé Ganz, une agence qui conseille les annonceurs dans leur stratégie de production de contenus. Autre chantier : l'influence marketing. Nous avons lancé la première plateforme de marketing adossée à un groupe média. Baptisée Influsion, elle conjugue la puissance de nos marques avec le pouvoir de prescription d'influenceurs affinitaires que nous mettons en relation avec les annonceurs.

Vous misez également beaucoup sur le format audio ?

C'est un format que nous avons lancé en 2018. Le potentiel est là même si l'activité est faible. Nous avons pris le parti de gérer l'ensemble de la chaîne de valeur. Nous sommes producteurs, distributeurs et monétisons nous-même via une régie dédiée. Nous avons produit une vingtaine de podcasts qui ont généré près de 5 millions d'écoutes depuis l'été 2018. Previously, le podcast de Télé-loisirs, qui revient sur le succès d'une série, en a généré un million à lui tout seul. Et nous avons déjà attiré des annonceurs, même s'ils se contentent pour l'instant d'un sponsorship en amont du podcast.

2019 sera en tout cas une année d'investissements pour cette activité. Beaucoup d'annonceurs souhaitent occuper ce terrain et je pense que le secteur va se professionnaliser comme ça a été le cas pour la vidéo il y a quelques années.

"Nous avons produit une vingtaine de podcasts qui ont généré près de 5 millions d'écoutes depuis l'été 2018"

Le Geste a récemment annoncé la mise en place de son projet d'identifiant unique (SSO). En serez-vous ?

Nous ne serons pas parmi les investisseurs de ce projet de SSO mais nous pourrions en faire partie comme simple membre. Nous avons déjà un identifiant unique propre au groupe et baptisé Prisma Connect. Cela nous permet de proposer des contenus et publicités personnalisées à l'internaute ainsi que des services additionnels. C'est le genre d'outil qui doit nous permettre de basculer vers le statut de média conversationnel.

JDN. Vous avez décidé de procéder à la fermeture de vos régies Mobvalue et Advideum. Cette décision était-elle inéluctable ?

Rolf Heinz. Oui parce qu'en dépit de nos efforts, le duo Mobvalue-Advideum a perdu près de 50% de son chiffre d'affaires en 2018 et qu'il n'était plus rentable. Le passage au programmatique des deux entités, de même que leur fusion, n'a pas suffi à leur assurer un business model vertueux. Toutefois, ces deux structures rachetées il y a près de six ans ont permis à Prisma Media de monter rapidement en compétences sur les sujets de la vidéo et du mobile. Ces deux leviers sont aujourd'hui clés dans la croissance de notre activité aujourd'hui.

"Le duo Mobvalue-Advideum a perdu près de 50% de son chiffre d'affaires en 2018 et n'était plus rentable"

Mobvalue et Advideum ont longtemps surperformé par rapport à notre plan d'investissement initial. Mais les choses ont changé. Le mobile n'est plus un sujet traité à part au sein des agences média, ce qui réduit l'intérêt d'une régie externe dédiée. De même, les annonceurs TV étaient auparavant à la recherche d'une structure capable de leur garantir de toucher une audience de plus de 20 millions de visiteurs uniques, comme le permettait Advideum. Cela leur évitait alors de parler à chaque régie de média. Mais cette raison d'être est devenue caduque à mesure que les éditeurs ont décidé de reprendre en main la commercialisation de ces formats et que Mobvalue, comme Advideum, ont beaucoup perdu d'inventaire. Aujourd'hui, leur activité pèse moins de 3% du chiffre d'affaires de Prisma Media.

La structure compte encore 40 collaborateurs. Allez-vous leur proposer un reclassement en interne ?

Nous l'avons proposé lorsque c'était pertinent. Huit reclassements en interne sont en cours de discussions.