Vestiaire Collective lève 178 millions d'euros et valide deux fois sa stratégie

Vestiaire Collective lève 178 millions d'euros et valide deux fois sa stratégie Le site de vente de vêtements d'occasion accueille le groupe de luxe Kering à son capital et clame son statut de nouvelle licorne française.

Vestiaire Collective remise la concurrence au placard. Ou en tout cas s'en donne les moyens. Le site de revente de vêtements de seconde main a annoncé ce lundi 1er mars une levée de fonds de 178 millions d'euros. De quoi lui garantir le statut de licorne, clame le groupe dans un communiqué de presse, sans toutefois préciser sa valorisation totale. C'eut été trop beau.

La société n'est toutefois pas totalement avare de chiffres, nous y reviendrons. Mais d'abord, place aux actionnaires, et pas n'importe lesquels, puisqu'en plus des historiques (Bpifrance, Conde Nast, Eurazeo…) qui remettent au pot, Vestiaire Collective enregistre deux nouveaux arrivants : le groupe de luxe français Kering et le fond américain Tiger Global Management. Deux acteurs bien différents qui illustrent chacun la stratégie – et la réussite – du site Internet.

Kering s'offre "environ 5%" du site Internet, soit un investissement d'au moins 50 millions d'euros

Kering d'abord, qui selon le communiqué s'offre "environ 5%" de l'auto-proclamée licorne. Soit, si l'on sort la calculette (on l'a fait), un investissement d'au moins 50 millions d'euros - 0,7% de la capitalisation de Kering tout de même. Il y a quelques années, le rapprochement entre un groupe aux multiples maisons de luxe (Saint Laurent, Balenciaga, Gucci…) et un vendeur de fripes aurait fait lever tous les sourcils des salles d'investissement. Mais le monde a changé. La tendance de fonds de la consommation éco-responsable explique le succès de Vestiaire Collective tout autant qu'elle justifie la participation de Kering, supposé à l'opposé exact de ces préoccupations, avec des pièces aussi exclusives qu'elles sont peu portées.

Sentant le vent tourner, François-Henri Pinault, le patron de Kering, a annoncé son intérêt pour la seconde main dès 2018. Ce qui s'est notamment concrétisé mi-février dernier par un accord entre sa marque Alexander McQueen et… Vestiaire Collective. Concrètement, la maison de luxe sollicite ses clients pour revendre les pièces qu'ils ne portent plus, en les authentifiant au passage. Nom du programme : Brand Approved. On imagine mal comment les autres marques Kering pourraient ne pas rejoindre le mouvement à terme.

Au final, en investissant dans le site d'occasion, Kering s'offre deux lignes de revenus supplémentaires : ceux de Vestiaire Collective (les chiffres, on y vient, promis) et ceux d'une nouvelle activité pour ses maisons. Pour le site Internet, outre des pièces de choix qui viendront enrichir son vestiaire, le partenariat ajoute une brique supplémentaire à son discours et à sa démarche éco-responsable (l'entreprise vise la certification B Corp).

Accélérer en Asie-Pacifique et aux Etats-Unis

L'autre nouvel actionnaire – l'américain Tiger Global Management si vous avez suivi - illustre le second pan de la stratégie de Vestiaire Collective : l'internationalisation. Le site marchand se présente comme "la première plateforme mondiale de mode de seconde main", sans que l'on sache sur quel indicateur elle se base, et indique vouloir accélérer sur les zones Asie-Pacifique et Etats-Unis. "En janvier 2021, les vendeurs locaux dans ces deux zones géographiques ont enregistré une croissance de plus de 250% de leur nombre d'articles vendus par rapport à l'année précédente", se félicite dans le communiqué Griffin Schroeder, associé chez Tiger Global.

Nous vous avions promis des chiffres, voici ceux mis en avant dans le communiqué que nous n'avons pas évoqués, dont deux estimations de marché :

  • + 100% de volume de transactions sur la plateforme en 2020 par rapport à 2019
  • + 90% du nombre de membres en 2020.
  • La part des pièces de seconde main dans la garde-robe des particuliers devrait passer de 21 % en 2021 à 27 % en 2023
  • Le marché de la seconde main devrait atteindre plus de 60 milliards de dollars d'ici 2025.

Certaines entreprises ne connaissent pas la crise. D'autres s'en nourrissent. Lancé en 2008, en plein marasme des subprimes, Vestiaire Collective franchit avec cette levée un nouveau cap, en partie porté par les préoccupations éco-responsables accélérées par le Covid. Vivement la prochaine crise ?