Quelles perspectives pour les DNVB en 2023 ?

Après l'effervescence autour des DNVB en 2021, l'année 2022 a été semée d'embûches pour ces marques. A tel point que 2023 sera une année charnière et que la survie de certaines marques est en jeu.

Les DNVB (Digital Native Vertical Brands), ces marques nouvelle génération, largement plébiscitées par les millenials, se sont incontestablement imposées dans l’écosystème e-commerce depuis quelques années.

Mais l’année 2022 a été semée d'embûches pour ces marques dites DTC (Direct-to-Consumer) : inflation, hausse des coûts de la publicité en ligne, réduction des marges... Le business model des DNVB montre ses vulnérabilités. A tel point que 2023 sera une année charnière et que la survie de certaines marques est en jeu.

Alors quelles sont les perspectives pour les DNVB à l’aube de 2023 ? Sauront-elles pérenniser leur modèle et retrouver le chemin de la rentabilité ? 

Le démarrage triomphant des DNVB

Difficile de passer à côté des DNVB, qui ont commencé à émerger il y a une dizaine d’années, et qui ont été décrites comme une véritable révolution. Et pour cause : elles bousculent les marques traditionnelles et ré-enchantent l'e-commerce. 
Mais au fait, qu’est-ce que les DNVB ? Ce sont ces marques qui naissent sur internet et qui misent sur la communauté, la désintermédiation, et un marketing innovant. Elles ont profité de l'explosion des réseaux sociaux pour communiquer directement avec leurs clients cibles à moindre coût. Et elles cartonnent dans un grand nombre de secteurs, parmi lesquels la beauté, le bien-être, l'alimentation, le sport, la mode, et la décoration.

Plusieurs DNVB emblématiques comme Everlane, Allbirds ou Casper aux Etats-Unis, et comme le Slip Français, Respire, ou encore Typology en France, ont connu un développement extraordinaire et sont souvent présentées comme de véritables success stories.

Mais l’année 2022 a mis un coup d’arrêt à la frénésie autour des DNVB : le contexte économique ainsi que des évolutions légales ont mis en difficulté certaines marques, révélant une réalité plus contrastée.

Les DNVB font face à une hausse massive des coûts en 2022

Tout d’abord, les DNVB subissent de plein fouet l’inflation et la hausse des coûts des matières premières. Si ces marques maîtrisent de A à Z leur chaîne de valeur, du sourcing à la livraison, elles sont néanmoins victimes de la flambée des prix, notamment dans des secteurs comme le textile.

Par ailleurs, elles voient leur CAC (coût d’acquisition) monter en flèche. En effet, les DNVB sont des victimes collatérales des mesures de protection des données personnelles qui ont bouleversé la publicité en ligne.

L’application du RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données) et la mise à jour iOS 14 d’Apple rendent plus difficile l’établissement de profils publicitaires ciblés et le retargeting personnalisé. Les marques qui reposent sur la publicité en ligne, comme les DNVB qui investissent considérablement dans les Ads Facebook et Instagram, ont donc désormais beaucoup plus de difficultés à atteindre une audience susceptible d’être intéressée. Et leurs coûts d’acquisition explosent.

Au bout du compte, ce sont à la fois les coûts de production et les coûts d’acquisition des DNVB qui s’envolent, et la rentabilité de leur modèle s’en voit grandement affectée. Certaines marques continuent à enregistrer une croissance fulgurante, mais creusent des déficits alarmants. C’est par exemple le cas de la marque de sneakers durables Allbirds, qui annonçait en août 2022 une hausse de 15% de son chiffre d’affaires… Mais, une perte nette de 29,4 millions de dollars, en hausse de 287%.

Bref, la hausse des coûts est telle que la rentabilité de nombreuses DNVB est directement mise en péril. De quoi pousser certaines d’entre elles au bord du gouffre.

Certaines marques DTC en forte difficulté en 2022

Les DNVB sont plus à risque que les marques des grands groupes qui ont plus de ressources et plus d'expérience pour faire face à ce genre de difficultés.

La chute de plusieurs DNVB a d’ailleurs été largement médiatisée, comme celle de la marque américaine de boissons apéritives Haus. Créée en 2019, la marque a connu un démarrage très prometteur, levant plusieurs millions de dollars pour financer son développement. Mais en Août 2022, la marque a annoncé avoir perdu son financement en série A, l’obligeant à stopper ses opérations.

En France, la marque de bougies parfumées My Jolie Candle a quant à elle été placée en redressement judiciaire en juin 2022, après une période post-Covid compliquée, avant d’être reprise par le groupe Emosia (maison Berger). Plus récemment au Royaume-Uni, la marque iconique d’ameublement en ligne Made.com est aujourd'hui au bord de la faillite. Lancée en 2011, la compagnie entrée en bourse il y a un an et demi a perdu 90% de sa valeur le 25 octobre, après avoir atteint un chiffre d'affaires de 315 millions de livres en 2020. La société anglaise rencontre des difficultés financières à la suite de problèmes de logistique et une baisse des ventes dans une environnement inflationniste.

Autre exemple criant des difficultés connues par les DNVB dans l’hexagone : le mouvement We are Lucioles, un plaidoyer de la part d’un groupement de marques DTC, qui ne parviennent plus à faire face à l’explosion de leurs coûts. Ce mouvement, lancé à l’initiative des fondatrices de la marque de lingerie éthique We Are Jolies, se présente comme la chronique d’une mort annoncée et implore le ministre Bruno Le Maire de prendre des mesures pour aider les DNVB en difficulté.

Maîtriser leurs coûts et retrouver le chemin de la rentabilité

Pour pérenniser leur business model, les DNVB doivent désormais prioriser la rentabilité, plutôt que la croissance à tout prix. Elles doivent prendre le temps d’analyser leurs coûts pour les optimiser et miser sur les leviers de croissance qui ont le plus d’impact.

Les marques maîtrisent généralement très bien le coût de revient de leurs produits. Mais elles peuvent souvent trouver des moyens d’optimiser la gestion de leur trésorerie. Par exemple en renégociant leurs termes de paiement pour payer leurs fournisseurs un peu plus tard ou de manière fractionnée. Pour les fournisseurs, il est bien souvent préférable d’être payé en plusieurs fois plutôt que de recevoir un paiement en une fois, mais de perdre ensuite le client si la marque fait faillite.

D’autre part, les marques ont souvent un manque de visibilité sur leurs coûts d’acquisition, notamment en paid media. Il est donc essentiel qu’elles prennent le temps d’analyser leurs dépenses, et de remettre en question leurs budgets, au regard des performances de leurs campagnes. Cela est d’autant plus important que l’accès au capital et à la dette pour financer l’acquisition de nouveaux clients est de plus en chère. Les DNVB doivent plus que jamais repenser leur approche à l’acquisition clients.
Elles doivent également adopter une approche résolument agile et des méthodes test and learn : diversifier leurs canaux d’acquisition, analyser les performances, itérer, et pérenniser les campagnes qui fonctionnent pour en faire de véritables moteurs de croissance.

Quelques pistes : 

  • miser toujours plus sur la communauté et la fidélisation, pour augmenter le taux de repeat business et limiter les investissements en acquisition de nouveaux clients. Il est largement préférable de créer une marque forte avec des clients fidèles et une communauté engagée plutôt que de survivre à coups de campagnes chocs basées sur des promos ;
  • explorer le potentiel des points de vente physiques. De nombreuses marques se sont déjà tournées avec succès vers le retail, en ouvrant leurs propres boutiques ou en s’installant dans des pop-up stores pour toucher de nouveaux clients. Le wholesale, est également un territoire à explorer, même s’il nécessite souvent de gros investissements ;
  • ne pas se contenter de miser sur Facebook et Instagram, et tester des campagnes sur TikTok par exemple ;
  • revoir son mix marketing et miser sur des canaux sous exploités comme les partenariats avec d’autres marques de e-commerce, en s’appuyant sur un outil comme Sqwad.

Pour conclure, 2023 promet de marquer un tournant pour les DNVB. Il est probable que certaines ne survivent pas à cette période chaotique, mais d’autres sauront sans nul doute s’adapter. Elles en ressortiront plus fortes, plus stables, et permettront d’ancrer durablement leur modèle singulier et innovant au sein de l’écosystème e-commerce.