SearchGPT peut-il détrôner Google ?
Le moteur de recherche d'OpenAI, SearchGPT, est enfin disponible. Mais Google reste incontournable, et pour le détrôner, il faudra bien plus qu'une simple fonctionnalité d'IA.
SearchGPT est enfin disponible pour les utilisateurs de la version payante de ChatGPT, et il n’a pas fallu longtemps pour que les réseaux sociaux soient inondés de publications apocalyptiques illustrées de pierres tombales : ci-gît Google, fin de Google, décrochage inévitable du cours de ses actions... Mais attention à ne pas enterrer Google trop vite !
Revenir aux faits
Il est temps de remettre l’église au milieu du village et de poser les faits sur la table.
ChatGPT compte 200 millions d’utilisateurs dans le monde ; mais seuls 1 million, ceux de la version payante, ont pour l’instant accès à SearchGPT. Tablons sur le fait que le moteur de recherche de ChatGPT sera bientôt ouvert aux 200 millions d’utilisateurs du LLM d’OpenAI.
En face, Google, c'est un écosystème massif, intégré dans la vie quotidienne de 4 milliards d’utilisateurs particuliers et professionnels, alimenté par une quantité de données inégalée qui lui permettent de personnaliser finement les expériences de recherche. Son avance en termes de compréhension des habitudes de recherche est immense. C’est aussi une base de données mondiale d’entreprises, capable de fournir des réponses précises aux recherches locales et en situation de mobilité.
Depuis plus de 25 ans, Google est solidement ancré dans nos habitudes de recherches. Ce n’est d’ailleurs plus une habitude, c’est un réflexe de recherche — un réflexe difficile à détrôner.
Enfin, Google, ce sont des investissements très lourds dans l’IA, qui font de lui un acteur majeur du secteur, et qui lui ont permis de considérablement augmenter son chiffre d’affaires (+14% de CA et +28% de bénéfice net au deuxième trimestre 2024).
Google n’est donc pas encore tout à fait mort.
Quel concurrent est SearchGPT ?
Pour le moment, OpenAI ne fait même pas d’ombre à Google, il le bouscule un peu, le pousse à réagir, à s’adapter. OpenAI prend les risques de tester l’innovation, et Google implémente ce qui fonctionne avec toute la force de frappe qu’on lui connaît.
SearchGPT suscite beaucoup d’attentes, notamment en raison de sa capacité à fournir des réponses génératives sourcées et en temps réel. Certains parlent de révolution et voient déjà en lui un "Google killer". En réalité, c’est une évolution modeste. L’expérience me paraît très sommaire ; bien que certaines réponses soient enrichies de cartes ou de graphiques, Perplexity propose beaucoup mieux. Bref, on est loin des standards établis par Google.
Bien sûr, nous n’en sommes qu’aux débuts, mais mon objectif ici est de tempérer les nombreuses réactions sur les réseaux sociaux qui annoncent la mort imminente de Google.
Pour détrôner Google sur le terrain de la recherche en ligne, il ne s’agit pas de faire mieux, mais de faire beaucoup mieux, en termes d’expérience et de performance. Et pour le moment, la proposition de SearchGPT - des réponses génératives sourcées - Google la maîtrise déjà très bien avec ses AI Overviews. Même si cette fonctionnalité n’est pas encore disponible en Europe, elle est déjà déployée dans le reste du monde.
Un nouveau terrain de jeu pour le SEO
Cela dit, maintenant que SearchGPT peut fournir des réponses sourcées basées sur des données actualisées en temps réel, la question du SEO pour ChatGPT devient pertinente. On peut raisonnablement s'attendre à ce que le moteur de recherche d'OpenAI se développe et c’est tout un nouveau pan qui s’ouvre pour les référenceurs.
Cependant, cette évolution n'est pas sans risques pour les éditeurs de sites, dont le trafic organique pourrait encore s’éroder. Cliquera-t-on sur les sources des réponses génératives ? Déjà, plus de 60% des recherches sur Google ne génèrent aucun clic. Si les moteurs de recherche privilégient les réponses directes sans clic, les sites web devront redoubler d’ingéniosité et explorer de nouvelles stratégies de contenu pour rester visibles.
Cette évolution impose aux professionnels du SEO de revoir leurs pratiques pour se positionner dans un environnement de recherche "Zéro click", de plus en plus dominé par les réponses génératives. Comme je l’expliquais dans ma dernière chronique sur le Journal du Net : ce n’est pas la fin de Google, mais la fin de la page de résultats telle que nous l'avons connue jusqu’ici.
La question, finalement, n’est pas de savoir si Google va disparaître, mais de comprendre comment les pratiques de recherche et d’accès à l’information vont évoluer dans cette nouvelle ère de l’IA. Les règles changent, et ceux qui sauront s’adapter auront une longueur d’avance.