Olac, la ville fantôme de Philips pour tester l'éclairage connecté en France
Le géant néerlandais de l'éclairage travaille sur ses infrastructures intelligentes dans une ville-test unique au monde bâtie à échelle réelle dans la banlieue lyonnaise.
Cinq soirs par semaine, à la nuit tombée, il s'illumine. A quelques kilomètres de Miribel (Ain), sur les bords de l'A42 qui relie les habitants de la banlieue nord de Lyon à son centre-ville, se dresse OLAC (Outdoor Lighting Application Center). Une véritable ville fantôme recréée en taille réelle qui depuis 20 ans sert de terrain de jeu aux équipes de recherche et développement de Philips Lighting, et notamment pour l'éclairage connecté.
Construit au fond d'une zone d'activité on ne peut plus banale, OLAC est jusqu'au coucher du soleil bercé par les seuls va-et-vient des voitures lancées à toute vitesse sur l'autoroute qui le borde. Le bâtiment principal est petit mais surplombé d'une imposante structure métallique. Il est entouré de trois espaces de 47 000 m2 au total, explique Christian Ferouelle, ingénieur éclairagiste de Philips Lighting, qui représentent les zones fondamentales d'une commune classique : ses routes, sa zone pavillonnaire et son centre-ville. Chaque année, en moyenne 2 500 visiteurs, villes, professionnels, ou chercheurs, sont accueillis ici pour des démonstrations. Et c'est à chaque fois l'un des 120 chercheurs du laboratoire de la marque, situé à quelques kilomètres de là, qui se charge de les accompagner.
Il est un peu plus de 18 heures quand la nuit tombe enfin. C'est à ce moment que tout s'anime. Notre visite commence par l'espace dédié à l'éclairage routier. On nous installe dans des fauteuils au confort semblable à celui des voitures les plus courantes. "Pour chaque zone, tout a été fait pour recréer une situation la plus réaliste possible. Ici ce sont des sièges auto, pour la zone résidentielle des sièges de bar et pour le centre-ville des chaises et des tables comme sur les terrasses de café", indique notre guide. Face à nous, une reproduction d'une route nationale parsemée d'obstacles : des voitures, un animal et des piétons.
D'un clic sur sa tablette, Christian Ferouelle active les cinq mâts automatisés placés en bord de chaussée. Chacun d'entre eux dispose de différents réverbères rétractables équipés de toutes les technologies du catalogue de Philips Lighting. Pour l'instant, seuls des phares de voiture éclairent la chaussée, et les obstacles sont difficilement distinguables. Sur la gauche, un écran géant reproduit l'interface CityTouch, une sorte de Google Maps où sont géolocalisés et contrôlés à distance tous les lampadaires équipés d'un capteur qui communique via le réseau cellulaire. Ce logiciel imaginé par Philips Lighting permet de connaître en temps réel la consommation électrique, et donc la facture énergétique, de chaque point lumineux et d'être alerté immédiatement en cas de panne. Même les points non connectés peuvent être intégrés manuellement pour bénéficier de l'algorithme de maintenance prédictive, capable de calculer la durée de vie du matériel.
La police d'Eindhoven a une interface dédiée qui lui permet de pousser l'éclairage à son intensité maximale sur les lieux d'intervention
L'ingénieur lance à distance l'allumage des lampadaires comme pourrait le faire le responsable de l'éclairage d'une commune. Le temps de réponse est d'à peu près deux minutes. "A l'échelle d'une ville, c'est très court", assure-t-il. Outre le contrôle à distance, il est possible de mettre en place des plannings et de programmer plus ou moins de luminosité en fonction de l'heure. Grâce à la technologie LED, il est possible de déterminer très exactement les zones à éclairer et de ne couvrir que la route et le bas-côté, là où les obstacles peuvent apparaître à tout moment. "A Eindhoven nous avons créé une interface dédiée pour la police qui lui permet de pousser l'éclairage à son intensité maximale dans les zones où elle doit intervenir pendant 30 minutes", ajoute Christophe Bresson, directeur de la communication France.
Direction maintenant la seconde salle pour découvrir la zone pavillonnaire, avec ses appartements, sa crèche et son parc. Philips Lighting a consulté des architectes et des urbanistes pour que les lieux correspondent au mieux au style européen, le Vieux continent représentant une majeure partie de sa clientèle. Comme sur la route, tout est ici pilotable à distance. Toujours grâce à sa tablette, Christian Ferouelle fait sortir de trappes enfouies dans le sol des réverbères intelligents, qui adaptent leur luminosité en fonction de l'activité des habitants. "Alors qu'une installation classique voyait 50% de sa luminosité partir éclairer le ciel, ce qui est inutile, les lumières LED permettent à la fois une économie d'énergie de 40 à 50% mais aussi de n'éclairer que lorsque c'est nécessaire", affirme-t-il.
"Une installation classique voyait 50% de sa luminosité partir éclairer le ciel"
Démonstration. Les deux salariés du centre ont installé un faux cycliste sur rail pour tester l'éclairage adaptatif. Tout au long de son parcours dans la rue, les lampadaires l'éclairent alors que le reste de la rue conserve le même niveau de luminosité. Une solution qui plaît beaucoup aux collectivités selon les responsables de Philips Lighting présents. En France, 150 villes comme Caen, qui dispose de 1 500 réverbères connectés, Le Mans, Narbonne ou Oyonnax, ont déjà franchi le pas de l'éclairage connecté avec la marque. Dans le monde, ses plus gros clients sont Los Angeles, avec 110 000 points, et Jakarta (100 000 points).
Dans le centre-ville, enfin, l'entreprise présente ses solutions d'éclairage dynamique personnalisé. Un enjeu crucial à en croire l'ingénieur éclairagiste : "Il y a désormais une véritable compétition entre les villes sur leur attractivité et cela ne s'arrête pas à la nuit tombée. 25% de l'activité à Londres se fait de nuit, par exemple."
Elle propose notamment de diffuser des messages en direct sur les façades des bâtiments ouverts le soir, comme le temps restant avant la fin de l'entracte à l'opéra pour les spectateurs qui seraient sortis prendre l'air, ou d'avertir sur l'arrivée imminente d'un DJ connu dans la discothèque du coin. Elle peut aussi aider à diriger les flux de piétons grâce à des flèches projetées dans les rues en cas d'affluence majeure pour un événement particulier, et ainsi éviter que tout le monde n'emprunte le même chemin.
OLAC est aussi le lieu où Philips Lighting peut tester en conditions réelles de nouvelles innovations comme le Lifi, c'est-à-dire utiliser la lumière pour fournir un accès Internet. Pas encore présent ici, il fait partie des technologies d'avenir selon la marque. Elle compte aussi sur ce centre pour préparer de nouveaux partenariats, comme celui qu'elle a noué en 2015 avec Ericsson, qui intègre notamment à Los Angeles ses mini-antennes 4G aux lampadaires de Philips Lighting pour renforcer le réseau cellulaire local.