Noisy-le-Grand, big smart city

Noisy-le-Grand, big smart city La commune de Seine-Saint-Denis déploie son propre réseau LoRaWAN pour donner de l'ampleur à ses différents projets IoT, destinés à la transformer en une smart city concrète.

La commune de Noisy-le-Grand est sous le feu des projecteurs avec son projet Récital. Cette initiative, dont le nom est l'acronyme de "Réduction Energétique Immédiate et A Long terme", a pour objectif de réduire de 50% d'ici à 2030 grâce à l'IA les consommations énergétiques et l'impact carbone des 200 bâtiments publics de la ville, d'une surface d'environ 200 000 m², tout en optimisant les dépenses de rénovation. L'expérimentation, lauréat de l'appel à projet du gouvernement "Démonstrateurs d'intelligence artificielle frugale au service de la transition énergétique des territoires", vise à créer une solution réplicable en France. Elle accélère les démarches d'innovation à Noisy-le-Grand et prépare pour la commune le passage à l'échelle de l'IoT : "Il faudra déployer des compteurs communicants et des capteurs dans chaque bâtiment pour mesurer les consommations énergétiques car l'IoT est un outil de décarbonation", prévient Axel Saint-Charles, directeur SI et Numérique de la Ville.

Ce projet modèle, qui doit inspirer de nombreuses smart cities en France, ne représente qu'une des briques des initiatives menées par Noisy-le-Grand. La première initiative de la commune, qui s'inscrit aujourd'hui dans les politiques de smart city, a débuté dès 2005. "Les émeutes à ce moment-là ont conduit à notre premier projet, autour de la vidéo-surveillance. Nous avons déployé en parallèle notre réseau fibre pour connecter les bâtiments publics entre eux", se rappelle Axel Saint-Charles. En 2005, un centre de supervision urbain a été créé avec huit caméras connectées installées en ville. En 2023, 220 sont déployées. "Nous remontons aujourd'hui également dans le centre de supervision urbain des données de Waze pour réagir plus vite aux événements signalés par les citoyens", souligne Philippe Sajhau, directeur de la donnée, de la smart city et de l'innovation à Noisy-le-Grand. 

La Maire de Noisy-le-Grand, Brigitte Marsigny, s'est engagée à développer des projets smart city en s'appuyant sur le partage de la donnée. "La démarche data-driven guide toutes nos initiatives", souligne Axel Saint-Charles, qui a supervisé de nombreux POC. L'un des projets qui a mobilisé Noisy-le-Grand de 2018 à 2020 a été la création d'un système d'information géographique (SIG) pour obtenir des relevés aériens et des mesures afin d'accompagner le développement d'un territoire intelligent. Les projets ont commencé à passer à l'échelle en 2022, notamment avec la digitalisation des arrêtés de voiries pour la livraison.

Un réseau LoRaWAN privé en construction

L'un des projets phares a concerné l'éclairage intelligent. "Cet usage est né des opérateurs sur le terrain. Nous avons réalisé une première expérimentation en installant des détecteurs de présence mais qui se sont révélés peu robustes. Nous avons ensuite décidé de passer l'éclairage au Led, il nous aura fallu quatre ans pour aboutir à un ROI (la commune a mené une expérimentation sur près de 40% de ses 9 500 lampadaires, ndlr). L'enjeu qui nous occupe à présent sur ce sujet est de savoir comment bien piloter l'éclairage à distance, pour adapter l'intensité et l'abaisser la nuit, ce n'est pas simple", raconte Axel Saint-Charles.

Pour s'impliquer dans le confort des citoyens, Noisy-le-Grand a également installé des capteurs de qualité de l'air pour évaluer le niveau de pollution en ville, à trois endroits à proximité de l'autoroute. "Nous voulons savoir si le niveau de pollution s'accroît selon certains horaires ou selon la météo", précise Axel Saint-Charles, qui travaille à la redéfinition de la mobilité locale. Autre projet sur le confort qui occupe actuellement les équipes d'Axel Saint-Charles : l'installation de capteurs dans les écoles pour suivre notamment la température et la qualité de l'air.

"Nous menons une approche zéro trust"

C'est pour assurer la maîtrise de l'ensemble de ces projets que Noisy-le-Grand déploie son propre réseau LoRaWAN, avec l'aide d'un syndicat mixte. Deux gateway couvrent déjà la commune. "On l'a fait pour la fibre et le wifi public, il est donc naturel de poursuivre avec l'IoT. Ces projets IoT nous ont par ailleurs fait prendre conscience d'assurer nous-même la cybersécurité et le maintien en condition opérationnelle (MCO) des solutions. Nous nous sommes dotés d'un hyperviseur pour la sécurité et nous menons une approche zéro trust", indique Axel Saint-Charles, qui a précisé ses mesures de sécurité dans le cadre d'un événement organisé par le Clusif, rappelant que le zéro trust concerne à la fois les équipements et les utilisateurs. Un CDO a notamment été recruté en 2020. Si aujourd'hui Noisy-le-Grand gère une centaine de capteurs, la commune prévoit d'en superviser des milliers très prochainement.

Le SIG, outil d'aide à la décision

La participation de Noisy-le-Grand au programme Quartier Métropolitain d'Innovation de la Métropole du Grand Paris depuis mars 2023 (Lire aussi l'interview du vice-président délégué à l'innovation à la communication et au numérique de la Métropole du Grand-Paris, Geoffroy Boulard : "Je souhaite doubler le nombre de communes concernées par les Quartiers Métropolitains d'Innovation) accélère la mise en place de nouveaux projets à venir, au nombre de huit. "Nous allons installer des capteurs sur les points d'apport volontaire pour optimiser la collecte des déchets", cite en exemple Axel Saint-Charles. Le SIG de la ville créé, devenu un "système d'aide à la décision incontournable", va servir pour identifier les zones de chaleur et permettre la création d'îlots de fraîcheur. "Il y a de manière générale un retard sur ce sujet, il est donc important de passer à l'action", observe Mickael Pinto, DGA énergie et ville durable chez Egis.

"Nous sommes en train de tester l'apport de capteurs IoT placés à la racine des arbres"

Autre exemple, cette fois en lien avec l'environnement : l'arrosage intelligent. "Nous sommes en train de tester l'apport de capteurs IoT placés à la racine des arbres pour obtenir des informations, notamment sur leur taux d'hygrométrie. Cela permettrait de ne demander l'arrosage qu'à partir d'un certain seuil. Quand on détient plus de 18 000 arbres en ville, optimiser le passage des agents chargés de l'arrosage à vite un intérêt", note Axel Saint-Charles. Au salon Innopolis, l'adjoint au Maire Harald Poillot avait fait le constat que la ville intelligente est encore peu visible pour les citoyens : "Il y a 180 villes en Europe qui peuvent être qualifiées de smart city mais cela ne représente rien de concret pour les habitants." Avec ces projets sur le terrain, il ne fait aucun doute que Noisy-le-Grand a pour ambition de changer la donne.