L'autonomie des DSI, le nouvel enjeu des ESN
DSI et ESN, un rééquilibrage est nécessaire.
Le bon fonctionnement des directions des systèmes d’informations françaises repose en partie sur leurs prestataires, et en particulier les Entreprises de Services Numériques, dont les consultants constituent une part non-négligeable des équipes IT qui font
fonctionner et transforment les systèmes d’information des organisations. Une situation qui peut paraître confortable pour les ESN mais qui présente malgré tout ses limites. Le recours à ces équipes externes peut conduire pour les entreprises à une dépendance multiple, à la fois technologique et financière et fragiliser les organisations malgré elles. Un constat dont on peut légitimement douter de sa pérennité, d’un côté comme de l’autre.
DSI et ESN, un rééquilibrage nécessaire
Les Directions des Systèmes d’Informations restent la plupart du temps tributaires des ESN pour mener à bien de nombreux projets. Lorsque les équipes sont absorbées sur d’autres projets, ou encore quand les projets nécessitent des compétences spécifiques dont la DSI ne dispose pas, mais aussi pour bénéficier d’un regard innovant sur une problématique donnée…, le recours aux ESN est une nécessité pour accélérer la production des entreprises. Cependant, cette externalisation comporte des risques significatifs comme la perte de contrôle sur les coûts, la diminution de la qualité des services, la vulnérabilité, l’asphyxie des expertises internes... Le Directeur des services informatiques de l’URSSAF expliquait récemment sa dépendance aux
ESN avec entre 800 à 1000 consultants, pour un DSI qui compte près de 1200 collaborateurs et le risque de perdre la maîtrise de nombreuses compétences.
Pour les ESN aussi le schéma de dépendance montre ses limites. Comment motiver des équipes durablement si elles sont considérées comme la 5ème roue du carrosse ? Comment entretenir cette soif d’avoir toujours un coup d’avance d’un point de vue tech si les consultants s’enferment chez le même client pendant des années ? Car c’est aussi cela la dépendance : assèchement des expertises, perte du sens même du rôle de conseil, manque de reconnaissance…
À l’heure où les défis technologiques sont de plus en plus complexes (comme avec l'intelligence artificielle, la cybersécurité, et le cloud) et où le marché est sous pression par manque de talents, les ESN et les DSI doivent entamer une transformation de leur relation pour tendre vers un modèle plus vertueux et plus sain.
Non l’ESN n’est pas par nature un palliatif à l’inflexibilité du droit du travail.
De la dépendance à la création de valeur
Nombreux acteurs DSI et ESN ont déjà compris les risques qui se cachent derrière la dépendance de leurs interactions et ont intégré les notions de transmission de compétences et d’autonomie dans les missions. À terme, l’entreprise doit être capable de faire évoluer ses systèmes de manière autonome, en conservant les compétences nécessaires en interne et de pouvoir changer de prestataires comme bon lui semble, sans être prisonnière d’une méthode, de choix technologiques ou encore de savoir-faire. L’entreprise peut continuer ainsi à s’appuyer sur l’expertise de consultants externes pour ses projets, mais à la fin, elle dispose des clés du camion et elle peut prendre la route sans conduite accompagnée, voire sans GPS.
Dans cette configuration, les ESN ont bien évidemment un rôle à jouer. Ce sont elles qui doivent engager cette transformation auprès de leurs clients.
Cela implique un partage de connaissances entre les équipes des ESN et celles des entreprises clientes, la montée en compétences des équipes et la totale autonomie de l’entreprise vis-à-vis de l’ESN pour au final assainir la relation entre les organisations et leurs ESN.
Plutôt que de nourrir et encourager la dépendance, il faut construire l’indépendance !
Engager le changement :
Dans chaque mission, chaque projet, chaque transformation menée par les ESN, il leur faut créer les conditions de la réussite du projet et cela passe incontestablement par être en capacité d’embarquer les équipes du client tout au long du projet pour que l’après projet soit tout aussi fluide, sans l’ESN.
Cela peut par exemple passer par la création d’une équipe hybride client et ESN qui mènera conjointement le projet et qui apportera par sa configuration une coordination optimale, une meilleure transparence, le renforcement des expertises internes… !
Les ESN vont devoir se réinventer : une nouvelle culture, une nouvelle posture, une nouvelle offre commerciale voire un nouveau modèle économique, pour elles aussi bénéficier des effets positifs de la création de valeurs que la recherche d’autonomie permet.
Pour les DSI, cette approche coche toutes les cases : une vision précise de la situation pour le management et les opérationnels, un ROI concret, un produit fonctionnel, des équipes qui se sentent valorisées par une montée en compétences et une capacité à se projeter sur la suite ! En se rendant non-indispensables, les ESN font bien plus qu’embarquer leurs clients dans les projets. Elles créent de la valeur chez leurs clients. N’est-ce pas la meilleure offre qu’une ESN puisse proposer ?
L’autonomie des DSI demeure un enjeu de taille mais avec de belles promesses en fond de toile : en marché plus transparent, des expertises exacerbées stimulées par le partage de connaissances et la montée en puissance des compétences, un management bienveillant aligné aux enjeux RH et sociétaux.