Changeons les codes, vive le slow-entreprenariat
La course aux levées de fonds ne serait-elle pas en partie responsable de griller les ailes de nos entrepreneurs ? Tout comme le fait de développer nos start-up au rythme parisien ?
On peut en être fier : la France compte 1 million de start-up qui emploient 1,5 million de salariés (source Insee). Fiers aussi d’en faire partie ; et surtout des rares qui perdurent. Parce qu’une autre réalité moins cocorico est que les start-up concentrent un taux d’échec entre 60% et 75%.
Pour inverser la tendance, ne devrions-nous pas tendre vers une nouvelle slow-économie en région ?
Aujourd’hui, 1 start-up sur 2 se trouve en Ile-de-France. Ce qui veut dire qu’1 sur 2 se trouve en région (CQFD). Et la French Tech multiplie les actions pour changer la donne du parisianisme aigu et faire émerger des pôles d’innovation dans l'hexagone. Pourquoi est-ce une bonne chose ? Pour deux raisons. La première c’est que ça vient bousculer les codes standardisés et propulsés en école de commerce auprès de nos futurs entrepreneurs. La France est vaste, le champs des possibles géographiques pour entreprendre aussi. La deuxième, c’est qu’entreprendre requiert des ailes ; hors Paris c’est trop souvent la course aux levées de fonds. Dans le gargarisme des chiffres, les start-up de la French Tech ont levé 13,5 milliards d’euros en 2022, majoritairement à Paris. Gargarisme qui fait oublier qu’un autre modèle existe : celui du Bootstrap !
Slow-entreprendre, la nouvelle norme à contre-courant ?
L'entrepreneur à succès est-il ce Superman ou cette Wonderwoman piquouzé au stress qui court après le temps et l’argent dans les méandres des rues parisiennes en trottinette électrique ? Est-il.elle cette personne “no life” qui dédie 300% de sa vie à sa start-up ? C’est bien ce que le mythe entrepreneurial moderne et vendeur, mais destructeur et biaisé qui est véhiculé depuis trop longtemps.
A la lecture du taux d’échec de start-up, il est temps de revoir son rapport au succès et d’apporter à nouveau un peu de raison dans la folie de l’entreprenariat. Au risque de voir tous les entrepreneurs condamnés au burn-out. Alors oui à la Start-up Nation, mais à la Slow Nation.
Revoir son rapport au succès, c’est aussi être clair quant à son ambition. Si vous voulez créer une Licorne, évidemment, tournez à droite et entrez dans le marathon. Et c’est tout à fait louable ! Si toute votre vie ne tourne pas autour du travail, que vous avez identifié que votre équilibre vie pro/perso est un essentiel, que votre art se révèle lorsque vous prenez le temps, alors… ralentissez.
Dans tous les cas, pour choisir son rythme, son modèle, il faut en amont travailler sur soi et découvrir ses leviers de motivation. Et c’est ce travail qui va impacter la rythmique de sa start-up (et par effet ricochet la vie de vos salariés !). A la suite d’un bilan de compétences, j’ai pu, au coeur du développement de ma start-up, continuer à vivre à mon rythme et prendre soin de moi et de mes collaborateurs, tout en prenant des décisions raisonnées mais intuitives qui nous amènent à être sur une dynamique qui double nos résultats chaque année. Entreprendre sans sacrifier ses rêves, sa vie et sa croissance, c’est possible ! Pour moi, slow-entreprendre a pris tout son sens en région. Raisonnablement, à l’ancienne, de manière responsable, au rythme des saisons de sa croissance.
Entreprendre en région pour revenir à son essentiel entrepreneurial
Lorsque j’ai créé ma start-up en 2018 et que j’ai osé affirmer vouloir la développer en province, la courbe de confiance externe a été… impactée. Comment !? Vouloir développer sa start-up en dehors de l'écosystème ? Loin des investisseurs ? Loin de cette frénésie qui porte les start-up vers l’hyper-croissance ? Oui. Et l’assumer. Entreprendre c’est d'abord entreprendre sa vie. Entreprendre ses rêves et sa vision. Et quand on décide d’entreprendre au-delà du périphérique parisien, le Bootstrap devient une évidence ! Peut-être par défaut au départ, certes. Les investisseurs claironnant qu’une start-up ne pouvait réellement performer qu’en Ile-de-France.
Entreprendre en Bootstrap pour rester fidèle à son art
Comment dessiner fidèlement son art quand le pinceau est tenu par un inconnu ? Quand cet inconnu décide finalement des teintes, de la texture de la toile et du temps à y consacrer ? En réalité, lorsque j’ai rencontré des investisseurs et business angels (à Paris, donc), ce monde m’a rebuté et même fait peur. Développant une entreprise centrée sur l’humain, la course au business portée en étendard ne pouvait pas me correspondre, être profondément alignée à mon désir de grandir humainement.
Grandir humainement, ça veut dire accepter de commencer petit, avec des fonds propres et le soutien des amis, de la famille. Ça veut dire travailler consciencieusement sur son produit, son modèle et les tester. Ça veut dire solliciter des prêts bancaires pour injecter du marketing (ce monde inconnu et virtuel pour ces institutions en province !). Ça veut dire prendre son temps pour choisir ses couleurs.
Et soyons clair, quand on fait appel à de la “Love Money”, on se sent redevable, on est animé par cette soif de ne pas décevoir ceux qui ont réellement cru en notre potentiel et vision. En cela, ça crée une “pression” positive qui attise aujourd'hui l'intérêt des… investisseurs !
Alors mes chers entrepreneurs, lancez-vous ! Lentement, tranquillement, sûrement.
A votre rythme. Selon vos codes, en toute liberté, sans pression d’investisseurs. N’écoutez pas trop vite leurs sirènes, beaucoup de marins se sont échoués… Respirez l’inspiration offerte par nos régions. Bootstrappez au-delà des 12 000 km2 de l'Île-de-France, le champ des possibles est vaste en France. Et prenez le temps de vivre votre aventure entrepreneuriale, sans perfusion financière.