L'éco-responsabilité, une opportunité mobilisatrice pour l'industrie française

Le vaste plan d'investissement annoncé par Emmanuel Macron à l'automne 2021, d'un montant de 30 milliards d'euros sur 5 ans, est une tentative louable de raviver la culture industrielle française.

L’enjeu est à la fois de reconquérir la part de l’industrie dans le produit de la France, réinnover dans et par l'industrie et surtout augmenter drastiquement le financement des start-up industrielles, chroniquement sous-financées dans notre pays. L’accélération de la collaboration entre start-up et grands groupes industriels est une étape nécessaire. Les initiatives encourageantes qui visent à rapprocher et connecter start-up et entreprises industrielles, devraient être multipliées. Mais s’il y a une opportunité majeure qui devrait mobiliser tout le tissu industriel français, c’est l’urgence de la lutte contre le réchauffement climatique.  

L’urgence écologique est une menace immédiate, et une occasion de prendre le leadership dans le monde

Il aura échappé à peu de dirigeants informés que non seulement les événements climatiques hors-norme adviennent de plus en plus souvent, mais que leur intensité a des conséquences de plus en plus graves. Sur certains points habités de cette planète, les limites biologiques du corps humain sont mises à l’épreuve et les catastrophes naturelles se multiplient. Or, malgré une certaine prise de conscience, nous nions encore dans nos attitudes la réalité du changement climatique. Malgré des restrictions d’activité, le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie confirme que les émissions de CO2 ont atteint un record en 2022. L’Europe continue dans sa lancée en dépassant son niveau d’émissions de CO2 et a intérêt à accélérer ses efforts si elle veut continuer à se targuer d’être un leader climatique. Or l’industrie est non seulement incontournable pour réaliser cet effort, mais elle doit devenir le moteur de cette lutte si l'on ne veut pas que les pires scénarios du GIEC deviennent réalité.  

Un virage indispensable vers l’éco-conception

L’arrivée prochaine de nouvelles normes ESG pour estimer la performance d’une entreprise sur des critères non financiers est on ne peut plus saine. La réalité est que l’on ne peut plus se passer d’une approche tenant compte de l’impact des activités industrielles dès la conception du projet. Il faut saluer le fait que beaucoup d’acteurs agissent avec grande détermination pour atteindre la neutralité carbone. Mais il faut aussi désormais reconnaître que c’est insuffisant. Notre société a placé une foi presque religieuse dans la technologie pour régler nos problèmes. Le moment est venu d’être inventif. 

Pour être à la hauteur de l’urgence, chaque projet industriel a désormais la responsabilité de réfléchir à son impact, en adoptant une démarche d’éco-conception. C’est-à-dire une approche multi-étape prenant en compte les différentes phases du cycle de vie du produit, et multicritères, prenant ainsi en compte les consommations de matière et d’énergie, les rejets dans les milieux naturels, les effets sur le climat et la biodiversité. Il n’y a pas de raison non plus que les projets industriels dont la raison d’être est elle-même écologique continuent à souffrir d’un manque de financement. Et ce d’autant plus que les aventures industrielles se construisent dans le temps long.

Or la France a une carte unique à jouer pour prendre le leadership dans le monde. Ses start-up à impact et ses start-up industrielles sont mondialement reconnues. L’industrie 4.0 permet des optimisations importantes d’empreinte carbone, si l’on prend garde à son aspect énergivore et à la production de nouveaux déchets comme des batteries, bien que des progrès considérables ont été réalisés sur ce point. Enfin, il est évident que les entreprises industrielles ne peuvent pas tout faire toutes seules. Elles ont tout intérêt à adopter une approche écosystémique en incluant toutes leurs parties prenantes, des fournisseurs aux consommateurs ou utilisateurs, jusqu’aux récupérateurs et recycleurs. 

Depuis les débuts du capitalisme moderne, mobiliser les talents et les connaissances afin d’inventer une nouvelle manière de produire, et ainsi changer le monde, a été la vocation des industriels. Plus que jamais, au 21e siècle, cette vocation a du sens.