Vestiaire Collective, Swile, ManoMano, Kipmi… Les secrets des agences pour trouver un nom de start-up

Vestiaire Collective, Swile, ManoMano, Kipmi… Les secrets des agences pour trouver un nom de start-up Les critères qui guident le choix d'un nom d'une start-up sont très nombreux. S'il semble impossible de tous les satisfaire, l'un d'entre eux est inévitable.

On n'a jamais deux fois l'occasion de faire une bonne première impression. Alors pour une start-up, bien choisir son nom est un impératif. Et pour cela, un dilemme s'impose aux fondateurs : faire confiance à son inspiration et à sa créativité ou solliciter une agence de naming. La deuxième option semble plus raisonnable, mais elle est aussi plus chère : pour bénéficier de l'expertise d'une agence comme Bénéfik, il faut débourser entre 10 000 et 15 000 euros.

"Les start-up sont assez réticentes à l'idée de dépenser une telle somme. Mais la plupart d'entre elles ont des ambitions internationales et ne se rendent pas compte que déposer une marque dans plusieurs pays est très coûteux", indique Cyril Gaillard, fondateur de cette agence qui a trouvé le nom de Klarys, Virtuo ou encore Kipmi. "Pour les start-up, c'est un investissement. Mais on leur garantit qu'elles n'auront aucun problème juridique et on leur évite des procès qui peuvent coûter beaucoup plus chers".

"Les contraintes juridiques sont tellement importantes qu'on préfère prévenir nos clients qu'ils n'auront pas de coup de cœur "

L'aspect juridique est évidement déterminant dans le choix d'un nom. "C'est au moins 50% du travail", confie Baptiste Le Provost, head of branding de Socialclub, l'agence qui se cache derrière les noms de Tomorro, One Man Support et Stello. "Les contraintes juridiques sont tellement importantes qu'on préfère prévenir nos clients qu'ils n'auront pas de coup de cœur pour le nom qu'on a trouvé. On voulait par exemple rajouter un "W" à la fin de "Tomorro" mais ce n'était pas possible". S'il fallait une preuve supplémentaire de l'importance du critère juridique dans le choix d'un nom, Nomen, qui a trouvé les noms de Vestiaire Collective, ManoMano, Selency ou encore HappyVore (mais aussi de Vinci, Vélib et Thalès), a décidé d'intégrer dans ses locaux parisiens un cabinet en propriété intellectuelle.

Ces contraintes juridiques imposent parfois aux start-up des changements de nom. "Les fondateurs viennent nous voir dans l'urgence car leur boite vient de se faire attaquer. Mais précipitation et créativité ne font pas bon ménage", prévient Sophie Gay, fondatrice de Namibie (Swile, Kolet, Indy, Kiute, Fraiche Cancan). "HappyVore s'appelait avant "Les Nouveaux Fermiers". Mais la start-up ne pouvait plus utiliser le terme "fermier" qui renvoyait à la viande alors qu'elle propose justement des alternatives végétales", raconte Nina Derai, présidente de Nomen.

Trois critères et le tour est joué ?

Les contraintes juridiques ne sont pas les seules raisons qui poussent une start-up à changer de nom. "ManoMano voulait se développer à l'étranger mais l'ancien nom, MonEchelle.fr, ne s'exportait pas. Même chose pour Vestiaire Collective qui s'appelait à l'origine Vestiaire de Copines", poursuit Nina Derai. Outre les ambitions internationales, le pivotement d'un produit peut aussi inciter à un renaming : "Lunchr est devenu Swile quand la start-up a décidé d'étendre son offre et de ne plus se limiter aux titres-restaurant", illustre Sophie Gay.

On l'aura compris, un bon nom est un nom disponible, qui peut s'exporter à l'étranger et qui ne cantonne pas une start-up à une seule activité. Trois critères et le tour est joué ? Loin de là. D'autres paramètres doivent être considérés. "Les start-up passent beaucoup de temps à pitcher leur projet donc le storytelling est important. Le nom doit servir ce storytelling", explique Baptiste Le Provost. "Par exemple, avec le nom Tomorro, le but était de raconter que les juristes allaient vers l'avant et représentaient l'avenir (Tomorro propose une solution pour aider les juristes dans la gestion de contrats, ndlr)".

De son côté, Nina Derai milite pour un nom qui "fait référence aux bénéfices que l'entreprise apporte" tandis que Cyril Gaillard met l'accent sur la nécessité de trouver "un nom bien référencé sur les réseaux sociaux" car "les start-up communiquent beaucoup via ce canal". Sophie Gay, elle, recommande "un nom court d'environ deux syllabes qui percute et qui est user oriented".

Enfin, est-ce que les noms anglophones doivent être privilégiés ? "Les Français aiment bien les noms anglophones mais les Américains apprécient les noms français donc il n'y a pas trop de règle. Un bon nom n'a pas de territoire". De plus, "il faut d'abord trouver un nom qui sera compris par le Français moyen avant de penser à se faire comprendre par des Américains", rappelle avec pragmatisme Cyril Gaillard.

La validation des investisseurs

Cela fait beaucoup de paramètres à prendre en compte. Mais comme le précise Baptiste Le Provost, "aucun nom ne peut respecter tous ces critères, il faut savoir lequel privilégier". Il faut savoir aussi quelles erreurs ne pas commettre. Comme par exemple "ne pas céder aux tendances du moment" pour que le nom continue d'être pertinent à long terme. "C'est parfois tentant de choisir un nom qui fait penser à un mot réel mais cela nécessite un gros budget SEO", avertit de son côté Nina Derai. S'adapter au contexte parait également primordial : "Avant, si l'extension ".com" n'étais pas disponible, on pouvait modifier un nom et le sacrifier. C'est par exemple ce qu'on a fait en transformant "Kioote" en "Kiute". Maintenant, les gens ne tapent plus l'url directement donc ce n'est pas très grave si le ".com" n'est pas disponible", ajoute Sophie Gay.

Une fois le nom trouvé, "il est fréquent de le faire valider auprès des investisseurs présents au capital de la start-up", indique Cyril Gaillard. Bien entendue, l'approbation des fondateurs demeure également essentielle. Une dernière étape qui ne ressemble en rien à une formalité : "C'est parfois très compliqué de discuter avec eux car c'est comme si on choisissait le nom de leur bébé", conclut Baptiste Le Provost.