Claude Rameau, business angel
lui-même, est ancien doyen de l'Insead et co-président
de l'association France Angels.
JDNet
: Quelle était la situation de l'investisseur
individuel avant la création annoncée
de la Société de capital-risque unipersonnelle
?
Claude Rameau Il
existe aujourd'hui la forme juridique de la Société
de capital-risque (SCR), qui bénéficie
d'un avantage fiscal important.
Cependant, le bénéfice de ce dispositif
est conditionné par la réunion de quatre
investisseurs minimum dans chaque SCR, car aucun des
associés ne peut détenir plus de 30% du
capital. En outre, les associés ne peuvent même
pas être membres d'une même famille, car
la limite intègre les ascendants et descendants.
Or ces contraintes ne sont pas adaptées à
l'investissement d'amorçage, qui comporte un
risque très élevé pour les investisseurs.
Il est pratiquement impossible de mettre d'accord quatre
investisseurs différents sur une durée
de plusieurs années alors que ces investissements
concernent des entreprises dont la situation et les
orientations changent souvent et très vite. Dans
la pratique, très peu de SCR ont été
constituées, malgré l'avantage fiscal
prévu.
Qu'apporte
aujourd'hui la création de la SCRU ?
La
Société de capital-risque unipersonnelle
va permettre de gérer des investissements individuellement
ou dans un cercle familial tout en bénéficiant
de dispositions fiscales très avantageuses. Toutefois,
il ne s'agit là que du premier volet d'un dispositif
d'ensemble qui intègre également le projet
de loi sur la création d'entreprise que Renaud
Dutreil [NDLR : le secrétaire d'Etat aux PME]
présentera mercredi prochain au conseil des
ministres. Ce projet prévoit de porter à
25%, pour un investissement maximum de 40.000 euros,
la somme que le business angel peut déduire de
son impôt sur le revenu lorsqu'il finance une
entreprise en amorçage. Ainsi en investissant
40.000 euros, le business angel pourra déduire
10.000 euros de ses impôts. Son investissement
lui aura donc coûté seulement 30.000 euros.
Il ne s'agit pas d'un cadeau car ne perdons pas de vue
qu'il s'agit toujours d'investissements à risque
maximum. Ce sont plutôt des mesures qui encouragent
à franchir le pas. En parallèle, le projet
Dutreil prévoit de doubler la somme, que le business
angel peut déduire de son revenu imposable en
cas de perte en capital, laquelle devrait passer à
60.000 euros.
Ces
mesures permettront-elles de relancer l'investissement
en amorçage en France ?
Attention, les investissements en amorçage n'ont
pas disparu aujourd'hui! Ce sont d'abord les sociétés
de capital-risque, qui faisaient quelquefois un peu
d'amorçage, qui
ont coupé totalement ces investissements. Les
investisseurs individuels, eux, continuent à
regarder les dossiers et à investir. C'est d'ailleurs
aujourd'hui la seule source de financement en amorçage.
Toutefois, ces mesures sont importantes et devraient
permettre à de nouveaux investisseurs qui hésitent
à franchir le pas de se lancer dans ces financements
à haut risque. France Angels a d'ailleurs beaucoup
milité auprès des ministères concernés,
aux côtés de Croissance Plus, pour proposer
ces aménagements. Nous sommes donc très
satisfaits de ces mesures qui constituent un terrain
favorable pour le développement de l'amorçage.
Actuellement, nous estimons que la France ne compte
que 3.000 à 4.000 business angels. Dans le même
temps on en recense 40 à 50.000 en Grande-Bretagne
et entre 400 et 500.000 aux Etats-Unis. Le retard à
rattraper est important mais nous pensons que la France
pourrait compter 20 à 25.000 business angels
dans quatre ou cinq ans.
|