Patrick Byrne (Overstock) : "Le marché européen est prêt pour du discount extrême"

Début septembre, le géant américain du discount en ligne a ouvert ses rayons à 34 pays, Union européenne comprise. Son PDG compte sur la faiblesse du dollar pour l'aider à se lancer.

 

Pourquoi attaquer maintenant le marché européen ?

Patrick Byrne. Les consommateurs européens sont très mal desservis par la vente au détail sur Internet et ne disposent d'aucune offre de discount en ligne véritablement agressif. Ce qui veut dire aussi que nous n'avons pas vraiment de concurrent. Cependant, nous pensons que ce marché est prêt pour du discount extrême. De plus, la faiblesse marquée du dollar par rapport à l'euro va beaucoup nous servir pour nous lancer. En effet, elle rend nos produits encore plus attractifs en termes de prix aux clients non américains. Or je pense que le dollar va continuer à baisser. Ceci dit, nous avions décidé d'étendre nos services à l'Europe avant que le dollar n'entre dans une période difficile.

Depuis que vous avez commencé à travailler sur l'ouverturede vos services à l'international, qu'est-ce qui vous a demandé le plusde travail ?

Le plus compliqué a sans douté été de construire la supply chainnous permettant d'approvisionner l'Europe. Nous avons finalement trouvéun partenaire qui assure le transport des marchandises : E4X. Nousenvoyons les produits commandés dans son entrepôt du New Jersey, il lestransporte par avion jusqu'en France, où ils sont ensuite dispatchés.

De quelle façon avez-vous dû faire évoluer votre site ?

D'abord, il a fallu ajouter une technologie permettant degéolocaliser le visiteur à partir de son adresse IP. Le site convertitensuite les prix dans la monnaie locale, les ajuste automatiquement enfonction des fluctuations quotidiennes des taux de change, et permet auclient de payer dans sa monnaie. Cela a demandé un gros travail sur lesinfrastructures informatiques. 

Enfin, nous avons beaucoup travaillé sur l'expérience consommateur. Prenons l'exemple d'un client qui achète une paire de chaussures. Nous devons envoyer les dimensions et le poids du colis correspondant à E4X, qui doit alors nous renvoyer le prix du port, pour que nous puissions immédiatement l'afficher sur la page que visualise l'acheteur. Ceci doit donc être traité en temps réel, car il ne faut surtout pas que ce dernier attende. Cela s'est traduit par d'autres lourds travaux informatiques.

"Dans un deuxième temps, nous désirons trouver des fournisseurs européens"

Quelles actions prévoyez-vous pour soutenir votre lancement ?

Sur le marché américain, absolument tout le monde utilise les moteurs de recherche et les comparateurs de prix. En la matière, l'Europe a 3 à 5 ans de retard, comme c'est d'ailleurs le cas pour ce qui concerne le placement de bannières publicitaires. Nous prévoyons donc de développer notre marketing de façon à améliorer notre visibilité sur les moteurs de recherche et les comparateurs : nous pensons que c'est là que se trouvent les meilleures opportunités de marketing.

A quel rythme comptez-vous vous développer en Europe ?

La première phase était notre lancement, début septembre. Dans un deuxième temps, nous désirons trouver des fournisseurs européens pour approvisionner les acheteurs européens. Dans un troisième temps, nous construirons un entrepôt sur le sol européen, probablement en France ou en Espagne. Ce n'est que dans un quatrième temps que nous traduirons les sites dans les langues des pays où nous livrons. Notre catalogue comprend des millions de références, il n'est donc pas imaginable de réaliser ces traductions humainement. Or aucune machine ne sait aujourd'hui le faire de façon satisfaisante. Nous attendrons donc que la technologie le permette. A terme, nous souhaitons monter une société en Europe, en parallèle de la nôtre.

Qu'est-ce qui, selon vous, distingue les habitudes de consommation des Européens des Américains ?

D'abord, leurs goûts les portent vers des produits plus haut de gamme : les montres, les bijoux, la maroquinerie, les chaussures... autant d'articles qui aux Etats-Unis sont considérés comme des articles de luxe. Les Européens sont très friands de marques et achètent relativement peu de produits high-tech. Tandis qu'aux Etats-Unis, nous vendons surtout des produits technologiques et des meubles. De plus, alors qu'un Américain commande en moyenne 1,5 article, un Européen en achète plus de 2.

Quelles sont vos ambitions sur le marché européen ?

Nous visons 25 millions de dollars de chiffre d'affaires fin 2009, 50 millions fin 2010 et 100 millions fin 2011. A ce moment là, nous sortirons la gestion du marché européen de notre incubateur pour lui faire intégrer notre structure principale.