Le contrat de vente de site Internet

La vente d’un site internet nécessite la rédaction d'un contrat, lequel dépend de la nature du site cédé : il peut s'agir soit de la cession d'actif, soit de la cession d'un fonds de commerce.

Tribune écrite par Arnaud Dimeglio et Martin-Daniel Gleize

La cession d'actif

 

Un site internet (nom de domaine, pages web, base de donnée etc...) est un actif immatériel, qu'il est possible d'évaluer comptablement.

 

Il comporte une valeur économique en ce qu'il permet de concourir à la réalisation d'une activité marchande. Les sites vitrines, ou informatifs destinés à la communication d'entreprises permettent par exemple, au client de s'informer sur les tarifs et les prestations offertes par un commerçant, ou tout simplement de suivre sa commande.

 

La cession de tels sites internet est soumise aux dispositions particulières régissant le contrat de vente (article 1582 et s. du Code civil). Le site étant généralement protégé par droit d'auteur, il convient surtout de respecter les dispositions des articles L. 131-1 et s. du Code de la propriété Intellectuelle. Certaines mentions sont en effet prescrites à peine de nullité de l'acte. Il est donc essentiel avant de céder les droits sur un site de s'assurer de la titularité des droits d'auteur, et de leur transfert.

 

Selon que l'acte est destiné à protéger le vendeur ou l'acheteur, l'acte peut contenir diverses clauses : clauses de non concurrence, de garantie etc... Le contrat peut enfin aborder les questions pratiques relatives au transfert du nom de domaine, des adresses emails, de l'hébergement etc...

 

Il convient enfin d'ajouter que des formalités fiscales s'appliquent à ce type de cession.

 

 

La cession de fonds de commerce

 

La cession d'un site internet marchand, c'est-à-dire auquel est attachée une clientèle, peut s'analyser en la cession d'un fonds de commerce si elle satisfait trois conditions :

 

-         Le site doit posséder une clientèle, condition sine qua non de son existence en tant que fonds (Cour de Cassation, chambre commerciale, 16 janvier 1990, JCP 1991, II, 21662).

-         Cette clientèle doit être spécifique et distincte du reste de l'entreprise (Cour de  Cassation, chambre commerciale, 23 mai 1960, Bull. civ. III, n°192), ce que la jurisprudence reconnait à un site internet (Cour d'Appel de Paris, 4ème chambre, section B, Yves Casse vs Ebay Inc, 9/11/2007).

-         Le site doit être indépendant. La jurisprudence reconnait le site internet comme « entité indépendante » se positionnant sur « un marché distinct » (Cour d'Appel de Paris, 14ème Chambre, section B, Fnac et Fnac Direct vs Rue du Commerce, 23/06/2006), rejoignant en la matière une jurisprudence constante de la chambre sociale de la Cour de cassation qui définit comme fonds de commerce « une entité économique autonome dont l'activité est poursuivie » (20/03/2002, Bulletin 2002, V, n° 94 p. 102).

 

Certaines entreprises sont des « pure players », c'est-à-dire des entreprises existant uniquement sur Internet (Amazon, Google, Ebay...). Pour ces dernières, vendre leurs sites Internet revient à vendre leur fonds de commerce.

Dans ce dernier cas, outre le respect des formalités visées pour la simple cession d'actif, l'acte de vente doit, à peine de nullité, contenir de nombreuses informations destinées à protéger l'acheteur : l'origine du fonds, son prix d'acquisition, l'état des privilèges et nantissements grevant le fonds, le chiffre d'affaires qu'il a réalisé durant les trois derniers exercices comptables, les bénéfices commerciaux etc.... (Articles L 141-1 et suivants du code de commerce).

Le cas échéant, il convient en outre de régler la situation des salariés, sachant que ces derniers suivent en principe le sort du fonds, et sont donc transférés à l'acheteur (article L.122-12 du Code de travail). Les parties devront enfin s'acquitter des diverses taxes et remplir les formalités prévues par le Code Général des Impôts.

Qu'elle ait pour objet la cession d'actif ou de fonds de commerce, la vente d'un site Internet est donc un acte à haut risque juridique qui nécessite la rédaction d'un contrat. Outre le fait que ce dernier permettra d'écarter la nullité de la vente, il présente l'intérêt d'éviter, sinon de diminuer, tout litige entre les parties.

Arnaud DIMEGLIO