Facture numérique : déni d'information ou opportunité de communication ?

Les grands facturiers incitent fortement leurs clients à passer à la facture numérique. Pour autant, ce service n'apporte aucun bénéfice particulier au consommateur, pire encore, il l'éloigne de son droit à l'information.

Chaque individu bénéficie d'un droit inaliénable d'accéder aux explications, aux preuves, ainsi qu'à toutes les traces de sa consommation ou plus globalement de sa vie "économique".

Depuis plusieurs années maintenant, la plupart des "grands facturiers" (Telco/Banque/Assurance...) incitent fortement leurs clients particuliers à passer à la facture/relevé numérique. Cette incitation croissante est directement liée aux économies très substantielles que réalisent ces émetteurs qui n'ont plus à expédier de courriers papiers.

Le particulier de son côté n'y gagne pas grand-chose, a part hériter d'une nouvelle contrainte d'avoir à aller tous les mois sur des espaces internet différents (dont il faut se souvenir de l'identifiant/mot de passe) pour y consulter sa facture (après l'avoir cherché dans les dédales d'un site client), la télécharger sur son ordinateur (dont il faut organiser les répertoires), et finalement l'imprimer (pour chaque procédure administrative)...

Le consommateur ne s'y trompe pas, les difficultés associés à l'accès aux documents numériques l'éloigne de son droit à l'information et constitue ainsi un déni de droit !

Il est donc logique que les ambitions de numérisation des émetteurs se heurtent à une relative hostilité des consommateurs (EDF, après 3 ans d'incitation peine à convaincre plus de 6% de son parc client). Cependant, ne nous faisons pas d'illusions, la facture numérique deviendra le mode majoritaire d'émission des factures à court/moyen terme.

Dès lors, quels choix s'offrent aux émetteurs:

     - Imposer la facture numérique
     - Faire payer la facture papier (comme ce fut le cas chez Neuf Télécom qui proposait gratuitement la facture numérique et faisait payer 5€ par mois à ses clients un "duplicata" papier sous prétexte de préserver l'environnement.
     - Indemniser les clients en leur rétrocédant une partie de l'économie réalisée.

Aucune de ces 3 solutions n'est réellement satisfaisante, la simplicité d'accès à la facture n'est toujours pas résolu pour le consommateur, ses droits ne sont toujours pas reconnus.

Il existe pourtant une 4ème voie: une solution qui permettrait au consommateur de recevoir gratuitement et automatiquement ses factures numériques dans une boite aux lettres ou un coffre-fort numérique personnel, universel et de son choix.

Cette 4ème voie se rapproche de l'autonomie laissée au consommateur dans la gestion de ses comptes bancaires : « bien que salarié d'une société, c'est moi qui décide de la banque où je souhaite que mon salaire soit viré » et « Je peux changer de banque librement en récupérant mon argent et en faisant suivre le virement de mon salaire dans une autre banque ».

Cette solution suppose que l'ensemble des acteurs, de l'émetteur aux diffuseurs, sachent identifier et reconnaître le choix du consommateur. Cette solution suppose donc un système de distribution numérique "universel" ou "interopérable".
 
NB : A titre d'exemple : aujourd'hui c'est EDF qui choisi que je dois aller chercher sa facture sur le site www.edf.fr et c'est mon employeur qui décide du coffre-fort numérique dans lequel il stocke le bulletin de salaire pour mon compte.

Les acteurs du coffre-fort électronique (dont Adminium fait partie), du routage des courriers papiers et plus largement tous les acteurs liés à cet écosystème sont en train de travailler sur cette 4ème voie[1]. Ce projet porte un nom: l'interopérabilité.

Cette interopérabilité suppose la mise en place d'un système normalisé entre tous ces acteurs (à l'instar du GIE interbancaire). Cela assurera donc au client final une fluidité des documents numériques entre tous les émetteurs et toutes les solutions boite à lettre / Coffre-fort numérique.
 
Pour autant, si l'ensemble des professionnels du secteur commence à travailler sur cette problématique rien ne pourra se faire sans la volonté des émetteurs de documents eux-mêmes (grands facturiers). En effet, Ces derniers doivent accepter de ne plus garder les factures en otages et ne plus exiger de leurs clients qu'ils viennent sur leurs sites récupérer leurs factures. Ils doivent donc accepter de perdre une partie substantielle des visites "contraintes" sur leur site client.

L'objectif de cette tribune est de sensibiliser les grands facturiers (EDF, France Telecom, les Banques,...) afin qu'ils entendent (enfin) la légitime aspiration de leurs clients à recouvrer leur droit inaliénable d'accès à leurs informations de consommation.

Nous sommes conscients que cela nécessite de leur part une évolution majeure dans la manière d'appréhender la relation client vers plus d'autonomie et de liberté, mais en contrepartie ils y gagneraient:

     - Une hausse du nombre de client acceptant la dématérialisation ainsi que la réalisation effective des économies attendues sans dénigrement du droit de consommation.
     - Un accès à des espaces de communication privilégiées avec leurs propres clients au sein des boites aux lettres/coffres-forts.

A ce titre, le potentiel de ce nouveau type de relation vendeur/client commence à être exploré et analysé dans la nouvelle discipline marketing relationnelle du VRM (Vendor Relationship Management - cf. http://www.leblogduvrm.fr/).



[1] A-CFN, APEM, FNTC, DGME, CNIL...