La transformation digitale est-elle un mouvement perpétuel ?

Guillaume Théaudière nous livre sa vision de la transformation digitale, et les clefs pour la décoder car entreprises et acteurs doivent avant tout s’adapter à un nouveau langage. Panorama d’une nouvelle manière de vivre, travailler et consommer, dans un environnement toujours plus digital et changeant.

Sans relâche, la transformation digitale se poursuit. Elle attaque, comme un phénomène climatique, toutes les régions du monde et zones de nos vies. Nos maisons, notre travail, nos déplacements, nos loisirs, nos amours s’en trouvent modifiés, transformés, augmentés, virtualisés.

Tout se transforme, mais rien ne se redéfinit clairement

C’est une époque fascinante qu’est la nôtre : le contemplatif pourra se réjouir du spectacle chatoyant et du mouvement permanent que nous proposent les innovations digitales. Tous les jours, une nouvelle plateforme digitale, un nouveau concept, un nouveau meme qui fera fureur le temps d’une saison sur les réseaux sociaux. Cette nouveauté entrera peut-être dans le dictionnaire, ou plus sûrement dans le cimetière des éléphants.

C’est une époque éprouvante qu’est la nôtre pour qui aime s’appuyer sur quelques certitudes. La transformation digitale les remet en question, les unes après les autres, questionne les convictions (le chauffeur de taxi, brute acariâtre ou héros résistant ?), les habitudes (« Ah tu m’as envoyé un mail, mais je ne lis plus mes mails, fais-moi un Snap. »), défie les conventions (« C ok de travailler par SMS, tkt »), en crée de nouvelles, comme des injonctions (« FAV si t’es d‘accord, RT pour commenter »).

Certains s’adaptent avec entrain et délectation. D’autres avec réticence et se sentent victimes de ce vortex qu’ils n’imaginaient pas en achetant ce OLA orange dans la boutique France Telecom, il y a vingt ans.

Ces dernières évolutions ont marqué l’actualité récente, parfois plus par des effets d’annonce que par des avancées tangibles. Quiconque tente d’obtenir une action réelle et efficace de SIRI sur ton iPhone comprend bien le gouffre qui nous sépare encore de la conversation badine entre Tony Stark et Jarvis.

Il en va de même de la réalité virtuelle. Du Cardboard à 30€ jusqu’aux masques de plongée interfaces sophistiquées proposées par HTC ou Facebook, il reste encore au Software à se hisser au niveau de précision du Hardware. Enfin, la chasse aux Pokémons a vite perdu de sa saveur et, l’été étant passé, la réalité augmentée de Pokemon GO également.

les intelligences artificielles sont les promesses d’aujourd’hui pour demain.

Fantasmées ou réelles, ces innovations placent toutes le mobile au cœur des usages numériques. Il devient tableau de bord, le poste de pilotage, en plus d’être l’écran au travers duquel se concentre l’essentiel de nos interactions sociales sur les réseaux du même nom. Et surtout sur les messageries instantanées qui connaissent la plus forte croissance parmi les plateformes et tentent toutes de s’inspirer de la dernière licorne en date : Snapchat et ses 24 milliards de valorisation à son introduction en bourse le 3 mars 2017.

Ceux qui pensent le changement ne sont plus ceux qui le font.

Le mobile, donc. C’est avec lui que s’inventent les nouvelles façons de communiquer, et plus largement, de vivre. Les plus âgés s’en souviennent, on pressentait que le mobile serait le reflet de nos identités. « Il y a toute ma vie là-dedans ». C’est si vrai et cela a rendu l’économie digitale si individuelle que le moment est imminent où le mobile deviendra aussi un substitut à notre porte-monnaie, à notre compte bancaire.

L’ubérisation amplifie « la mobilisation », la « smartphonisation » de nos vies et de nos data. Dans un monde ubérisé, vous êtes ce que vos data disent de vous (« Votre VTC sera là dans 3 minutes », « Voulez-vous reprendre cet épisode de Black Mirror là où vous l’avez laissé hier soir à 22h32 ? »).

Au sein du foyer, les écrans convergent vers un usage de divertissement numérique qui navigue d’un écran à l’autre, de toutes tailles, mais toujours connectés. La connexion est essentielle puisque la convergence repose sur le streaming de contenus vidéo dans un environnement dénué de publicité, grâce aux abonnements payants et/ou aux ad-block.

Dans tous les cas, c’est l’expérience du contenu qui doit primer. YouTube l’a bien compris, et va progressivement supprimer son format de 30 secondes non skippable. Ce format, hérité d’un âge télévisuel, a de moins en moins de sens pour les plus assidus des utilisateurs du réseau vidéo : les jeunes. Ces mêmes jeunes qui peinent à citer les chaîne diffusant leurs contenus préférés. Et sont, d’après IPSOS, 79% à être “inscrits” sur YouTube, c’est-à-dire, notamment, qu’ils peuvent laisser des commentaires sous les vidéos, souvent l’occasion de découvrir un monde à part, riche d’audaces linguistiques et d’avis définitifs.

Car un public règne sur ces usages : les jeunes, les millenials et plus encore, les Z. Ils façonnent les usages de demain, ils s’en emparent, ils les popularisent, ils les rejettent. Les Z : ce sont eux, les Chief Transformation Officers de nos vies.