Licence 3G : Matignon favorable à un quatrième opérateur

Une note du cabinet de François Fillon adressée à l'Elysée prône le lancement dès décembre d'un appel à candidatures pour l'attribution de la quatrième licence UMTS. L'arrivée d'un nouvel entrant serait favorisée.

Nouveau rebondissement dans le long feuilleton de l'attribution de la quatrième licence UMTS de téléphonie mobile en France. Alors que l'idée d'imposer un nouvel opérateur paraissait enterrée, le Premier ministre n'exclut pas de la relancer.

Dans une note adressée à l'Elysée le 31 octobre, révélée par "La Tribune" du 8 novembre, le directeur adjoint du cabinet du Premier ministre évalue les options envisageables et conclut que le scénario consistant à attribuer un lot de fréquences de 10 MHz à un nouvel entrant et un lot de 5 MHz dans le cadre d'une procédure ouverte à tous est "un compromis qui pourrait être privilégié, en raison des garanties qu'il apporte sur l'issue de la procédure". "A défaut", le gouvernement pourrait opter pour une distribution en trois lots de 5 MHz ouverte à tous. Mais dans ce cas, "la réservation d'un des trois lots à un nouvel entrant devrait être favorisée".

Organisation d'un débat au Parlement en novembre ?

Par ailleurs, Matigon veut accélérer la procédure. Dans la note transmise à l'Elysée, le directeur adjoint du cabinet de François Fillon estime que, pour que les fréquences puissent être attribuées au premier semestre 2009, il faut "opérer sans plus tarder un choix entre les deux scénarios" et organiser "en novembre, conformément à la loi, un débat au Parlement". La note propose notamment de lancer un nouvel appel d'offres pour les fréquences dès le mois de décembre. 

Dans tous les cas de figure, le gouvernement semble donc souhaiter l'arrivée d'un quatrième opérateur, même s'il a tenté de calmer le jeu suite à la publication de l'article de "La Tribune". "La note ne tranche pas vraiment ; nous ne sommes ni pour ni contre un quatrième opérateur", indiquait samedi 8 novembre les services du Premier ministre au quotidien "Les Echos". Et de préciser à l'AFP que "sur le calendrier, rien n'est tranché."

Ce nouveau rebondissement n'est que le énième d'une longue série pour l'attribution de la quatrième licence UMTS de téléphonie mobile, qui commence à ressembler à l'Arlésienne en France. La procédure d'attribution des quatre licences UMTS avait été initiée en 2000, avec une mise à prix à 4,95 milliards d'euros chacune. D'abord très convoitées, l'éclatement de la bulle avait fait chuter le nombre de candidats à trois et le prix de la redevance à 619 millions d'euros, auxquels s'ajoute 1 % du chiffre d'affaires généré par la 3G. France Télécom et SFR s'étaient vus attribuer leur licence en 2001, suivis par Bouygues Telecom en 2002.

Restait toujours une licence à pourvoir. En mars 2007, l'Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) a relancé un appel à candidatures. Seul le groupe Iliad, maison mère du fournisseur d'accès Internet Free, y a répondu, mais à condition de pouvoir échelonner le paiement de la redevance. Sa candidature a de fait été rejetée par l'Arcep (lire l'article L'Arcep refuse la candidature de Free à la licence 3G mobile du 11/10/2007).

Il y a dix mois, le secrétaire d'Etat à la Consommation, Luc Chatel, avait fait modifier la loi dans l'optique d'un abaissement du prix de la quatrième licence (619 millions d'euros). Début 2008, le Conseil d'Etat rendait un avis favorable sur l'étalement des paiements du prix de la fréquence, comme le souhaite Free. Mais cette option est écartée depuis le printemps.

 

Elysée vs Matignon : l'épineux dossier de la quatrième licence 3G

En avril dernier, l'Elysée a fait connaître son intention de vendre les fréquences encore disponibles en plusieurs lots (lire l'article Abandon de la 4ème licence 3G : l'Elysée teste l'opinion du 07/04/2008) et a demandé à l'Arcep d'étudier la question. Suite a une consultation publique, le régulateur des télécoms a rendu sa copie le 22 septembre, concluant à la nécessite d'ouvrir la porte à un nouvel entrant pour relancer la concurrence dans le secteur (lire l'article 4ème licence 3G : L'Arcep plaide pour un nouvel entrant du 23/09/2008).

Pourtant, un mois plus tard, lors de la présentation du plan "France numérique 2012", Eric Besson, le secrétaire d'Etat au Développement de l'économie numérique, déclarait qu'il n'était question "ni d'imposer ni d'exclure un nouvel opérateur de téléphonie mobile" dans le cadre du nouvel appel d'offre qui sera lancé au cours du premier trimestre 2009 (lire le dossier Les points phares du plan France numérique 2012 du 21/10/2008). Ce nouvel appel d'offres prendrait en compte trois critères pour l'attribution des fréquences UMTS restantes : l'aménagement du territoire, le prix, et le développement de la concurrence, notamment par les biais des opérateurs mobiles virtuels. L'idée était donc que le jeu soit ouvert à tous, sans que ne soit favorisé un nouvel entrant.

Entre un plan Besson porté par l'Elysée et une note de Matignon, le dossier de la quatrième licence de téléphonie mobile 3G ne semble pas faire l'unanimité au sein du gouvernement. La note du directeur adjoint du cabinet de François Fillon rappelle que l'attribution de ces fréquences est "la dernière occasion de faire apparaître un opérateur de réseau supplémentaire en France, le seul grand pays européen à ne disposer que de trois opérateurs de téléphonie mobile." Certes, mais l'Elysée hésite à froisser les patrons de ces trois grands groupes, notamment Bouygues dont la filiale de téléphonie mobile, troisième en part de marché, pâtirait sans doute le plus de l'arrivée d'un quatrième opérateur de réseau.