Marie-Pierre Mottin (Louvre Hôtels) "Le mobile va devenir un vrai canal de distribution de l'hôtellerie"

Le groupe hôtelier propriétaire des enseignes Première Classe, Campanile et Kyriad mise sur le digital. Sa directrice marketing expose les projets du deuxième acteur du secteur en Europe.

 

JDN. Que représente aujourd'hui l'activité de Louvre Hôtels ? 

Marie-Pierre Mottin. Nous sommes le second groupe hôtelier en Europe derrière le groupe Accor sur le marché de l'hôtellerie économique. Louvre Hôtel est plus connu par ses enseignes Première Classe, Campanile, Kyriad et Kyriad Prestige. Nous possédons plus de 800 établissements, soit 52 000 chambres, dans 9 pays. En France, nous sommes numéro du segment du 2 étoiles avec les enseignes Campanile et Kyriad. 

Quelle place occupe Internet au sein de la stratégie du groupe ? 

Une place incontournable Nous allons consacrer en 2009 75 % de nos investissements en communication et marketing au digital. A titre de comparaison, nous y consacrions 45 % en 2008. Nous avons décidé de miser massivement sur Internet car ce média a une très forte affinité avec notre cœur de cible. Il s'agit de professionnels, essentiellement des cadres CSP+, qui remplissent nos hôtels en semaine. Internet est leur outil de travail. 

Quels leviers marketing utilisez-vous pour promouvoir vos enseignes ? 

Le display et le search sont évidemment les deux principaux outils que nous utilisons. A eux deux, ils représentent les trois quarts de nos investissements sur Internet. Nous utilisons aussi l'ensemble des leviers du Web comme l'e-mailing ou l'affiliation par exemple. Cependant, nous ne communiquons pas de la même manière pour chacune de nos enseignes.  

"La communication de Campanile s'opère exclusivement sur le Web"

Pourquoi ? 

Tout simplement parce que les problématiques de notoriétés sont différentes pour Première classe, Campanile et Kyriad. Campanile, par exemple, bénéficie grâce à 30 années d'existence d'une notoriété très élevée. Nous nous autorisons donc à communiquer exclusivement sur le Web pour cette enseigne, dans une démarche d'accompagnement. Pour Kyriad en revanche, nous sommes davantage obligés de travailler la notoriété de la marque en télévision. 

Vous avez justement lancé une campagne en ligne sur le repositionnement de la marque Campanile...

Oui. Après 30 ans, cette marque fait en quelque sorte partie du patrimoine des Français. L'inconvénient de cette longévité est qu'elle donnait l'impression de s'être un peu endormie, d'être devenue une marque vieillotte. Nous avons donc engagé une démarche de rénovation de nos 400 hôtels pour y apporter de la modernité, comme la présence de points d'accès Wifi gratuits et illimités. Nous avons dédié un site Internet à cette opération pour en rendre compte, Campanile-en-mouvement.com

Le Web n'est-il qu'un canal de communication ? Quid de la réservation d'hôtels en ligne ? 

Nous avons beaucoup investi au cours de l'année écoulée dans des études pour affiner la connaissance de nos cibles. Ces études démontrent que le Web est effectivement perçu comme un canal de réservation, mais qu'il est encore le moins utilisé. Le téléphone reste en fait le premier moyen de réservation dans nos hôtels. 

"Les réservations sur Internet ont progressé de 40% en 2008"

Comment analysez-vous ce constat ? 

Principalement par la crainte d'une certaine partie des internautes que leur réservation ne soit pas prise en compte. Paradoxalement, nos clients utilisent beaucoup Internet, mais surtout pour s'informer sur nos hôtels ou nos tarifs, mais préfèrent décrocher leur téléphone pour réserver. La clientèle business qui assure le remplissage de nos chambres en semaine, utilise beaucoup le téléphone. Cela étant dit, le Web a encore une marge de progression considérable. Rien qu'en 2008, les réservations sur ce canal ont progressé de 40 %. 

Envisagez-vous d'incitez davantage vos clients à réserver en ligne ? 

Oui, nous travaillons sur plusieurs projets. L'un d'eux concerne la possibilité de choisir sa chambre dans un de nos hôtels, comme certaines compagnies aériennes le font pour les places dans les avions. Nous nous sommes rendus compte que notre clientèle business a ses habitudes dans nos hôtels. Ces clients connaissent nos établissements, ont leur chambre préférée et préfèrent souvent appeler pour être sûr de la réserver. En leur proposant de choisir directement leur chambre en ligne, nous leur facilitons la tâche. C'est par ce type de services, que la part du Web dans nos réservations augmentera. 

Vous avez également lancé une application de réservation pour l'iPhone...

Oui. Il s'agit d'une application gratuite, que nous avons baptisée "Hotel for You" et qui fonctionne pour nos trois enseignes. Elle permet de trouver l'hôtel le plus proche de l'endroit où l'on se trouve ou à partir d'une ville donnée, de prendre connaissance des tarifs et des disponibilités de l'hôtel et de recevoir directement la confirmation de réservation d'une chambre. Elle fournit même un service d'itinéraire pour se rendre à l'hôtel sélectionné. 

"Nous voulons garder de l'avance sur le mobile"

Quels sont les premiers résultats de ce service ? 

Il est encore un peu tôt pour le dire. Cependant, sur les quinze premiers jours de disponibilité de l'application sur l'App Store d'Apple, elle a été téléchargée 360 fois, ce qui est plus que satisfaisant pour une application aussi pointue. Une dizaine de réservations ont été effectuées par son intermédiaire au cours de la première semaine. 

Allez-vous encore développer ce concept de réservation sur mobile ? 

Oui. Nous avons commencé par l'iPhone car il s'agit du smartphone dont l'ergonomie est la plus aboutie, mais nous sommes en train de développer cette application pour Blackberry et les autres terminaux, comme ceux fonctionnant sous Android, le système d'exploitation de Google. Nous travaillons par ailleurs à la deuxième version de cette application, qui sera certainement lancée avant la fin de l'année. 

Pourquoi travailler déjà à une deuxième version, alors que la première n'est pas encore sortie sur tous les terminaux ? 

Tout simplement parce que nous sommes les premiers à proposer ce type de services et que nous voulons garder de l'avance. Nous sommes convaincus que le mobile va devenir un vrai canal de distribution de l'hôtellerie, peut-être plus que le Web. Internet a déjà fait le gros du travail pour simplifier la vie des gens. Nous en sommes, bien sûr, encore au début de l'usage du mobile. Cependant, je pense que le mobile peut supplanter le Web comme canal de réservation si les services qu'il propose répondent à un besoin des consommateurs. Il s'agit pour nous d'un sujet stratégique.