Introduction au marché du véhicule électrique et de la borne de recharge

L'arrivée du véhicule électrique ne change pas uniquement la donne pour les constructeurs automobiles. L'ensemble du marché de l'énergie est également amené à évoluer.

Le marché du véhicule électrique est en plein essor. Bien que sa croissance ait été moins rapide que prévu par les analystes, avec seulement 1% des ventes de véhicules neufs en France en 2015, les prévisions restent optimistes et tablent sur un marché représentant 35% des ventes à l’échelle de la planète en 2040 (cf. figure 1).


























Cette tendance semble réaliste grâce aux soutiens de nombreux gouvernements en faveur de cette innovation. En effet, nous notons depuis quelques années une volonté forte des pouvoirs publics d’accélérer la croissance du secteur. Cela passe notamment par des apports financiers importants (prime à l’achat, crédit d’impôt, etc). Aux Pays-Bas et en Norvège, les dirigeants vont encore plus loin et proposent des lois ayant pour objectif l’interdiction des ventes de véhicules de type essence en 2025.

Malgré tous ces efforts, de nombreuses réticences persistent au sein de la population. Celles-ci sont, en grande partie, liées à des aspects techniques et plus particulièrement à l’autonomie du véhicule qui est aujourd’hui relativement faible (150 km en moyenne). Une autre problématique importante concerne le réseau de bornes de recharge qui n’est pas encore assez développé.

Des nouveaux entrants qui cassent les codes

L’émergence des véhicules électriques a permis de faire apparaître des nouveaux acteurs sur le marché de l’automobile avec des business models novateurs.

L’exemple le plus flagrant est celui de Tesla. Cette société, créée en 2003, par Elon Musk, a été une des entreprises pionnières dans ce secteur. En proposant des véhicules haut de gamme 100% électriques, Tesla a cassé les codes sans pour autant révolutionner le véhicule en lui-même. La vraie rupture concerne sa stratégie commerciale. Contrairement aux acteurs historiques, Tesla a pour objectif de contrôler l’ensemble de la chaîne dans sa verticalité : de la production à la distribution. Ils produisent leurs véhicules et leurs bornes de recharge, ils vendent leurs produits dans leurs concessions et disposent de centres techniques pour leurs clients. Avec le récent  rachat de SolarCity, Tesla souhaite également produire sa propre énergie pour l’injecter dans son réseau de bornes. 

Autre exemple de nouvel entrant sur ce marché : Gogoro. Cette start-up taïwanaise innove elle aussi avec son système de batteries amovibles et son Smartscooter. Son modèle est simple : avec l’achat d’un Smartscooter, le client souscrit également à un abonnement mensuel pour avoir accès au réseau de stations de stockage de batterie mis à disposition dans la ville.
















L’un des points communs entre Tesla et Gogoro est le secteur d’origine de leurs dirigeants. En effet, étant issus du milieu des NTIC et des Télécommunications, ils proposent ainsi un regard nouveau sur le secteur de la Smart Mobility via des solutions high-tech telles que des applications dédiées. Celles-ci couvrent des besoins divers : facturation, état du véhicule, etc. Outre ces start-up, les géants de la Tech s’intéressent également de très près à ce marché : Google, lançant sa voiture autonome et électrique, et  Apple, dont de nombreuses rumeurs font part de son intérêt grandissant pour les véhicules électriques et connectés. 

Les bornes de recharge, un enjeu majeur

L’augmentation des ventes de véhicules électriques implique également l’apparition de nouvelles problématiques gravitant autour de ce sujet. C’est notamment le cas pour les bornes de recharge. Comme indiqué précédemment, un des freins identifiés au développement de ce mode de transport est le manque de bornes disponibles pour les utilisateurs. Ainsi, nous voyons depuis quelque temps en France et ailleurs dans le monde, l’éclosion de points de charge pour subvenir aux besoins en énergie des véhicules électriques. A l’instar des groupes pétroliers qui ont installé des stations essence pour permettre aux automobilistes de parcourir de plus longues distances, ce sera aux entreprises proposant des services de bornes de recharge d’assumer ce rôle à l’avenir.

A date, le système de borne n’est pas standardisé. De nombreuses start-up se lancent sur ce marché en proposant des solutions plus ou moins innovantes et installant des points de charge sur les axes routiers. De grands groupes rejoignent également ce secteur, en particulier EDF avec sa filiale Sodetrel. Cette multitude d’acteurs et de solutions met en exergue une problématique majeure : l’interopérabilité des points de charge, à savoir la capacité du client à pouvoir recharger son véhicule sur tous les réseaux de bornes.

Quel avenir pour les énergéticiens ?

Si les prévisions des experts sont correctes et que le véhicule électrique est amené à prendre une place importante du marché de l’automobile, les énergéticiens auront alors une opportunité à saisir. Sans parler des thématiques liées au « Vehicle to Grid » et la compatibilité avec la production d’énergie, les acteurs de l’Energie ont tout intérêt à devenir plus que des fournisseurs d’énergie.

En effet, le modèle de gratuité des bornes de recharge ne sera, très rapidement, plus viable économiquement pour les entreprises et collectivités offrant ce service. Nous pouvons ainsi imaginer un futur proche de la façon suivante : à l’image du secteur de la banque et des télécommunications, les énergéticiens pourraient chacun déployer leurs réseaux de bornes de recharge et accompagner ce déploiement par des offres d’abonnements ouvrant l’accès à ces réseaux. Un supplément pourrait être demandé lorsque le client est amené à se brancher sur une borne dont il n’a pas souscrit à l’offre. Par la même occasion, l’objectif serait également de fidéliser les clients et d’en gagner de nouveaux. 

Nos convictions

Le marché du véhicule électrique est en profonde mutation. D’une part, l’enjeu économique étant important, de nombreuses entreprises souhaitent conquérir ce marché dans lequel le rôle de chacun n’est pas encore établi. D’autre part, des systèmes de facturation par abonnement émergent, mettant fin à la gratuité des bornes. Enfin, l’interopérabilité des bornes est primordiale au développement de ce secteur. Le véhicule électrique sera un moyen de transport incontournable dans un futur proche, particulièrement en France dont le mix énergétique bas carbone renforce l’argument écologique.  Même si de nombreuses questions subsistent aujourd’hui concernant cet aspect, le processus de transition est lancé avec l’appui des pouvoirs publics. D’autres problématiques restent cependant en suspens, notamment l’adaptabilité de la production électrique et la capacité du réseau à supporter cette charge.


Rédaction : Edouard Richard, Diane Decaudin, Emmanuel Girard, Vianney Brunel, Alexis Berhault