A quelles nouveautés s'attendre en immobilier locatif avec le président Macron ?

Ce n'est pas un grand bouleversement, mais les propriétaires et locataires doivent s’attendent à des évolutions dans le secteur de l'immobilier locatif. Au delà de l’exonération de la taxe d'habitation, Emmanuel Macron a exprimé la volonté de créer un bail de mobilité professionnelle pour les travailleurs précaires, souhaite mettre fin à la location des logements trop consommateurs d'énergie et auditer l'encadrement des loyers.

Emmanuel Macron, nouveau président de la République, s'est présenté comme le candidat des entrepreneurs et de l’innovation. Mais, dans un pays connaissant une crise aiguë du logement, qu’en est-il de ses prochaines mesures concernant le secteur de la location d’habitation ? Dans le contexte actuel de vaste recomposition du champ politique, il est bien entendu trop tôt, avant les élections législatives, pour s’avancer sur ces questions. D’autant qu’elles ne figurent pas parmi les priorités affichées du nouveau président qui concernent la réforme du code du travail et la mise en place de mesures de simplification de la vie des entreprises.

Le programme d’En Marche ! comporte néanmoins un volet entier sur le logement essentiellement axé sur l’exonération de quatre Français sur cinq de la taxe d’habitation, l’augmentation de la construction de logements neufs et des mesures d’incitation directe à la rénovation des logements “passoires énergétiques”. D’autres annonces du programme, moins spectaculaires, ont des impacts sur les baux d’habitation, dont l’encadrement légal est également un levier de poids sur la fluidification du marché du logement. Le candidat Macron a eu par ailleurs l’occasion de livrer son opinion sur certains aspects de la législation applicable aux baux qui, même s’ils ne figurent pas dans son programme, laissent peut-être présager l’instauration de nouvelles mesures à moyen terme.

Création d’un bail "mobilité professionnelle"

Emmanuel Macron a exprimé sa volonté d’expérimenter "un bail mobilité pour ceux qui sont en situation de fragilité sur le marché du travail, c'est-à-dire en CDD ou en intérim" pour "qu'ils puissent accéder à un logement dans les zones tendues".

Ce nouveau bail "mobilité professionnelle" figure dans le programme d’En Marche ! Il est conçu selon l’inspiration du bail étudiant et a pour objet de répondre aux besoin des actifs, de plus en plus mobiles sur le territoires pour des périodes transitoires de leur vie professionnelle. Sa principale spécificité par rapport au bail d’habitation classique sera sa durée, qui pourra être de 3 mois à un an, là où les baux d’habitation non meublée sont de trois ans minimum et les meublés d’un an (exception faite pour les étudiants dont la durée du bail peut être de neuf mois). Aucun dépôt de garantie ne pourra par ailleurs être exigé par le bailleur dans le cadre de telles locations.

Ce nouveau bail devrait être déployé dans les zones tendues, où l’offre locative ne répond pas suffisamment à la demande, notamment du fait du succès croissant des locations saisonnières touristiques. Le levier d’incitation des propriétaires à privilégier de tels baux “mobilité professionnelle” aux baux plus classiques vides ou meublés tient en sa durée : la durée minimale de trois ans avec droit au renouvellement du locataire est souvent vécue comme une contrainte pour certains bailleurs qui souhaitent pouvoir bénéficier de plus de souplesse dans la gestion de leurs investissements locatifs. 

Ce nouveau bail, à courte durée, présente cet avantage, d’autant qu’il ne devrait pas être assorti d’un droit au renouvellement puisqu’il est par définition limité le temps de la mission du locataire dans la zone géographique où il doit se loger. Il est également plus avantageux que le bail étudiant du fait de la probabilité plus forte de solvabilité du locataire, qui bénéficie nécessairement d’un contrat de travail. En revanche, rien ne laisse croire que les bailleurs pourront librement fixer le loyer de ce type de baux en zone tendue : ceux-ci devront probablement se soumettre aux dispositions de la loi Alur relatives à l’encadrement des loyers des baux d’habitation classiques (au même titre que les baux meublés pour les étudiants).

Interdiction de louer des logements “passoires énergétiques” à horizon 2025

S’inscrivant dans les défis écologiques et les engagements de la France en matière de réduction d’émission de gaz à effets de serre, En Marche ! prévoit d’interdire les locations portant sur les logements “passoires énergétiques” qui consomment beaucoup d’énergie en raison, notamment, de leurs problèmes d’isolation.

Ainsi, les locations conclues sur de tels logements ne seront pas valables, probablement au même titre que les locations portant sur des logements ne répondant pas aujourd’hui aux critères de logement décent, qui sont strictement prohibées. Les propriétaires bailleurs concernés sont invités à anticiper cette prohibition future en lançant tous les travaux requis pour rénover leurs logements. Un audit gratuit serait proposé aux propriétaires occupants mais les propriétaires bailleurs, eux, ne semblent pas bénéficier de cette faveur. 
 
Le programme prévoit néanmoins qu’un fonds public pourra intégralement prendre en charge les travaux requis, pour les propriétaires les plus démunis, avec obligation de remboursement à la vente du logement. Pour les propriétaires plus aisés, le dispositif d’incitation fiscale existant sera remplacé par une prime immédiatement perceptible, ce qui pourrait en effet inciter davantage à engager les dépenses importantes de rénovation que le crédit d’impôt dont on ne peut bénéficier que l’année suivant les travaux. 

Outre ces mesures touchant directement les baux d’habitation, un certain nombre d’autres annonces devraient avoir un impact sur le marché de la location : nous parlions de la suppression de la taxe d’habitation pour une grande majorité de foyers, qui devrait permettre d’augmenter (entre autres) le budget consacré au logement. Emmanuel Macron s’est également exprimé pour une stabilité fiscale en matière d’investissement locatif et pour une stabilité des normes (notamment en ce qui concerne les normes de constructions), pour relancer le marché de l’offre locative.

Encadrement des loyers : un audit de la situation est attendue avant une éventuelle remise en cause  

Le programme d’En Marche ! ne prévoit pas de remise en cause du dispositif d’encadrement des loyers, que le candidat Fillon voulait purement et simplement abroger. Pour rappel, un récent arrêt du Conseil d’Etat du 15 mars 2017 s’est prononcé en faveur de l’extension de l’encadrement des loyers (par l'établissement d’un loyer de référence majoré) à l’ensemble des agglomérations visées par la loi Alur (seules Paris et Lille appliquant cette mesure à cette date), alors que le Premier ministre Manuel Valls déclarait ne vouloir appliquer cette mesure qu’"à titre expérimental" à Paris. Emmanuel Macron s’est déjà exprimé sur le sujet, estimant que "l'encadrement des loyers a eu pour effet positif de modérer les prix, d'engendrer plus de transparence, d'afficher plus d'annonces immobilières conformes". Il a cependant déploré l’affaiblissement de l’offre locative, en concluant qu’il faut "regarder avant de débrancher", ce qui signifie que la République En Marche n'exclurait pas, si elle remporte les législatives, de faire un état des lieux pour, le cas échéant, réformer la loi Alur et peut-être même l’abroger.