Supakitch échoue à faire condamner Comptoir des Cotonniers

Le créateur Supakitch avait cru détecter une imitation de sa création "Supalogo" sur un t-shirt commercialisé par Comptoir des Cotonniers. Mais, malgré les ressemblances entre les deux dessins, la justice a refusé de lui donner gain de cause.

Un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 9 septembre 2016 rappelle que des ressemblances entre deux oeuvres ne sont parfois pas suffisantes pour encourir le grief de contrefaçon de droit d'auteur.

Cette affaire opposait un designer connu sous le pseudo de Supakitch, auteur du "Supalogo", un dessin représentant la tête d'un petit animal entouré d'un feuillage caractéristique. Ce logo, visible sur le site www.metroplastique.com, est apposé sur tous les produits créés par ce designer. 

Supakitch se plaignait de l'utilisation par la célèbre marque de vêtements féminins Comptoir des Cotonniers, d'un dessin reproduisant, selon lui, les caractéristiques essentielles du Supalogo, en l'occurrence un animal (ici un bouledogue) dont la tête est entourée d'un feuillage. Le t-shirt en question était vendu sous le nom "Omummy" est reste aujourd'hui visible dans le cadre d'une recherche sur votre moteur préféré. Comptoir des Cotonniers et son fournisseurs contestaient à la fois l'originalité du dessin et les actes de contrefaçon allégués.

Sur l'originalité, la Cour a considéré que le dessin du "Supalogo" était original au sens du droit d'auteur, c'est-à-dire qu'il portait l'empreinte de la personnalité de l'auteur. La Cour n'a pas accordé d'importance aux antériorités invoquées par Comptoir des Cotonniers, notamment des masques pour enfants à colorier, dès lors que la combinaison des différentes caractéristiques était suffisamment originale. Cette solution est très classique.

Sur la contrefaçon, la Cour considère qu'un dessin représentant un animal dont la tête est entourée d'un feuillage ne suffit pas, en soi, à porter atteinte aux droits de Supakitch sur son logo, en l'absence de reprise des éléments caractéristiques qui, précisément, conféraient l'originalité à l'oeuvre originale.

Selon l'arrêt, "les ressemblances, que l'on retrouve notamment dans la représentation de mandalas, ne sont toutefois pas suffisantes pour retenir des faits de contrefaçon en raison de l'absence de reprise de caractéristiques essentielles non négligeables, telles l'importance et la physionomie de la tête des animaux." En particulier, la représentation de l'animal comme du feuillage (très caractéristique dans l'oeuvre originale) différaient trop pour que la contrefaçon fût constituée.

Si cette solution peut se comprendre au regard des règles applicables en droit d'auteur, on aurait pu imaginer que le grief fondé sur des actes de concurrence déloyale ou de parasitisme pouvait prospérer. Il n'en fut rien. Selon la Cour, en l'absence de risque de confusion entre les deux oeuvres, aucune faute à l'encontre de Comptoir des Cotonniers ne pouvait être constituée.

Une telle décision repose sur des faits précis et peut difficilement être généralisée, mais il faut en retenir que, tant en ce qui concerne le droit d'auteur que la concurrence déloyale, les juridictions exigent un niveau assez élevé de reprise. Sachant que les idées sont "de libre parcours", selon l'expression consacrée, il est impératif de démontrer que le tiers a fait plus que s'inspirer d'un dessin original : il en a repris les caractéristiques essentielles. Et contrairement au droit des dessins et modèles, une simple "impression d'ensemble" commune ne suffira pas.