Christophe Digne (Télécom SudParis) "Notre ambition est d'intégrer l'élite des écoles d'ingénieurs"

A l'occasion de sa prise de poste, le nouveau directeur de l'école d'Evry revient pour le JDN sur la formation et l'insertion professionnelle des ingénieurs.

christophe digne
Christophe Digne, directeur de Télécom SudParis. © Télécom SudParis

JDN. En 2012, le magazine L'Etudiant vous classait 20e sur 92 écoles d'ingénieurs. Avez-vous l'ambition de rejoindre l'élite ?

Christophe Digne. Notre ambition, c'est d'intégrer le groupe A+ [les 10 meilleurs écoles selon le classement L'Etudiant, NDLR], alors que nous sommes aujourd'hui dans le groupe A. Cependant, sauf pour améliorer notre niveau d'exigence, nous ne voulons pas changer pour devenir quelque chose que l'on n'est pas.

Ces classements sont généralement scrutés de près par les établissements. Quel regard portez-vous sur ces palmarès ?

Nous les regardons avec intérêt parce que les étudiants les regardent et que nous cherchons à attirer les meilleurs. Cependant, nous trouvons tout de même ces classements réducteurs : un écart d'un point peut faire perdre plusieurs places. Certes, ils répondent à des besoins, mais de manière brutale. Les effets de taille, par exemple, ne sont pas pris en compte, ce qui favorise les gros établissements. C'est la densité d'excellence qui devrait être prise en compte : la taille humaine de nos promotions est importante, même si le réseau d'anciens est moins large.

Vos étudiants bénéficient, selon les études, d'une bonne insertion sur le marché du travail. A quoi l'attribuez-vous ?

D'abord, le secteur des technologies de l'information est porteur. Ensuite, nous formons à des compétences qui intéressent les entreprises de différents secteurs. Nos taux d'emploi sont significativement supérieurs à ceux des autres écoles d'ingénieurs.

D'après une enquête de la conférence des grandes écoles, vos étudiants gagneraient près de 43 000 euros par an dès leur sortie d'école. Malgré la crise, le marché du travail pour vos ingénieurs est-il sous tensions ?

Il y a effectivement des tensions sur ce type de compétences. C'est pour cela que l'on va en former davantage. Ces dernières années, nous avons déjà accru notre "production" avec des moyens constants. Avec la formation initiale par apprentissage, nous complétons notre offre.

"Nos taux d'emploi sont significativement supérieurs à ceux des autres écoles d'ingénieurs"

Vous avez tissé des liens avec des entreprises, en particulier les grands groupes. Que faites-vous pour vous rapprocher des PME ?

Au niveau de l'Institut Mines Telecom [qui chapeaute 12 écoles d'ingénieurs, dont Télécom SudParis, NDLR] nous favorisons les rencontres par filières afin de tisser des liens. Concernant nos anciens étudiants, 39% des diplômés 2011 travaillent dans une entreprise de plus de 5 000 salariés, 33% dans une entreprise de taille intermédiaire et 27% dans des entreprises de moins de 250 salariés. Pour améliorer l'image des PME à leurs yeux, nous comptons d'abord sur la prise de contact, que ce soit par les stages ou les parrainages : chaque année, l'un des parrains de la promo est issu d'une PME.

Vous avez pris vos nouvelles fonctions au 1er janvier 2013. Quelles priorités affichez-vous ?

L'école avait déjà quelques de projets en cours, que je vais faire avancer, autour de 3 axes principaux. D'abord, l'ouverture, en septembre, d'une formation par alternance, qui vient d'être habilitée par la Commission du titre d'ingénieur. C'est très important pour nous : nous diversifions notre offre de formation, mais aussi les profils des étudiants. Les 15 élèves qui intégreront ce cursus à la rentrée proviennent d'un vivier différent, comme les IUT. Nous avons réussi à définir un cursus intéressant pour les étudiants comme pour les entreprises, avec une pédagogie adaptée et des mises en situation tout au long de la formation.

Et vos autres axes ?

Le second réside dans la création de la Maison de l'innovation des sciences et de la société, à Evry. Ce lieu, dont le bâtiment sera terminé fin 2014, accueillera des enseignants, des équipes de recherches et des start-up qui travaillent tous sur les technologies de l'information. Enfin, le troisième axe concerne le plateau de Saclay, sur lequel nous sommes déjà présents dans les nanotechnologies et demain dans les technologies de l'information.

"Nous ouvrons en septembre une formation en alternance"

L'une des particularités de votre école réside dans sa proximité géographique avec Télécom Ecole de Management. C'est un avantage pour les ingénieurs ?

C'est un atout que l'on a d'ores et déjà et que l'on compte maintenir. Nos synergies vont très loin : les étudiants des deux établissements vivent sur un même campus, suivent des cours ensemble et s'investissent dans les mêmes associations. Au sein même du cursus, des professeurs enseignent dans les deux écoles et certains modules et options sont communs. Même synergie à l'occasion du challenge Projet d'entreprendre : pendant une semaine, des équipes mixtes ingénieurs/managers imaginent des nouveaux projets, conçoivent des business plans... Cette initiative explique en partie le succès de notre incubateur, où se retrouvent certains des meilleurs projets développés par les étudiants des deux écoles.

Vous offrez une formation d'ingénieur généraliste, certes. Mais votre spécialité reste tout de même les télécoms...

Nous sommes généralistes à double titre. D'abord dans la formation d'ingénieur, nous sommes attachés au pluralisme des enseignements. Ensuite par notre domaine de compétences : l'informatique donne accès à des secteurs très divers. Dans la promotion diplômée en 2011, 43% travaillent dans les technologies de l'information au sens large : sociétés de services, éditeurs de logiciels, industrie informatique... Mais, à côté de cela, 36% travaillent dans le conseil et l'audit, 7% dans l'industrie ou encore 7% dans la finance, où les besoin en systèmes d'information sont importants.