Les ventes numériques vont-elles sauver l'industrie musicale en 2014 ?

L'année 2014 va t-elle signer le retour en grâce de l'industrie musicale ? Après les années de décroissance constante des ventes d'albums liées à l'essor d'Internet et au piratage en masse, 2013 a permis aux offres légales par téléchargement, streaming ou radio en ligne de renouer avec un certain succès.

Les ventes records de Stromae, Daft Punk ou Beyonce sont la preuve tangible qu'il est possible pour l'industrie musicale de compenser la chute des ventes sur support physique à travers les offres dématérialisées de téléchargement ou de streaming. Reste à voir si la répartition de la valeur liée à ces nouvelles plateformes numériques, environ un demi centime d'euro reversé aux producteurs et artistes sur les plateformes de streaming, est réellement viable pour l'ensemble de la création musicale.
L'évolution des supports d'écoutes liée aux mutations numériques n'a en tout cas pas freiné l'appétence musicale des Français : on écoute toujours autant de musique en France. D'après une étude publiée mi-décembre 2013 par l'institut GFK, les Français écoutent en moyenne onze heures de musique par semaine dont six heures à la radio et à la télévision. L'écoute de musique au format numérique fait légèrement mieux que sur support physique (2 h 39 contre 2 H 29) et se répartit assez équitablement entre le téléchargement (1 h 26) et le streaming (1 H 13). Surtout, les habitudes changent : la moitié des personnes interrogées indiquent avoir recours au téléchargement et deux tiers d'entre elles le font de manière exclusivement légal. Le piratage est ainsi resté stable ces dernière années et connaît même un léger fléchissement puisqu'il est passé de 17 % en 2010 à 15 % en 2013 d'après cette même étude.

Les ventes digitales en hausse marquées par les succès de Stromae, Daft Punk ou Beyonce

Sur les neuf premiers mois de l'année 2013, le marché de la musique numérique a progressé de 4,9 % par rapport à 2012 : une croissance qui a permis à une poignée d'artistes de renouer avec des volumes de ventes qu'on n'avait plus trop l'habitude de voir depuis la crise. Stromae classe ainsi son album « Racine Carré » en tête des ventes France pour l'année qui vient de s'écouler et atteindre le million d'album vendu en à peine 4 mois. Une performance rare pour un artiste francophone que seuls quelques mastodontes comme Johnny Hallyday ou Céline Dion ont atteint depuis la chute des ventes de CD.
Derrière l'artiste belge, les Daft Punk reste l'autre grande satisfaction de l'année : leur album « Random Acess Memories » décroche un disque de diamant (500 000 albums vendus) sur les seules ventes France. Un plébiscite public et critique qui a dépassé l'hexagone avec 3 millions de ventes à l'international dont une part importante de ventes digitales (67 000 albums vendus la première semaine sur iTunes). Des ventes qui sont néanmoins encore loin de celles enregistrées par Beyonce qui a réussi à écouler un million d'album en moins d'une semaine à l'international et ceci sans aucune publicité et en étant disponible uniquement sur iTunes. A 15 euros l'album, cela fait pas moins de 15 millions d'euros de recettes en une semaine : une belle démonstration de la capacité des plateformes digitales a prendre le relaie des ventes d'albums physiques.

Le streaming devient incontournable

Derrière le succès d'iTunes, les offres de streaming et d'iRadio se sont largement multipliées, Twitter a ainsi lancé cette année son service Twitter Music quelques semaines avant l'iTunes Radio d'Apple.
Lancé il y' a 6 mois la radio en ligne de la marque à la pomme a réussi son pari avec plus de 20 millions d'utilisateurs et des partenariats avec de grandes marques comme Pepsi ou Mc Donald's qui ont payé jusqu'à 10 millions de dollars pour insérer leurs annonces entre les chansons. Des chiffres à mettre en parallèle aux 72 millions d'utilisateurs de Pandora (radio en ligne) et aux services de streaming de Spotify (24 millions d'utilisateurs) et de Deezer (20 millions d'utilisateurs).
Une véritable montée en puissance des services de musique en streaming qui peinent pourtant encore à trouver un modèle économique viable et à générer assez de revenus pour les artistes. Leurs services payants de type premium génèrent plus de profits mais n'attirent pas encore suffisamment d'abonnés (5 et 6 millions pour Deezer et Spotify).
Si Spotify a ouvert son service gratuit aux smartphones à la mi-décembre afin d'augmenter son nombre d'utilisateurs, il est uniquement possible d'écouter ses morceaux en lecture aléatoire : l'objectif pour le site suédois étant d'en faire un produit d'appel afin d'attirer ses abonnés gratuits vers ses offres premium. Une stratégie sensée bénéficier aussi aux artistes puisque ces derniers perçoivent des droits d'auteurs plus importants si leur chanson est écouté par un abonné premium. Il n'empêche que ces revenus générés pour les artistes restent de toute façon bien faible : Spotify a indiqué récemment reverser entre 0,006 et 0,0084 dollars par chanson écouté à l'ensemble des ayants droits. Autant dire pas grand chose pour une majorité d'artistes. Certains sites ont néanmoins choisis de reverser aux ayants droits des rétributions plus avantageuses, soucieux de trouver un partage de la valeur plus équilibré entre création et diffusion : le site Qobuz, spécialisé dans la musique classique, a fait ce choix en reversant 3 centimes d'euros aux artistes par titre écouté, soit cinq fois plus que Spotify. Une stratégie qui semble indispensable pour continuer à bénéficier d'une offre musicale variée de qualité.