Apple : pourquoi l'action décroche en bourse

Apple : pourquoi l'action décroche en bourse Après avoir dépassé les 700 dollars à la mi-septembre, le titre ne cesse de dévisser. En cause : des résultats moins toniques et une concurrence qui relève la tête.

Même les plus grands arbres ne poussent pas jusqu'au ciel. Ce proverbe boursier s'applique parfaitement à l'action Apple, qui, depuis le 19 septembre dernier ne cesse de fondre, passant de près de 705 dollars, à un peu plus de 550 dollars à la mi-novembre. Après avoir été l'enfant prodige du Nasdaq, le marché américain des valeurs technologiques, la firme à la pomme est désormais considérée comme une entreprise lambda. Mais cette dégradation peut-elle se poursuivre ?

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Le cours de l'action Apple, du 3 janvier au 20 novembre 2012. © JDN

Oui à en croire Jeffrey Gindlach, de la firme Double Line capital. Interrogé par la chaîne de télévision américaine CNBC, ce gérant star n'a pas mâché ses mots vis-à-vis de l'entreprise de Cuppertino. Selon lui, l'icone des geeks et autres bobos pèche par un manque flagrant d'innovation. D'après ce spécialiste des marchés financiers, le rythme des sorties du groupe ne doit pas faire illusion : ce n'est pas la quantité qui est en cause, mais la qualité. In fine, l'entreprise n'inventerait plus rien du tout.

Et il faut bien admettre que d'une génération à l'autre, le design ou les performances des Mac, iPad et autres iPhones ne sont plus vraiment disruptifs par rapport à leurs matrices. Seules change la taille de l'écran, pointe-t-il d'un ton cinglant. D'où son diagnostic lapidaire quant à l'évolution future de l'action : elle ne devrait pas coter plus de... 450 dollars !

Pire, un temps assommée par la simplicité si évidente des produits du californien, la concurrence relève la tête et lui taille des croupières. Que ce soit sur les smartphones ou les tablettes numériques, Apple ne domine plus ses marchés. Et les dernières livraisons d'instituts comme IDC ou le Gartner Group n'ont pas échappées aux bureaux d'études des grandes banques et sociétés de bourse américaines, asiatiques et européennes qui les ont épluchées très finement.

Sur les mobiles dits intelligents, les trois-quarts des appareils vendus à ce jour tournent sous Android, le système d'exploitation développé par Google. Un an auparavant, sa part de marché plafonnait à moins de 58% du total. L'évolution n'est pas non plus en faveur des Cuppertino boys pour ce qui concerne les tablettes. Là-encore, les indicateurs virent à l'orange, puisqu'au cours de l'été, Apple ne pesait plus que 50,4% du marché, contre près des deux tiers un an avant. Il n'a pas échappé aux analystes et gérants qu'Amazon avec sa Kindle, Samsung avec ses Galaxy, Asus, lenovo et consorts ont enregistré des croissances de ventes plus élevées que celles de la firme à la pomme.

14 millions d'iPad vendus cet été... soit deux millions d'unités de moins qu'au printemps

Tous ces glissements se sont aussi retrouvés dans les derniers résultats trimestriels publiés par Apple. Certes, les chiffres bruts sont plus qu'honorables avec des ventes estivales de 36 milliards de dollars, en hausse de 27%, et un résultat net de 8,2 milliards de dollars en progrès de 24%. Sur un an, la croissance des ventes dépasse les 45% à 156,5 milliards de dollars, et celle du résultat net (41,7 milliards de dollars) les 60%.

En fait, les salles de marché extraient deux points négatifs des éléments présentés par l'entreprise. Il y a d'abord des prévisions en demi-teinte pour l'automne et l'an prochain. Sur le premier trimestre de l'exercice 2013, correspondant aux fêtes de Noël, les facturations ne progresseraient plus que de... 12% seulement, à 52 milliards de dollars. Pourtant, il y a encore quelques semaines, la direction tablait encore sur au moins 55 milliards de dollars.

Ensuite, la décomposition des revenus par ligne de produits révèle là-encore une érosion plus que marquée des performances d'Apple. Certes, les ventes d'iPad progressent de 26%. Mais à 14 millions d'unités vendues cet été, il y a tout de même un retrait de deux millions d'exemplaires par rapport au printemps. Idem pour les iPhone (+ 58%) : le chiffre de 27 millions de mobiles sonne cruellement face aux 35 millions d'appareils vendus trois mois auparavant. Pour le management et nombre de salles de marché, tout cela s'explique par des reports d'achats de consommateurs attendant à l'époque l'iPad Mini et l'iPhone 5.

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L'iPad mini pourrait ouvrir de nouveaux marchés à Apple. © Apple

Mais voilà : malgré un carton dès les premières heures de sa sortie, l'iPhone 5 ne convainc pas vraiment les bureaux d'études. Ici et là des gérants notent que les concurrents de la firme à la pomme ont continué à alimenter le marché pendant que leur rival faisait lanterner les consommateurs. Autant de clients en moins pour l'entreprise de Cuppertino ! De plus, l'iPad Mini s'affiche à un prix davantage élevé que certaines tablettes offrant des performances supérieures. Et comme si cela ne suffisait pas, Microsoft l'ennemi juré, a présenté sa Surface, avec une interface graphique radicalement nouvelle ! Pour couronner le tout, ces innovations et les suivantes (futur Mac) ont imposé à Apple de lourds investissements techniques et immatériels (marketing, communication, achats d'espaces publicitaires, etc.) qui, in fine, ont encore pincé ses marges.

Tous ces éléments à charge indiquent-ils que le cours de l'action Apple va connaître un destin digne de celui de Facebook ? Pas forcément. Car l'entreprise dispose de moyens plus que considérables : ses liquidités disponibles dépassent les 120 milliards de dollars. Soit une fois et demie le déficit budgétaire français ! Ensuite, les lancements de déclinaisons low cost de ses produits phares (tablettes, Mac) peuvent lui ouvrir d'autres marchés comme ceux de l'éducation, des entreprises, des pays Frontières (ceux qui frappent à la porte des BRICS et autres pays émergents). Et donc plus que compenser les inévitables départs d'aficionados froissés par cette descente en gamme. En attendant, l'action va poursuivre sa glissade. Les plus audacieux ne manqueront pas de profiter de cette phase de repli pour revenir à bon compte sur l'un des titres stars de Noël.