Mathieu Llorens (AT Internet) "Ces 4 millions d'euros vont nous aider à passer un nouveau cap"

AT Internet obtient un nouveau financement. Son DG explique au JDN ses projets de développement, et les défis qui attendent son entreprise spécialisée dans la mesure d'audience.

JDN. Tout juste trois ans après avoir levé 6,5 millions d'euros, AT Internet annonce aujourd'hui avoir obtenu un financement complémentaire de 4 millions d'euros, auprès de la BPI, du CIC, du Feder, de la Coface et de la région Aquitaine. Quels développements cette somme va-t-elle vous permettre de réaliser ?

Mathieu Llorens est directeur général d'AT Internet. © AT Internet

Mathieu Llorens. AT Internet est une entreprise indépendante qui vient de fêter ses 20 ans. Elle est rentable, mais nous sommes à l'équilibre parce que nous dépensons tout dans notre développement. Nous avons toutefois besoin de cet investissement complémentaire, pour nous aider à passer un cap et enrichir davantage notre offre.

Le machine learning offre par exemple des opportunités intéressantes aux outils d'AT Internet, et ce nouvel investissement va nous permettre de mieux les saisir. L'apprentissage automatique ouvre en effet la voie à l'automatisation des analyses et à de nouvelles prédictions. Travailler dans cette direction sera aussi l'aboutissement, pour nous, d'un projet, "SpeedData", qui nous a permis de collaborer avec le laboratoire bordelais de recherche en informatique sur le terrain du Big Data.

Il y a aussi des fonctionnalités mobiles qui continuent d'être développées. Par exemple, nous travaillons sur l'analyse du parcours clients, qui se fait désormais sur plusieurs device. Ce suivi cross-device n'est simple qu'en théorie, car en pratique, c'est plus compliqué que de juste suivre des utilisateurs logués… Surtout, que contrairement à d'autres, nous sommes très soucieux du respect des internautes, et tout doit se faire avec leur consentement, dans le respect de la loi.

Nous avons beaucoup d'autres fonctionnalités en préparation. Nous allons aussi travailler sur le marquage et sa fiabilité, un "smart SDK" pour les apps mobile, un outil permettant de connaître le trafic des pages et des liens en surfant sur le site, ou encore un benchmark des apps mobiles en utilisant des données provenant des boutiques d'applications.

Votre concurrent Adobe intègre son outil Analytics dans une suite Marketing Cloud plus vaste. Google vient de suivre sa trace avec sa "Google Analytics 360 Suite" qui inclut gestion de tag et DMP, entre autres… Allez-vous prendre le même virage et élargir votre périmètre en proposant une suite complète pour le marketing ?

Notre vision est différente, et nous prenons le sens inverse. Alors que d'autres développent de vastes suites, nous creusons le même sillon de l'analytics. Nous pensons que des best of breed peuvent être plus pertinents que les outils d'une suite. Pour débloquer des fonctionnalités voisines, nous préférons renvoyer vers des partenaires spécialisés, comme TagCommander pour la gestion de tag par exemple. Cela ne nous empêche pas de continuer à développer les API. Un terrain sur lequel nous avons déjà beaucoup investi. Nous ne changeons donc pas de cap.

Il y a trois ans, lors de votre levée de 6,5 millions d'euros, vous deviez aussi vous développer en dehors de l'Hexagone. Vous réalisiez alors la moitié de votre chiffre d'affaires à l'international, avec l'objectif que ce chiffre atteigne les 75%. Où en êtes-vous aujourd'hui ?

Nous allons accélérer notre développement aux États-Unis dans les prochains mois 

Notre chiffre d'affaires vient toujours pour moitié de l'international. C'est en partie dû à la progression du chiffre d'affaires réalisé en France. Car si nous progressons peu en part de marché en France, le panier moyen a augmenté dans l'Hexagone. Surtout celui des gros clients. Car avant, il fallait seulement mesurer un seul site, mais désormais il y a le site mobile, et parfois une multitude d'apps à analyser en plus…

Quant à notre développement international, je dois aussi avouer que nous avons rencontré des difficultés dans certains pays, et nous avons dû freiner dans certains lieux. Par exemple en Russie : nous avions commencé très fort, mais la chute du rouble s'est ajoutée aux problèmes géopolitiques. Le Brésil aussi s'est enfoncé dans la crise.

Nous nous sommes aussi rendu compte que nos prospects dans les marchés émergents n'étaient pas toujours assez mûrs. Il fallait souvent tout expliquer, ce qui a évidemment compliqué les ventes, alors que nous pensions justement qu'elles allaient être plus faciles. Inversement, nous avons réalisé de belles performances en dehors des pays émergents, dans les pays scandinaves par exemple. Et puis, cela se passe aussi bien aux États-Unis. Nous n'avons qu'une seule personne là-bas, mais nous avons déjà pu signer plusieurs sites, dans l'e-commerce notamment. Nous allons d'ailleurs accélérer aux États-Unis dans les prochains mois.