Où est passé le Technology Business Management ?

Après une période active d’adoption du Technology Business Management comme système de contrôle financier, l’industrie a quelque peu relâché sa vigilance. Mais cette méthodologie de gouvernance reste plus que jamais pertinente.

Depuis 2012, on parle beaucoup de TBM, Technology Business Management, autrement dit un framework basé sur des données (data-driven) qui aiderait à établir et gérer les budgets IT, les niveaux de consommation et leur valeur. Les bénéfices attendus du TBM semblaient inespérés il y a 4 ans : transparence financière, accès aux données et surtout la promesse de prendre des décisions avisées, ou bien d’analyser les conséquences de décisions prises dans le passé.

Un nouveau monde s’ouvrait devant nous, qui allait forcément changer le regard des entreprises sur l’IT : la discipline du TBM allait transformer la perception de l’IT, d’une nécessité ennuyeuse à une fonction appréciée pour sa capacité à produire de la valeur. Nous pensions que le TBM permettrait à l’industrie d’aller de l’avant et d’améliorer les standards. Compte tenu des avancées rapides de la technologie, si vous aviez demandé à ces représentants où nous en serions quatre ans plus tard, ils vous auraient répondu que la discipline du TBM ferait partie intégrante de l’alignement entre le business et l’IT et qu’elle serait parfaitement positionnée pour accompagner la transition vers le numérique. 

Où en est-on aujourd’hui ?

Pourtant, en 2016, les mêmes problématiques étaient toujours à l’ordre du jour : économies liées aux infrastructures patrimoniales, adéquation des tarifs mobiles sur les niveaux de consommation et amélioration de l’utilisation des actifs. Bien entendu, toutes ces considérations méritent notre attention et sont nécessaires pour asseoir la crédibilité opérationnelle. Mais nous devrions déjà récolter les bienfaits de l’application systématique et généralisée des bonnes pratiques du TBM. Nous devrions être en train d’envisager la prochaine évolution, le rôle de l’entreprise définie par le logiciel (Software Defined Enterprise), les modèles d’orchestration et de courtage cloud, l’architecture définie par les services. Nous devrions nous intéresser à l’impact de l’augmentation des dépenses dans les technologies numériques en dehors du périmètre IT et à l’importance croissante que revêt la gouvernance fondée sur des données fiables pour administrer cet environnement changeant et complexe.

Dans sa forme actuelle, le TBM est entré dans une période de stagnation car les fournisseurs et les clients n’ont pas su faire évoluer le service. Après une période active d’adoption du TBM comme système de contrôle financier, l’industrie a quelque peu relâché sa vigilance. Mais face au tsunami des innovations numériques et des nombreux changements qu’elles induisent, les entreprises doivent aujourd’hui y voir plus clair pour se préparer aux perturbations à venir. Pour pouvoir saisir les opportunités que les nouvelles technologies vont faire émerger, les entreprises ont impérativement besoin de pouvoir s’appuyer sur une fondation solide avec des règles de gouvernance strictes et des contrôles rigoureux des opérations, fondés sur des données intégrées et à jour, ce qu’une stratégie TBM rend possible.

Nous savons que pour bien appliquer les principes TBM, il faut adapter le modèle de fonctionnement de l’entreprise, son style de management et d’organisation, et même repenser la définition et les prestations des services IT. Ce ne sont pas des défis insurmontables, mais dès qu’il s’agit de voir plus loin et d’envisager les pratiques TBM dans une démarche d’accompagnement et de valorisation de la disruption digitale à venir, les entreprises semblent buter sur un obstacle majeur.

C’est d’autant plus important que la distinction entre les services délivrés par l’IT et ceux acquis par l’entreprise directement devient floue. Là où l’IT a pu être vue comme la solution privilégiée pour relever certains défis, les services sont aujourd’hui définis en termes de résultats, avec des décideurs qui se soucient peu des conditions de prestation du moment que le problème est résolu. Dans un tel environnement, l’IT doit plus que jamais démontrer la valeur qu’elle apporte au business pour ne pas risquer d’être ignorée.

Nous savons que la technologie peut faciliter l’exécution de la stratégie business de n’importe quelle entreprise par l’automatisation des processus, par l’innovation des produits et des services et par la connexion optimale avec les clients. Mais à moins que l’organisation IT démontre sa valeur ajoutée à tous les niveaux des technologies émergentes, ses représentants perdront de leur autorité et ils seront moins sollicités pour définir le cahier des charges de la technologie, les besoins applicatifs et au final la stratégie business.

L’apport de valeur doit être l’ambition déclarée de toute organisation IT, à tous les niveaux de la hiérarchie d’une entreprise. Pour prétendre à un niveau d’engagement supérieur, nous devons envisager la prise en compte par le TBM des modèles opérationnels changeants et des nouvelles conditions de prestation des services, ainsi que la façon dont le framework peut apporter les insights nécessaires au management de l’entreprise numérique, Digital Business Management.

Souhaitons que les prochaines discussions sur le sujet, voient émerger une vision TBM plus ambitieuse, ouverte à l’innovation plus qu’au recyclage. Une version de l’approche TBM capable de définir l’alignement futur et pragmatique du business et de l’IT, plutôt que de se concentrer sur l’optimisation des capacités de stockage des entreprises comme seule piste de leur survie. Si l’approche TBM ne se remet pas davantage en question, elle risque de se résumer à un outil IT de gestion financière. Dans le cas contraire, elle pourrait jouer un rôle prépondérant dans la définition des conditions de management de la technologie dans le nouveau monde de l’entreprise numérique. Le business a su perfectionner son approche du management de la technologie, à présent c’est au tour du management de la technologie de perfectionner son approche de la création de valeur pour le business.