Alexandre Giros (La Banque Postale) "Nous ne faisons transiter aucune des données de nos clients par un outil lié aux Gafa"

Le directeur du digital de la banque citoyenne s'exprime sur la disparition annoncée des cookies tiers et évoque le rapport de sa marque à Google et Facebook.

JDN. Google a annoncé la disparition des cookies tiers d'ici deux ans. Dans le même temps, la Cnil publiait un projet de recommandation qui durcit considérablement les règles en matière de dépose des cookies. Qu'est-ce que ça vous inspire ?

Alexandre Giros est directeur du digital de la Banque Postale. © S. de P. La Banque Postale

Alexandre Giros. Ça nous inquiète forcément. Ces cookies nous sont indispensables pour opérer nos achats média, qu'il s'agisse d'améliorer le pilotage des campagnes, en analysant celles qui marchent le mieux, ou de faire un travail de ciblage et segmentation efficace. Ils nous sont également indispensables pour tout ce qui touche à la web analyse, pour comprendre les comportements de ceux qui visitent nos sites. Ceci dit, nous ferons bien sûr les efforts nécessaires pour nous mettre en conformité avec le prochain cadre réglementaire. Parce que La Banque Postale, en tant que banque citoyenne et tiers de confiance, a la protection de la vie privée de ses utilisateurs à cœur. C'est la raison pour laquelle nous ne commercialisons pas leurs données, pas plus que nous ne les faisons transiter via des outils liés au Gafa dans le cadre de nos activations médias. 

Pas même Facebook pour y faire du custom audience ?

Non plus ! Nous n'uploadons aucune donnée personnelle quand nous faisons de l'achat média au sein de la plateforme.

Google et Facebook sont ultra-dominants sur ce marché de la publicité. Est-ce une situation à laquelle vous prêtez également une attention particulière ?

"La Banque Postale bénéficie d'une part de voix gigantesque dans les résultats organiques de Google"

Forcément car cette domination peut représenter un véritable danger pour la pluralité des médias. Nous nous efforçons de préserver cette dernière en achetant sur les sites médias français ou en testant de nouvelles offres comme celle du moteur de recherche Qwant. Précisons également que notre DMP est gérée par un acteur français, Numberly, et complètement indépendante de celle du groupe La Poste pour satisfaire à la réglementation en matière de traitement des données bancaires. En ce qui concerne Google, ce dernier n'est pas prédominant dans notre mix media car La Banque Postale bénéficie d'une part de voix gigantesque dans les résultats organiques du moteur de recherche. Nous captons 47% des 200 premières requêtes du secteur de la finance et avons donc moins besoin d'investir en SEA que nos concurrents.

L'un de vos principaux chantiers est la réconciliation on et offline du parcours consommateur. Où en êtes-vous ?

C'est un éternel chantier pour un groupe comme le nôtre qui s'appuie sur 8 000 bureaux de poste et 23 centre financiers dans sa relation au client. Mais nous sommes en ordre de marche pour proposer à nos 10 millions de clients une expérience 100% multi-canal. Il a fallu pour cela refondre notre infrastructure IT, pour établir un socle technique commun aux centres physiques, agences et équipes digitales. De façon à ce que le client puisse profiter des mêmes services qu'il soit sur son application ou au téléphone avec un conseiller.

C'est ce qui est aujourd'hui possible pour un service comme "Perso Carte" qui permet de gérer les options relatives à la carte. Le client peut, par exemple, désactiver l'option de paiement sur Internet depuis son application et la réactiver en contactant un conseiller. Cela signifie une vraie montée en compétence en matière d'UX, pour proposer des parcours omnicanaux sans couture et interruptibles. La prochaine étape, c'est de proposer ce parcours sans couture à ceux qui ne sont pas encore clients mais simples prospects

Quelles sont les conséquences de cette mutualisation pour votre organisation ?

"L'équipe digitale est au cœur de l'organisation"

Nous avons fait en sorte de mettre l'équipe digitale au cœur de notre organisation. Ce modus operandi présente plusieurs avantages. Cela permet à notre équipe digitale d'être en lien avec toutes nos équipes au quotidien et de les assister rapidement si besoin. Cela permet également à toutes nos équipes de penser spontanément au digital. Un chef de produit de La Banque Postale réfléchira en permanence au volet digital d'une nouvelle offre.

Avec plus de 1,3 milliard d'interactions en 2019, le digital est désormais votre premier canal d'interaction. Une bonne nouvelle ?

C'est en tout cas le meilleur moyen pour une banque d'augmenter la satisfaction de ses clients, notamment le fameux NPS. On le voit avec notre banque 100% digitale Ma French Bank et nos services digitaux où l'amélioration de la satisfaction client est la plus forte. C'est d'autant plus important que le site et l'application sont les points de contact les plus utilisés par les clients aujourd'hui et que c'est donc le digital qui drive le sentiment général. Prenons l'exemple du service de l'opposition à une carte bancaire. C'est une fonctionnalité qui est de plus en plus souvent activée directement par Internet car les internautes veulent que ça soit fait dans la seconde plutôt que de perdre du temps au téléphone. C'est un service essentiel qui enlève un stress considérable.

Le digital est un canal tout indiqué pour ce type de services. Bien évidemment, cela pose quelques contraintes d'un point de vue de la sécurité des données. Nous avons développé, il y a trois ans déjà, une solution d'authentification forte à deux facteurs (mot de passe et empreinte). La nouvelle loi DSP2, qui entre en application cette année, nous imposera d'ailleurs de proposer cette solution d'authentification pour la simple consultation.  

Cet article a également été publié dans Adtech News, supplément papier du magazine CB News, dédié à l'adtech et au martech. Dans l'édition de mars, un dossier sur le ciblage cookieless, une interview de La Banque Postale, le baromètre du programmatique, un focus sur l'insertion de pub dynamique dans les podcasts et un focus sur Displayce.