Les 3 pièges en publicité programmatique que votre agence ne vous dit probablement pas
Entre les problèmes de visibilité, la triche au cookie dropping et les limites du last clic, le display programmatique n'est pas exempt de failles.
Annonceurs, cet article vous aidera à reprendre le contrôle sur vos investissements medias digitaux. Nous y présentons 3 phénomènes souvent mis sous le tapis :
• Comment le taux de visibilité doit être réellement utilisé pour optimiser vos campagnes
• Les conversions attribuées qui ne proviennent en réalité pas des campagnes (cookie dropping - le point le plus intéressant de l'article)
• Le modèle d'attribution qui biaise l'analyse de rentabilité media au profit du Search & du Social.
1) Taux de visibilité : 50% des impressions publicitaires n’apparaissent jamais sur un écran
Et pourtant les annonceurs payent pour ces impressions qui n’ont jamais existées, dans la grande majorité des cas.
Cela s’explique par le fonctionnement technique du web et des applications mobile (les deux environnements principaux du canal Programmatic). Par exemple lorsque vous vous connectez à une page web, celle-ci doit charger entièrement. C’est-à-dire qu’elle doit envoyer à votre ordinateur/téléphone l’ensemble de son contenu visuel, même celui-ci ne sera peut-être jamais vu dans le cas où vous décidez de ne pas descendre jusqu’en bas de la page. Ce phénomène est donc naturel. Il engendre le plus grand piège du Programmatic, qui sera notre point 2. Toutefois, si vous découvrez ce phénomène aujourd’hui, vous allez voir que les publicités Programmatic Web/App conservent la même valeur que vous leur prêtiez il y a 5 minutes, je vais vous le démontrer.
Une impression publicitaire Display est considérée comme « vue » si la moitié de son espace a été affichée à l’écran au moins une seconde (norme MRC & IAB). Le terme « taux de visibilité » est donc déjà trompeur, il conviendrait davantage d’utiliser le terme « taux d’affichage à l’écran ». Il est en effet impossible de savoir si l’œil de l’internaute est passé par l’espace publicitaire et s’il y a prêté son attention. Malgré tout, je vais continuer d’utiliser le terme taux de visibilité au fil de cet article afin de coller avec le reste du marché.
Le taux de visibilité moyen est de 72% sur Ordinateur Web, 38% du Mobile Web et de 42% Mobile in-App¹. Il varie beaucoup d’un site à un autre. Et au sein d’un même site, cela dépend beaucoup de son emplacement. Voici par exemple la répartition des impressions du site Leboncoin, selon leur probabilité d’être déclarées vues par ActiveView de Doubleclick (Google).
50% des impressions ne sont pas jamais vues, est-ce un problème ? Bien non.
Comme plus de 80% des impressions Programmatic sont achetées² via un système d’enchères en temps réel (RTB), il est possible (même impératif) d’ajuster le prix (CPM) de chaque enchère en fonction du taux de visibilité estimé, pour chacune des impressions que vous souhaitez acheter. Ces estimations en temps réel se fondent sur les données empiriques et elles sont extrêmement fiables car les emplacements des sites/applications ne changent pas tous les jours. Les entreprises réalisant ces estimations sont les experts de l’Ad Verification (IAS, Adloox, Doubleverify, ActiveView..) ainsi que les DSPs (Doubleclick, Xandr, TheTradeDesk, Amazon..).
Par exemple si l’objectif est d’avoir une impression vue pour 2€ (CPMv), le CPM payé aux enchères sera ajusté en fonction de la probabilité estimée, pour chacune des milliards d’enchères par jour correspondant à votre ciblage. Il est rentable d’acheter des impressions qui ont 1% de chance d’être vue, dans la mesure où le prix d’achat (CPM) est bien ajusté.
- Que faire pour ne pas être impacté ?
Utilisez les outils d’Adverification en pré-bid (intégrés aux plateformes d’achat DSP) pour ajuster le CPM d’enchère en fonction du taux de visibilité estimé, et sur l’ensemble des impressions que vous achetez.
2) Cookie dropping : une grande partie des conversions des bilans ne proviennent finalement pas de vos campagnes. Celles appelées « conversions post-vue » interviennent en majorité après des impressions qui n’ont jamais été affichées sur un écran.
C’est le plus grand piège de notre secteur à mes yeux.
Un.e internaute reçoit une impression qui n’est pas affichée à l’écran, car il ne scrolle pas. Il avait prévu de réaliser une conversion sur votre site (lead ou vente), ce qu’il ou elle fait. La conversion est comptabilisée comme attribuée à l’impression en question. Résultat : vos investissements dans le digital paraissent bien plus rentables qu’ils ne le sont en réalité.
Nombreuses sont les entreprises qui utilisent le terme « conversions post-vue » pour parler des conversions ayant lieu après qu’une personne ait reçue une impression vue …ou qui n’a jamais été affiché sur un écran (impression pas vue). Ce terme est explicitement trompeur. Il conviendrait plutôt d’utiliser les termes « post-impression » et « post-impression vue ». Il y a du sens à regarder si une conversion intervient après la vue d’une publicité, mais ce n’est pas le cas si l’impression n’a jamais existé visuellement.
Pourquoi la grande majorité du secteur ne fait pas la différence entre les conversions post-impression et les conversions post- impression vue ? Il y a deux grandes raisons.
Tout d’abord il est difficile de changer les mauvaises habitudes du passé, héritées d’un secteur récent aux allures de Far West. Mais surtout parce que les technologies qui font le travail d’attribution (les adservers, dans la plupart des cas) ne permettent pas à leurs utilisateurs (agences & trading desks) d’accéder aux données de conversions des campagnes avec distinction. C’est le cas de Campaign Manager de Doubleclick (Google) par exemple. Ces données existent en brut, mais l’utilisateur ne peut y accéder via l’interface de l’adserver. Notre industrie doit exiger un changement important à ce niveau. L’adserver Weborama l’a bien compris et propose depuis plusieurs années la possibilité de comptabiliser uniquement les conversions post-impression vue. Cela nécessite un partenariat sur-mesure avec Integral Ad Science et engendre un coût que peu d’annonceurs peuvent se permettre. Notre secteur a besoin de cela par défaut, et c’est parfaitement possible techniquement. Le blocage n’est que politique. Annonceurs, à vous de faire changer les choses, reprenez le contrôle sur vos campagnes digitales !
- Que faire pour ne pas être impacté d’ici là ?
- Exigez un taux de visibilité minimum de 60% sur vos campagnes (plus serait contre-productif pour la logique demande/offre propres aux systèmes d'enchères)
- Réduisez la fenêtre d’attribution post-impression à 1 ou 2 jours maximum.
3) Le Search & le Social paraissent bien plus rentables que les autres sites/applications (appelés canal Programmatic), car 95% des annonceurs fondent leurs règles d’attribution sur des modèles de contribution au last-event.
Nous utilisons les moteurs de recherche et les réseaux sociaux tous les jours. C’est la raison pour laquelle les publicités Search ou Social ont bien plus de chance d’arriver juste avant une conversion.
Toutefois la décision de conversion d’un.e internaute peut se jouer bien avant. C’est la raison pour laquelle il me semble nécessaire de ré-équilibrer l’investissement media sur d’autres sites/applications que Google et Facebook/Instagram. A l’heure actuelle c’est 70% des investissements en media digital sont pour le Search de Google et le Social de Facebook/Instagram³. TheTradeDesk (DSP concurrent à celle de Google) a compris ce biais d’analyse de la rentabilité, qui gangrène notre secteur, et fait beaucoup d’efforts de communication à ce sujet. Toute comme les solutions d’attribution dédiées telles que Eulerian qui permettent d’utiliser des modèles de contribution différents (first-event, linéaire, U, scored..). Il est aussi parfaitement possible d’adopter ces règles d’attribution plus réfléchies avec les adservers les plus utilisés du marché (Campaign Manager, Sizmek, Weborama..) mais ce n’est pas la configuration par défaut et encore trop peu d’annonceurs/agences se penchent suffisamment sur ce sujet.
- Que faire pour ne pas être impacté ?
Analyser la rentabilité de vos investissements médias avec un modèle de contribution plus adapté à la réalité du parcours de décision de vos audiences (modèle en U par exemple).
Sources
2 - IAB France – Baromètre données 2020, Février 2021
3 - Etude SRI – ePub – S1 2020