Comment les softwares s'apprêtent-ils à bousculer le monde de la publicité ?
"Software is eating the world", racontait Marc Andreessen, figure iconique de la Silicon Valley, dans une tribune mythique. 10 ans plus tard, force est de constater qu'il avait raison. En revanche, et contrairement aux apparences, les "softwares" se sont peu invités dans le monde de la publicité... C'est en train de changer pour le plus grand bénéfice des annonceurs et de leurs agences & conseils.
Il y a eu une première phase d'émergence d’outils publicitaires “Adtech”. Ces outils étaient en fait des interfaces de programmation conçues pour lancer et optimiser des campagnes sur les différents canaux Google Ads, Facebook Ad Manager, les DSP. J’ai moi même participé à cette petite révolution quand j’ai lancé AppNexus/Xandr en France, et j’ai pu voir combien cela avait créé une rupture dans les métiers d’agences. Je peux aussi témoigner que ces outils ne sont pas de la même famille que ce que l’on désigne généralement par “softwares”
Qui dit software parle de productivité
En effet, ces outils Adtech ont conféré de nouveaux pouvoirs immenses aux marques et agences pour mieux communiquer (mieux cibler, mieux gérer les budgets, plus de flexibilité, plus de données) et leur workflow est totalement digitalisé. Ils ressemblent donc à s’y méprendre à des softwares... mais ils n’en n’ont pas les bénéfices classiques ! Généralement les softwares permettent des gains de productivité, ils ont un modèle économique sous forme de souscription mensuelle, leur utilisation est très liée au métier, une variété d'utilisateurs y voit une valeur ajoutée et peut les utiliser. A l’inverse les outils Adtech ont créé plus de travail (comptez le nombre de clics pour mettre en ligne une campagne dans un DSP), leur modèle économique est un % du media, les applications sont très généralistes, et il n’existe qu’un seul type d'utilisateur très spécialisé (le trader media).
Mais voilà qu’une génération de softwares est en train d’émerger dans la publicité digitale, en particulier dans la publicité locale. Ces softwares permettent la création automatique de campagnes digitales locales à partir de flux d’information (les adresses des magasins, un flux produit) ce qui permet d’obtenir des gains de productivité spectaculaire pour les enseignes et leurs agences. Par exemple, créer une campagne pour des centaines de points de vente met quelques heures avec un de ces softwares contre plusieurs jours hommes sans.
Nous avons déjà vu ce phénomène de “softwarisation” dans le marché de la communication : l’emailing a été “softwarisé” et est désormais un module standard de toutes les grandes solutions du marché (Adobe, Salesforce, Oracle, SAP, Microsoft) utilisés par les annonceurs et leurs agences.
Une évolution qui profitera aux annonceurs et à leurs agences
Les agences media, les agences data, les sociétés de conseils, les intégrateurs ont un rôle clé dans cette lame de fond de la “nouvelle softwarisation” de la publicité, à la croisée des chemins entre communication et technologie. Les gains de productivité et l’innovation qui découlent de ces softwares génèrent ainsi de nouveaux projets où ces partenaires peuvent mettre le poids du corps sur des services à valeur ajoutée et créer de nouvelles expertises pour le bénéfice de l’annonceur. Pour ne citer que quelques exemples de projets : conseil en transformation digitale articulée autour de ces softwares, intégration, gestion de la complémentarité des media online vs offline / national vs local, injection de données (CRM par exemple), insights basé sur les nouvelles données générées, etc.
Le géant du conseil IT Accenture s’est notamment développé en s’appuyant sur les projets générés par les grands softwares autour de l’ERP (Oracle, SAP) puis autour du CRM (Salesforce). Il est ainsi vraisemblable que l’on assiste dans les prochaines années à la naissance d’un leader du software publicitaire accompagnés de géants du conseil qui profiteront de la vague. Reste à savoir si ces derniers seront européens.