Technologie durable : la maturité des grandes entreprises françaises progresse
Cette chronique est co-signée par Marie Georges, directrice exécutive Sustainability France et Benelux d'Accenture et Romain Mouton, président du Cercle de Giverny.
Associer numérique et développement durable est devenue une priorité pour la majorité des grandes entreprises françaises. Une prise de conscience salutaire mais qui doit encore s’accélérer alors que les effets de la crise climatique se font de plus en plus menaçants.
Longtemps, technologie et durabilité ont été opposées. Mais depuis quelques années, de nombreuses innovations montrent que les nouvelles technologies ont un rôle crucial à jouer dans la réduction de notre empreinte carbone et la préservation de notre planète. Et c’est une excellente nouvelle à l’heure où les répercussions de la crise climatique sur l’environnement et notre quotidien sont de plus en plus alarmantes. Une condition s’impose cependant : ces technologies doivent elles-mêmes intégrer des principes de durabilité et de responsabilité.
Mesurer, comprendre et agir
L’accélération de l’adoption par les grandes entreprises françaises de technologies responsables visant à mesurer, comprendre et agir sur les objectifs de développement durable et RSE (1) témoignent de leur volonté de faire de la technologie responsable une de leurs priorités. Une large majorité d’entre elles est aujourd’hui mieux équipée pour répondre aux obligations de la réglementation européenne et ont déjà mis en œuvre des outils de reporting et de transparence RSE ou sont en phase pilote. Les technologies avancées, comme l’IA et l’IoT notamment, sont particulièrement sollicitées quand il s’agit de réduire la consommation énergétique des opérations ou de construire des chaînes d’approvisionnement durables.
Parallèlement, la nécessité de limiter l’impact environnemental et social de la technologie fait aussi clairement partie des objectifs des entreprises. La moitié d’entre elles intègre ce critère dans le choix de leurs fournisseurs tandis que les deux tiers adoptent des stratégies green data pour réduire la collecte, le transfert et le stockage inutile des données. En revanche, l’éco-conception reste un chantier à développer tout comme la définition de principes de développement logiciel durable avec des engagements en matière d’éthique.
Réinventer l’ensemble de son modèle d’affaires
Au-delà de ces avancées plus ou moins marquées sur les usages et les pratiques, l’intégration des enjeux ESG au cœur de la stratégie des entreprises nécessite de réinventer l’ensemble du modèle d’affaires. Or, seulement 20 % des entreprises déclarent développer une approche holistique pour penser de manière intégrée la stratégie générale de l’entreprise, la stratégie technologique et la stratégie de développement durable. Cependant, la prise de conscience des décideurs est bien réelle : les trois quarts des entreprises françaises sont en effet en train de repenser leur modèle d’affaires pour s’adapter au changement climatique. Elles optent majoritairement pour une approche collective en menant cette réflexion en collaboration avec des laboratoires de recherche et des universités, mais aussi des partenaires technologiques.
Toutefois, cette démarche collaborative nécessaire pour enclencher des changements systémiques est difficile à mettre en œuvre dans les faits. Si les entreprises françaises montrent un réel intérêt à collaborer avec des partenaires pour incuber de nouvelles solutions technologiques ou pour co-innover, elles sont plus frileuses à nouer des coalitions industrielles dans certains domaines clés tels que la gestion des chaînes d’approvisionnement mondiales.
Technologie et smart data, pierre angulaire de la transformation des entreprises
Reste à développer l’association entre technologie et utilisation intelligente de la donnée, pierre angulaire d’une démarche efficace pour atteindre les objectifs de décarbonation et plus largement les objectifs environnementaux, sociaux et de gouvernance. Technologie et smart data sont en effet clés pour générer une transformation à l’échelle et soutenir l’invention de nouveaux modèles d’affaires, non seulement sur l’ensemble des dimensions d’une entreprise mais aussi en englobant les écosystèmes dans lesquels celle-ci évolue. Enfin, dernier défi à relever : la construction d’un nouveau modèle qui intègre la valeur environnementale et sociale dans le calcul de la performance. Un chantier, certes entamé mais qui reste à finaliser.
(1) Étude « Technologie Responsable : quelles avancées pour les entreprises françaises en 2023 ? - Accenture Research en partenariat avec le Cercle de Giverny