Traçabilité et qualité des médicaments, enjeux clés de la digitalisation du secteur de la santé pour une médecine plus sûre
L'ensemble de l'écosystème santé est en pleine mutation stratégique et culturelle ce qui implique des défis aussi divers que l'interopérabilité des données, la cybersécurité, la montée en compétences des équipes ou encore la gouvernance de la transformation.
De la maintenance des équipements médicaux à la production de médicaments de pointe, en passant par la gestion des données patient et la logistique hospitalière, les technologies digitales apportent une véritable plus-value en matière de fiabilité, productivité et sécurité. L’ensemble de l’écosystème santé est en pleine mutation stratégique et culturelle ce qui implique des défis aussi divers que l’interopérabilité des données, la cybersécurité, la montée en compétences des équipes, et ou encore la gouvernance de la transformation.
Ces enjeux transversaux conditionnent la réussite des projets et la capacité du secteur à passer d’une médecine curative à une médecine proactive et personnalisée, capable d’anticiper les défaillances techniques et médicales avant même qu’elles n’impactent les patients.
Accélérer la transformation industrielle et culturelle du secteur de la santé
Le secteur de la santé est historiquement régi par des processus lourds, fortement réglementés. Face à la complexité croissante des pathologies, à la pression économique et à la nécessité de produire rapidement des traitements innovants, la digitalisation devient un levier incontournable.
Derrière ce terme générique, on retrouve une panoplie d'outils : capteurs IoT, intelligence artificielle, jumeaux numériques, plateformes de données en temps réel, maintenance prédictive, automatisation des procédés, etc. Dans l’industrie pharmaceutique, tous concourent à quatre objectifs clés : fiabiliser et optimiser les opérations industrielles, et réduire les coûts et en garantissant la qualité et la conformité aux réglementations en vigueur. Pour ce faire, l’intégrité des données, la vérification et l’amélioration continues des procédés, l’évaluation des risques, le passage en revue des anomalies, une gestion stratégique de la chaîne d’approvisionnement, ainsi qu’une gestion intelligente de la consommation énergétique et de la performance des actifs sont autant d’étapes pour lesquelles la digitalisation est indispensable.
Le potentiel de la digitalisation démontré à grande échelle
La digitalisation peut transformer la gestion des actifs industriels de manière très concrète : on a pu le constater avec l’exemple de Biogen, leader des biotechnologies, qui concilie digitalisation industrielle et accès aux traitements pour un million de patients : le laboratoire souhaitait produire à grande échelle l’Aducanumab, un médicament novateur contre la maladie d’Alzheimer, tout en divisant par 100 le coût de production. Biogen a mis en place une révision des procédés de production en temps réel, grâce à l’analyse contextuelle et instantanée des lots. En détectant les anomalies avant que les lots ne passent à l’étape suivante, les équipes optimisent la qualité, le rendement et les coûts. Cet usage du "real time review by exception" (passage en revue des anomalies en temps réel) prouve l’intérêt d’une digitalisation en amont du cycle de production. Elle permet non seulement d’éviter les gaspillages, mais aussi de réduire les délais de mise à disposition des traitements.
Il y a également des entreprises qui mettent la donnée au service de la collaboration : F. Hoffmann-La Roche, l'une des plus grandes sociétés pharmaceutiques au monde, a développé une plateforme de données fiable basée sur le cloud afin de développer des cas d'usage d'analyses avancées et de favoriser la mise à l’échelle. Confrontée à un environnement de serveurs complexe et à des coûts élevés de lac de données commercial (data lake), Roche a souhaité agréger et contextualiser efficacement les données de nombreux systèmes sur site et simplifier les transferts de données vers des outils d'analyse. Grâce à une infrastructure simplifiée, Roche a rapidement mis en œuvre des cas d'usage tels que la maintenance de centrifugeuses, la surveillance des procédés et bien plus encore, accélérant le délai de rentabilisation des futurs projets liés aux données.
Les nouveaux piliers de la transformation de l’industrie de la santé
Derrière ces succès industriels se dessinent les fondations indispensables d’une industrie de la santé digitalisée et souveraine. Interopérabilité, cybersécurité, compétences et gouvernance ne sont plus des options, mais des conditions sine qua non pour pérenniser cette transformation :
- L'interopérabilité des données : pour tirer parti de l’IA et des outils prédictifs, les données doivent être centralisées, standardisées et contextualisées.
- La cybersécurité : en numérisant les procédés critiques, la protection des données de production devient prioritaire.
- La montée en compétence des équipes : la digitalisation n’est pas un remplacement de l’humain, mais une opportunité pour valoriser l’expertise d’ingénierie et former à de nouveaux métiers.
- La gouvernance de la transformation : il ne s’agit pas seulement de déployer des outils, mais de porter un projet global, associant les opérationnels, les DSI, les qualiticiens et la direction.
Accélérer la phase de développement de nouveaux traitements pour qu’ils soient disponibles plus rapidement pour les patients
De l’expérimentation au passage à l’échelle, un enjeu de souveraineté et d’innovation
La digitalisation de la santé n’est plus une option, ni même un simple levier de performance industrielle générant des retours sur investissement en moins de 6 mois. Elle est devenue une exigence stratégique, sanitaire et économique. L’enjeu, désormais, est de sortir de l’expérimentation pour passer à l’échelle. Cela implique de bâtir des infrastructures de données interopérables, de sécuriser les environnements critiques, de former massivement les équipes et d’adopter une gouvernance globale de la transformation digitale.
Au-delà des aspects industriels et financiers, cette mutation représente un enjeu éthique et sociétal majeur. La convergence de l’intelligence humaine et de l’intelligence artificielle doit rester au service de la fiabilité des traitements, de l’équité d’accès aux médicaments et de la capacité collective à anticiper les crises sanitaires à venir.
C’est en posant les bases d’une industrie pharmaceutique digitalisée, agile et résiliente que l’on pourra relever les défis de demain : industrialiser la médecine personnalisée, démocratiser l’accès aux innovations et renforcer la souveraineté sanitaire européenne.