Rajeunissement d'Orange : un plan de départs seniors inquiète les syndicats
Orange, l'un des acteurs majeurs des télécommunications en France, engage des discussions sur un dispositif de départs anticipés pour ses salariés seniors. Ce projet, qui pourrait transformer durablement ses effectifs, suscite à la fois espoirs et inquiétudes. Entre modernisation stratégique et tensions sociales, les enjeux sont considérables pour l'opérateur et ses employés.
Un dispositif pour anticiper les départs et renouveler les effectifs
Orange a initié des discussions autour d'un nouveau dispositif de temps partiel senior (TPS). Ce programme, destiné à anticiper les départs à la retraite, offrirait aux salariés concernés la possibilité de travailler à mi-temps dès cinq ans avant leur retraite, tout en bénéficiant d'une rémunération partielle.
La première année, les employés toucheraient 70% de leur salaire pour un temps de travail réduit à 50%, puis passeraient à 60% de leur rémunération pour les quatre années suivantes, sans activité. Entre 8 000 et 10 000 salariés sur les 65 000 employés d'Orange pourraient être concernés.
Ce plan a pour objectif principal de répondre à une demande croissante des salariés seniors, tout en rajeunissant les effectifs de l'entreprise. Orange souhaite ainsi recruter de jeunes ingénieurs aptes à maîtriser les technologies émergentes, telles que la 5G et la cybersécurité. Ce projet n'était pourtant pas initialement prévu dans la stratégie de l'entreprise.
Les négociations, débutées récemment, devraient se poursuivre jusqu'en janvier 2025. À ce stade, Orange n'a pas confirmé le nombre de départs espérés ni le volume des recrutements envisagés. La direction insiste néanmoins sur le fait que ce dispositif ne constitue pas un plan social.
"Le temps partiel senior est une proposition qui répond à une demande forte des salariés et des organisations syndicales et dont les modalités seront discutées avec l'ensemble des représentants des personnels dans les prochaines semaines. Il ne s'agit absolument pas d'un plan social ou de délocalisation", a déclaré Orange dans un communiqué cité par France Info.
Des critiques des syndicats sur les impacts sociaux du plan
Le projet soulève des inquiétudes importantes du côté des syndicats, qui dénoncent un manque de transparence de la part de la direction d'Orange. "C'est en réalité un immense plan social qui vise à faire partir les personnels les plus âgés", a affirmé Sébastien Crozier, président du syndicat CFE-CGC.
Il regrette également l'absence d'engagement clair concernant les recrutements. "Il n'y a aucun engagement de la direction à recruter de nouveaux collaborateurs pour aller sur les métiers du numérique dont la France a pourtant besoin", a-t-il ajouté.
Les syndicats redoutent aussi une surcharge de travail pour les salariés restant en poste. Cette crainte est amplifiée par le contexte social tendu au sein de l'entreprise. Selon une enquête récente de France Info, une trentaine de tentatives de suicide ont été recensées ces deux dernières années. "J'ai une pensée pour les familles de mes collègues qui se sont suicidés depuis le 1er octobre face à la violence sociale de notre entreprise", a déclaré Sébastien Crozier.
Par ailleurs, des salariés expriment un stress grandissant face à ce qu'ils perçoivent comme une pression accrue. "J'ai reçu moi-même des appels de salariés en larmes, persuadés qu'ils vont être licenciés", a témoigné un représentant syndical, cité par RMC. Depuis le début de l'année 2024, huit suicides ont déjà été recensés au sein du groupe, un chiffre équivalent à celui de l'année précédente.
Un précédent en 2022 et des résultats mitigés
Ce n'est pas la première fois qu'Orange met en place un plan de départs pour les seniors. En 2022, un dispositif similaire avait permis le départ de 7 600 salariés, mais seulement 8000 recrutements avaient suivi, un chiffre largement insuffisant selon les syndicats. Cette expérience alimente les inquiétudes actuelles concernant le renouvellement des effectifs.
Malgré ces précédents, Orange reste ferme sur ses ambitions : moderniser ses équipes et préparer l'avenir. Toutefois, le défi social et humain demeure, alors que les discussions se poursuivent pour trouver un équilibre entre les attentes des salariés, des syndicats et les objectifs stratégiques de l'entreprise.