Motion de censure : la gauche se prépare à renverser Michel Barnier, sans consensus pour la suite
La motion de censure envisagée pour décembre pourrait rebattre les cartes politiques à l'Assemblée, mais les incertitudes sur la suite révèlent les fragilités d'une alliance déjà sous tension.
L'article 49.3 de la Constitution cristallise régulièrement les tensions politiques. Cet outil, permettant à un gouvernement de faire adopter un texte sans vote parlementaire, est souvent perçu comme un symbole de verticalité du pouvoir. Aujourd'hui, son usage attendu pour le budget 2025 place le gouvernement de Michel Barnier sous le feu des critiques. Face à cette situation, une coalition de gauche inédite, le Nouveau Front populaire (NFP), entend déposer une motion de censure pour contrer ce qu'elle considère comme une dérive antidémocratique. Mais si la censure semble imminente, l'après-Barnier suscite de profondes divisions au sein même de cette alliance.
Un front commun contre le 49.3
Le recours attendu au 49.3 par Michel Barnier pour faire adopter le budget 2025 mobilise le Nouveau Front populaire. Dans une tribune publiée ce jeudi dans Le Monde, les chefs de file de LFI, du PS, des écologistes et du PCF ont averti que leurs groupes parlementaires déposeraient une motion de censure si le Premier ministre utilisait cet article controversé pour faire passer le budget.
La candidate désignée par le NFP pour Matignon, Lucie Castets, a soutenu cette initiative, soulignant que le budget actuel "prolonge la casse sociale, l'irresponsabilité écologique et la brutalité antidémocratique".
En première lecture, les amendements portés par la gauche avaient permis de transformer profondément le texte budgétaire, augmentant les recettes de 75 milliards d'euros. Cependant, ces modifications n'ont pas été retenues par l'exécutif. Le NFP considère que son projet permettrait de financer des priorités sociales et écologiques tout en réduisant le déficit public.
Une stratégie post-Barnier qui divise la gauche
Si l'unité semble acquise pour renverser Michel Barnier, les divergences émergent sur la suite à donner à cette censure. Jean-Luc Mélenchon a récemment déclaré que la chute du Premier ministre pourrait entraîner une élection présidentielle anticipée. Une hypothèse que certains membres de la coalition jugent peu probable, voire risquée.
Les socialistes, de leur côté, réfléchissent à une alternative à Lucie Castets. Laurent Baumel, député socialiste, a confié à Le Monde qu'il ne voyait "pas de consensus suffisant pour repartir sur Lucie Castets première ministre". De leur côté, les écologistes et le PCF plaident pour recentrer les discussions sur les politiques à mener, estimant que les désaccords sur les personnalités risquent de paralyser l'alliance.
Un avenir politique incertain pour le NFP
Malgré les discours publics, la méfiance entre les partenaires de la coalition persiste. Certains socialistes craignent un double jeu de leurs alliés, notamment en cas de défections lors du vote de la motion de censure. "S'il manque des socialistes à l'appel, ce serait un message extrêmement négatif", a prévenu Sandrine Rousseau à France Info, d'après La Provence.
Le Rassemblement national, qui pourrait jouer un rôle décisif dans le renversement de Michel Barnier, ajoute une couche d'incertitude. Marine Le Pen a récemment déclaré que son parti pourrait soutenir la motion si le budget affecte le pouvoir d'achat des Français. Une telle alliance de circonstance ne fait qu'alimenter les critiques du gouvernement.
Dans ce contexte, Lucie Castets reste pour l'instant la candidate officielle du NFP pour Matignon. En parallèle, certains cadres du PS évoquent la possibilité d'un gouvernement technique ou d'un autre compromis avec l'exécutif. Ces scénarios, bien que jugés peu réalistes par d'autres partenaires de la coalition, illustrent les tensions internes et l'absence de vision unifiée pour la suite.