Défense européenne : l'urgence d'une autonomie stratégique face aux défis mondiaux

Défense européenne : l'urgence d'une autonomie stratégique face aux défis mondiaux Alors que les tensions internationales s'intensifient, l'Union européenne redouble d'efforts pour atteindre une autonomie stratégique en matière de défense. Mais des obstacles financiers, industriels et politiques freinent son avancée.

Face aux défis croissants posés par la guerre en Ukraine et les incertitudes autour de l'engagement américain, l'Union européenne s'efforce de réduire sa dépendance en matière de défense. Avec des initiatives comme le Programme européen d'investissement dans le domaine de la défense (EDIP) et des appels à une meilleure coopération entre États membres, l'objectif d'une autonomie stratégique reste difficile à atteindre.

Un système de défense encore fragmenté

Depuis 2023, les investissements européens en défense ont bondi de 31%, atteignant 326 milliards d'euros, soit 1,9% du PIB, comme l'a rapporté Le Figaro. Cependant, cette augmentation reste insuffisante face aux besoins estimés pour renforcer l'industrie militaire européenne.

La dépendance aux États-Unis est particulièrement criante : 80% des dépenses militaires liées à l'Ukraine ont bénéficié à des entreprises extra-européennes, principalement américaines, selon Nathalie Loiseau, eurodéputée.

Le Programme européen d'investissement dans le domaine de la défense (EDIP) tente d'apporter une réponse à cette situation avec un budget de 1,5 milliard d'euros. Cependant, cette somme est largement inférieure aux 500 milliards nécessaires sur dix ans pour renforcer l'autonomie stratégique, selon Ursula von der Leyen.

François-Xavier Bellamy, rapporteur du programme EDIP, souligne par ailleurs que "la quasi-totalité des pays européens ont choisi de faire reposer leur défense sur les États-Unis".

Les initiatives pour une défense commune

L'Union européenne tente de structurer son industrie autour de critères communs. La France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne ont convenu que les équipements militaires financés par l'UE devraient contenir au moins 65% de composants européens. Toutefois, cette initiative est contestée par certains États membres, comme la Pologne et les Pays-Bas, qui estiment que des critères trop stricts ralentiraient la réponse aux besoins urgents.

Un autre enjeu clé concerne l'intégration de technologies souveraines. Selon La Tribune, le retard de l'Europe en matière d'intelligence artificielle (IA) limite sa capacité à développer une défense autonome. La création d'une agence paneuropéenne dédiée à l'IA de défense, inspirée du programme Ariane, est évoquée comme une solution pour regrouper les capacités industrielles et technologiques.

Des obstacles financiers persistants

Le financement reste un frein majeur. Si l'Europe s'accorde sur la nécessité d'accroître ses dépenses, les États membres divergent sur les moyens. Ursula von der Leyen a proposé un emprunt commun de 100 milliards d'euros, une idée soutenue par la France mais rejetée par l'Allemagne et les Pays-Bas. Ces pays, dits "frugaux", privilégient l'utilisation des fonds existants, issus de la relance post-Covid.

Alors que les négociations pour le budget européen 2028-2035 s'approchent, l'allocation de nouvelles ressources pour la défense pourrait devenir un point de tension entre les membres de l'Union. Tania Latici, experte en défense auprès du Service diplomatique de l'UE, estime que "cela va demander du courage politique des États membres".