Inflation et croissance : comment la BCE cherche le juste milieu pour les taux

Inflation et croissance : comment la BCE cherche le juste milieu pour les taux La Banque centrale européenne ajuste sa politique monétaire face à une inflation qui ralentit mais reste tenace dans certains secteurs, tout en cherchant à éviter un coup d'arrêt à la reprise économique.

La Banque centrale européenne (BCE) fait face à un double défi : maîtriser une inflation encore élevée dans les services tout en soutenant une croissance économique fragilisée. Pour répondre à ces enjeux, elle privilégie une approche prudente et équilibrée dans la gestion de ses taux d'intérêt.

Entre baisse de l'inflation et risques sur la croissance

Depuis juin dernier, la BCE a abaissé ses taux d'intérêt de 100 points de base, les ramenant à 3%. Ce mouvement fait suite à une série de hausses destinées à contenir une inflation galopante, notamment aggravée par la guerre en Ukraine. Cette stratégie a permis une réduction significative de l'inflation globale, passée de 10% fin 2022 à 2,4% en décembre 2024, soutenue par la baisse des prix de l'énergie.

Cependant, Philip Lane, économiste en chef de la BCE, a averti qu'une réduction trop rapide des taux pourrait compliquer la maîtrise de l'inflation des services, actuellement encore à 4%. "Si les taux d'intérêt baissent trop rapidement, il sera difficile de maîtriser l'inflation dans les services", a-t-il déclaré dans une interview au quotidien autrichien Der Standard, reprise par Les Echos.

En parallèle, la BCE doit éviter une croissance économique trop faible, susceptible d'enrayer ses efforts pour maintenir l'inflation autour de son objectif de 2%. Une croissance trop lente risquerait de stabiliser l'inflation "en dessous de l'objectif", a précisé Philip Lane, ajoutant que les faibles perspectives de croissance en Europe représentent "un défi majeur".

Une approche mesurée pour éviter les extrêmes

Les responsables de la BCE plaident pour une gestion équilibrée des taux. Il faut "s'assurer de trouver le juste milieu dans l'évolution des taux d'intérêt", a insisté Philip Lane dans la même interview. Cette stratégie vise à éviter des décisions "trop agressives" qui freineraient l'économie, tout en prévenant une baisse excessive de l'inflation globale, ce qui serait également indésirable.

François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, a estimé récemment que les taux directeurs pourraient descendre vers 2% d'ici l'été 2025. "Si le recul de l'inflation se confirme au cours des prochains trimestres comme nous le prévoyons, le bon sens est que nous allions sans ralentir le rythme vers ce taux neutre", a-t-il déclaré lors d'une intervention publique, cité par La Tribune. Ce niveau correspondrait à une politique monétaire ni expansive ni restrictive, favorisant une relance progressive des secteurs clés comme l'immobilier.

Une surveillance étroite des marchés

Alors que la BCE anticipe une croissance modeste de 1,1% en 2025 et de 1,4% en 2026, les marchés financiers suivent attentivement ses décisions. Les prochaines annonces, prévues lors de la réunion de politique monétaire du 30 janvier à Francfort, seront déterminantes pour confirmer ou ajuster la trajectoire actuelle.

En attendant, les responsables de la BCE excluent pour l'instant tout risque de récession, estimant qu'une "accélération spectaculaire de l'assouplissement monétaire" ne serait pas nécessaire à court terme. Toutefois, ils restent vigilants face aux incertitudes économiques, conscientes que chaque ajustement des taux aura des répercussions directes sur la consommation, l'investissement et la reprise globale de l'économie européenne.