Accusé de manœuvres troubles, Shein doit répondre aux attaques de Bruxelles et de la HATVP
Shein, géant chinois du prêt-à-porter à bas prix, fait l'objet d'une double mise en cause en Europe. Tandis que la Commission européenne lui reproche des pratiques commerciales contraires au droit des consommateurs, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a été saisie sur ses activités de lobbying en France.
L'Union européenne donne un mois à Shein pour se justifier
Le 26 mai, la Commission européenne a notifié à Shein une série de griefs concernant ses pratiques commerciales. Le groupe, dont le siège est à Singapour, dispose d'un mois pour répondre aux préoccupations soulevées par les autorités de protection des consommateurs en Belgique, en France, en Irlande et aux Pays-Bas. En l'absence de réponse satisfaisante, des mesures coercitives pourront être engagées, incluant des amendes calculées sur le chiffre d'affaires annuel réalisé dans chaque État membre concerné.
Ces accusations s'inscrivent dans le cadre d'une enquête lancée en février. Les infractions visées portent sur de faux rabais, des délais artificiels incitant à l'achat, ainsi que des étiquettes ou allégations jugées trompeuses concernant la durabilité des produits. La Commission indique aussi que les consommateurs rencontrent des difficultés à contacter Shein pour poser une question ou déposer une réclamation. Dans un communiqué transmis à l'AFP et relayé par Le Figaro, Shein affirme coopérer avec les autorités pour démontrer son respect du droit européen.
Un signalement sur les déclarations de lobbying en France
En parallèle, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a reçu le 23 mai un signalement émanant des Amis de la Terre et de l'Observatoire des multinationales. Ce dernier vise les déclarations effectuées auprès de la HATVP par Shein, ses sociétés liées, ainsi que plusieurs personnalités associées à ses opérations en France.
Parmi les personnes mentionnées figure Christophe Castaner, ancien ministre de l'Intérieur devenu conseiller du groupe via sa société Villanelle Conseil. Le signalement évoque des déclarations imprécises, mentionnant des objectifs flous comme "contribuer à la réflexion autour d'une réglementation de l'impact environnemental de l'industrie textile", sans détailler les interlocuteurs ni le contenu des échanges, selon Le Monde.
Les associations pointent également des omissions dans les montants déclarés pour les activités de lobbying. L'agence Plead, missionnée par Shein, aurait conduit des démarches auprès de députés sans que ces prestations figurent clairement dans les déclarations financières de Roadget Business, la maison mère.
Une loi en discussion et des interventions contestées
Ce signalement intervient à quelques jours de l'examen par le Sénat d'une proposition de loi sur l'impact environnemental de la fast fashion, initialement déposée par Anne-Cécile Violland. Le texte prévoit notamment l'interdiction de la publicité pour les marques concernées et l'instauration d'un malus écologique.
Certaines figures recrutées par Shein, comme Bernard Spitz et Nicole Guedj, ne sont pas mentionnées comme représentants d'intérêts dans les déclarations de l'entreprise pour 2024. Les auteurs du signalement demandent à la HATVP d'exercer son droit de contrôle afin de vérifier le respect des obligations de transparence.
Lors d'un déplacement à Marseille en janvier, Christophe Castaner a exprimé publiquement son opposition à cette loi. Selon les associations, ses déclarations s'apparentent à une forme de représentation indirecte. Le nom de Shein n'apparaît toutefois pas parmi les clients déclarés par sa société de conseil.
Enfin, entre le 28 avril et le 4 mai, Shein a lancé une campagne publicitaire promouvant une mode accessible à tous. Cette initiative coïncide avec les discussions autour de l'instauration de frais de deux euros sur les petits colis importés, évoquée par la Commission.