Semi-conducteurs : Taïwan rejette le projet américain de partage de production

Semi-conducteurs : Taïwan rejette le projet américain de partage de production Face aux pressions de Washington pour rapatrier une partie de la production de puces sur son sol, Taipei campe sur sa position : préserver son rôle central dans la chaîne mondiale des semi-conducteurs, vital pour son économie et sa sécurité.

Le bras de fer entre Washington et Taipei s'intensifie autour des semi-conducteurs. Alors que les États-Unis multiplient les initiatives pour rapatrier une partie de la production sur leur sol, le gouvernement taïwanais refuse catégoriquement de céder. Cette opposition met en lumière l'importance stratégique de l'industrie des puces, devenue un pilier des équilibres économiques et géopolitiques mondiaux.

Washington accentue la pression pour réduire sa dépendance

Les semi-conducteurs représentent un secteur clé dans la rivalité technologique mondiale. Les États-Unis, soucieux de réduire leur dépendance vis-à-vis de Taïwan, cherchent à relocaliser une partie de la production. Dimanche, le secrétaire américain au Commerce, Howard Lutnick, a évoqué l'idée d'un partage de production à " 50-50 " entre les deux pays, une proposition placée au cœur de la stratégie de l'administration Trump, selon Les Échos.

Cette demande intervient dans un contexte de tensions commerciales accrues. Washington a imposé des droits de douane de 20 % sur la plupart des produits taïwanais, à l'exception notable des semi-conducteurs. L'objectif affiché est de pousser Taipei à renforcer ses investissements aux États-Unis et à réduire l'excédent commercial qu'elle entretient avec son partenaire.

De retour de Washington, la vice-Première ministre taïwanaise Cheng Li-chiun a rejeté publiquement toute idée de partage. "Je veux préciser que cette idée vient des États-Unis. Notre équipe de négociation ne s'est jamais engagée à un partage des semi-conducteurs à 50-50 ", a-t-elle déclaré, citée par Le Figaro. Elle a ajouté : "Soyez sûrs que nous n'avons pas abordé cette question cette fois-ci et que nous n'accepterons pas ce type de condition."

Pour Taïwan, céder à une telle demande reviendrait à affaiblir son "bouclier de silicium", concept stratégique qui repose sur la concentration de la production de puces sur l'île. Cette situation incite Washington à garantir sa défense face aux menaces de Pékin, qui revendique toujours le territoire.

Taipei défend son rôle stratégique malgré les concessions déjà accordées

Si Taipei s'oppose fermement à une délocalisation contrainte de sa production, l'île a néanmoins multiplié les gestes d'ouverture envers les États-Unis. Elle a accepté d'augmenter ses investissements sur le sol américain, d'accroître ses achats d'énergie américaine et de porter ses dépenses militaires à plus de 3 % de son PIB. Mais sur le cœur de son industrie, la ligne rouge reste claire : les semi-conducteurs les plus avancés resteront fabriqués à Taïwan.

Le poids économique du secteur explique cette fermeté. Plus de 70 % des exportations taïwanaises vers les États-Unis appartiennent déjà à la catégorie des technologies de l'information et de la communication, dont les puces électroniques. TSMC, géant mondial du secteur, y fabrique ses produits les plus sophistiqués, utilisés aussi bien par Apple que par les systèmes d'intelligence artificielle.

Cette position suscite des critiques à Washington. Donald Trump a accusé Taïwan d'avoir "volé" l'industrie américaine des semi-conducteurs, rappelle Le Figaro. Le président américain considère la relocalisation partielle de la production comme une nécessité pour sécuriser les chaînes d'approvisionnement et préserver la compétitivité américaine.

Mais pour Taipei, cet atout industriel reste aussi une garantie de survie politique et militaire. Renoncer à sa maîtrise de la production reviendrait à affaiblir son rôle international et à compromettre son équilibre face à Pékin. Le différend actuel confirme que les semi-conducteurs ne sont plus seulement un enjeu économique : ils se situent désormais au cœur des rivalités stratégiques mondiales.