La France insoumise a-t-elle une chance de destituer Emmanuel Macron ?

La France insoumise a-t-elle une chance de destituer Emmanuel Macron ? Le parti de Jean-Luc Mélenchon a menacé Emmanuel Macron d'engager une procédure en destitution s'il refusait de nommer Lucie Castets à Matignon. Menace crédible ?

Dans un texte publié par La Tribune Dimanche, Jean-Luc Mélenchon, Manuel Bompard et Mathilde Panot mettent un nouveau coup de pression à Emmanuel Macron : si le président de la République refusait de nommer Lucie Castets, figure du Nouveau Front Populaire, au poste de Première ministre, La France insoumise déclencherait une procédure en destitution. "C'est une possibilité crédible", a soutenu Manuel Bompard ce lundi sur RTL. Qu'en est-il vraiment ?

Il existe bien une procédure de destitution du président de la République dans la Constitution française : définie par l'article 68, elle prévoit que le chef de l'Etat peut être démis de ses fonctions en cas de "manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat". Or, selon La France insoumise, Emmanuel Macron manquerait à ses devoirs s'il refusait de nommer un Premier ministre issu du camp vainqueur des législatives.

Mais la notion de "manquement" est sujette à interprétation : le site Vie-publique.fr la circonscrit plutôt à la "condition que ses actes", publics ou privés, "aient porté atteinte à la dignité de sa fonction".

La France insoumise isolée

Au-delà des enjeux d'interprétation, la procédure en destitution est complexe et nécessiterait que La France insoumise se trouve des alliés. En effet, la destitution ne peut être actée que par un vote des deux chambres du Parlement assemblées en Haute Cour. Première étape : une résolution doit être déposée à l'Assemblée par un dixième des députés pour demander la tenue de cette Haute Cour. Avec ses 71 élus, LFI peut donc faire ce premier pas seule.

C'est après que ça se complique : la résolution demandant la convocation de la Haute Cour doit être votée par le bureau de l'Assemblée, puis par la commission des Lois, et enfin par les deux tiers de l'hémicycle. La même procédure doit parallèlement avoir lieu au Sénat. Enfin, si la Haute Cour se réunit, une majorité de deux tiers y est à nouveau nécessaire pour faire aboutir la procédure de destitution.
Or, pour l'heure, La France insoumise est esseulée dans son projet : même ses alliés du Nouveau Front Populaire ont rapidement pris leurs distances. La tribune publiée dimanche "n'est signée que par les dirigeants de LFI" et "n'engage que leur mouvement", a tenu à préciser Olivier Faure, patron des socialistes, sur X. "L'ordre du jour n'est pas de menacer le président de la République de destitution", s'est agacé le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel. "Moi, mon sujet, ce n'est pas la destitution, c'est la cohabitation", a abondé Lucie Castets ce lundi sur BFMTV. Si LFI décidait de mettre sa menace à exécution, celle-ci pourrait donc, en réalité, ne jamais arriver dans l'hémicycle.