Radio France condamné pour "concurrence déloyale" envers les radios privées
Jugé "coupable d'actes de concurrence déloyale", Radio France compte bien faire appel de cette décision.
Entre radios publiques et radios privées, la publicité est un sujet qui fâche. Et cette guerre commerciale vient d'arracher une victoire aux radios privées, puisque le groupe audiovisuel public vient d'être condamné par le tribunal de commerce de Paris d'"actes de concurrence déloyale".
Des brochures trompeuses
Trois syndicats de radios privées, le SRN (NRJ, Nostalgie, Chérie FM, RTL2…), le SRGP (RTL, Europe 1…) ainsi que le Sirti, qui rassemble des radios locales, régionales, thématiques et généralistes indépendantes ont assigné Radio France en justice en avril 2022. Ceux-ci ont estimé que, pour promouvoir les espaces publicitaires de ses 44 antennes régionales France Bleu, le groupe a édité des brochures trompeuses à destination des annonceurs. En effet, depuis 2020, ces plaquettes commerciales mettent en avant "la qualité des espaces publicitaires disponibles sur les antennes de France Bleu par rapport aux radios privées, du fait du temps de publicité plus limité sur les radios publiques".
Mais, si les publicités diffusées sur France Bleu sont plus valorisantes pour les marques puisque moins nombreuses, les syndicats dénoncent des bases de comparaison faussées. Radio France a notamment omis l'identité des radios privées servant de référence, un argument balayé par le groupe public, prétextant qu'il ne pouvait être "privé de communiquer sur l'avantage que procure la rareté de l'espace publicitaire qui optimiste l'efficacité du message". Le tribunal de commerce de Paris n'a pas retenu l'allégation de dénigrement, mais a jugé que la publicité comparative diffusée dans les brochures de France Bleu était "illicite" et présentait un "caractère trompeur". En conséquence, Radio France s'est rendue "coupable d'actes de concurrence déloyale", estime le tribunal de commerce. Un jugement que compte bien contester le groupe d'audiovisuel public, rapporte Le Figaro.
Un budget déloyal
Puisque l'État est actionnaire de Radio France, ce n'est pas la première fois que les radios privées estiment que le groupe bénéficie d'un avantage déloyal. En effet, le budget alloué par l'État à Radio France est de 668 millions d'euros en 2024, soit environ l'intégralité des revenus publicitaires des 330 groupes privés. Pour Radio France, les revenus publicitaires sont limités à 42 millions d'euros par an, mais ce plafond ne prend pas en compte les revenus du numérique ni les messages d'intérêt général. Par ailleurs, les revenus publicitaires des radios stagnent depuis des années. Si, entre janvier et juin, ils ont connu une augmentation de 2,9%, soit 275 millions d'euros, cette hausse est liée aux JO de Paris. Une hausse qu'il semble difficile de garder sur les années à venir.