Budget 2025 : la cryptomonnaie bientôt taxée ?
Dans le texte validé la semaine dernière par le Sénat, un amendement voté dans son ensemble à la chambre haute pourrait bien taxer les détenteurs de cryptomonnaie, malgré le désaccord du gouvernement. Les sénateurs de droite comme Albéric de Montgolfier ainsi que leurs collègues centristes ont en effet proposé de "remplacer l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) par un impôt sur la fortune improductive". Dans l'exposé des motifs de l'amendement, les sénateurs ont expliqué que la pierre et l'investissement locatif "contribuent à la croissance, tout en répondant aux besoins des ménages et des entreprises". En parallèle, d'autres éléments "ne contribuent pas au dynamisme de l'économie français" et sont exclus, à tort, de l'assiette.
Relever le seuil d'assujettissement
Les sénateurs ont donc suggéré de prendre en compte, dans le calcul de ce nouveau prélèvement, les résidences principales, les immeubles non bâtis, d'autres biens corporels comme les objets précieux, les avions ou les yachts ainsi que les liquidités et placements financiers assimilés et les actifs numériques, comme les cryptomonnaies. Le seuil d'assujettissement serait lui relevé à 2,57 millions d'euros, contre 1,3 million d'euros pour l'IFI. Aujourd'hui, seules les plus-values réalisées par des particuliers sont imposées. Elles sont passibles de l'impôt sur le revenu si le total des cessions dans l'année dépasse 305 euros, auquel cas le contribuable peut se tourner vers le barème progressif de l'IR ou sur le prélèvement forfaitaire unique (PFU). En prenant en compte la simple possession et non les gains éventuels, la règle votée au Sénat pourrait modifier ce régime.
Désaccords
"Il n'y a aucune logique à exonérer des bitcoins ou des liquidités et à taxer, en revanche, ce qui contribue à l'économie réelle", a plaidé Albéric de Montgolfier lors de l'examen de l'amendement en novembre dernier ; le travail parlementaire ayant été interrompu par la censure du gouvernement Barnier. Depuis 2022, cette modification de l'IFI est régulièrement proposée par la chambre haute mais est rejetée à chaque fois, au grand regret des élus. Ces arguments ont en partie convaincu la commission des finances. "J'observe qu'à cet égard la majorité sénatoriale fait preuve d'une véritable constance", a déclaré Jean-François Husson, son rapporteur général. Mais le gouvernement s'est montré plus réticent à cette idée, craignant un "zigzag" fiscal ainsi qu'une baisse d'attractivité pour le pays. "Les cryptomonnaies sont aujourd'hui soumises au PFU. […] Ce choix reviendrait à faire entrer des valeurs mobilières dans l'assiette d'un impôt sur les grandes fortunes, donc, peu ou prou, à rétablir l'ISF. Dans ces conditions, pourquoi ne pas y inclure toutes les plus-values mobilières, comme on a pu le faire par le passé ?" a fait remarquer Laurent Saint-Martin, l'ex-ministre délégué aux Comptes publics. L'amendement fait partie du texte qui doit être transmis à la commission mixte paritaire (CMP) ce jeudi, où il pourra être conservé ou sauter en cas de désaccords entre les parlementaires. Le projet devra ensuite être accepté par l'Assemblée nationale, qui s'y est pour l'instant toujours opposée.