Le budget enfin adopté à l'Assemblée nationale, le travail commence pour Bayrou
Après des mois d'incertitude, le budget 2025 de la France a enfin été adopté par l'Assemblée nationale ce mercredi 5 février. Ce jeudi, c'est au tour du Sénat de la valider. L'occasion pour François Bayrou de prendre une pause avant de poursuivre son "ascension de l'Himalaya budgétaire", selon son expression. Pour commencer, le Conseil constitutionnel sera le premier obstacle à franchir. Chaque année, la haute juridiction examine le budget et rejette certaines dispositions. Entre sept et quinze mesures ont ainsi été annulées en 2023 et 2024.
Des mesures remises en cause
Parmi les 68 articles du texte actuel, deux mesures seront scrutées de très près par la haute juridiction : la taxation exceptionnelle des hauts revenus ainsi que celle des profits des grands groupes. Censées rapporter 10 milliards d'euros, ces deux taxes semblent juridiquement fragiles. Puisqu'elles ont été mises en place lors de l'année entamée, elle se heurtent donc au principe de non-rétroactivité de la loi. Un obstacle confirmé par Bayrou lui-même au sujet de la contribution sur les hauts revenus, qui "ne peut pas être mise en application en 2025 parce qu'il n'y a pas de rétroactivité. Ceci est un point certain". Mais le gouvernement affirme avoir trouvé une astuce pour maintenir ces deux taxes, payées en 2026 sur les revenus de 2025 mais avec dès cette année des "acomptes" représentant 95% à 98% du total de la taxe. Selon Sophie Primas, porte-parole du gouvernement, le budget devrait être promulgué "d'ici à la fin du mois". Avec deux mois de retard, une situation inédite pour la France, celle-ci pourrait enfin sortir du "service minimum" de la loi spéciale.
Une mauvaise note à venir
Mais une fois le budget promulgué, la France devrait se heurter au nouvel avis de Standard & Poor's sur les finances de la France, attendu le 28 février. En novembre 2024, l'agence de notation mondiale avait maintenu la note de AA- à la dette française, soit l'équivalent d'un 17 sur 20. Mais celle-ci ne devrait pas se monter aussi bienveillante cette fois, sa rivale Moody's ayant abaissé la note française en décembre 2024. Cette note inciterait alors les investisseurs à exiger de l'État des taux d'intérêts supérieurs, alors que le Trésor doit placer 300 milliards d'euros de dette d'ici la fin de l'année. L'autre risque est que la France n'arrive pas à réduire le déficit comme elle le voudrait, et que les comptes dérapent comme en 2023 et 2024. Le 29 janvier, les experts du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) ont mis en garde le gouvernement, estimant que porter le déficit à 5,4% du PIB au lieu de 5% repose sur des hypothèses optimistes, comme une croissance à 0,9% en 2025.
Risque de dérapage
Charles de Courson, rapporteur du budget à l'Assemblée nationale, a alerté ce mercredi les députés sur les risques d'un dérapage du déficit de "5 à 6 milliards" d'euros "du seul fait de prévisions macroéconomiques trop optimistes". Le budget repose notamment sur une baisse des dépenses de l'État, un net ralentissement de celles des collectivités locales ainsi qu'une forte maîtrise des coûts de l'Assurance-maladie. Mais en plus de ces efforts qui s'avèrent "possibles mais exigeants", ramener le déficit à 3% en 2029, comme promis par le Premier ministre à l'Union européenne semble tout aussi compliqué. "Le budget 2025 est un premier pas dans la bonne direction. […] Mais il fait porter tout l'effort sur l'États, qui représente seulement un gros tiers des dépenses publiques. Pour ramener le déficit à 3% du PIB, il sera indispensable de mieux répartir l'effort", estime François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France.