Oracle défie Amazon, Google et Microsoft dans le cloud hybride

Oracle défie Amazon, Google et Microsoft dans le cloud hybride Le géant du numérique américain lance son offre Dedicated Region Cloud@Customer. Objectif : permettre à ses clients de bénéficier de l'ensemble de ses offres IaaS, PaaS et SaaS sur site.

Oracle lève le voile sur son offre de cloud hybride. Baptisée Oracle Dedicated Region Cloud@Customer, elle permet d'installer une région Oracle Cloud chez soi. Et c'est un véritable tour de force. Le nouveau stack prend en charge l'ensemble des services de cloud public du groupe californien, soit au total plus de 50. Du IaaS avec Oracle Cloud Infrastructure au SaaS avec Oracle CRM, ERP et SCM en passant par le PaaS avec Autonomous Database et les Digital Innovation Services de l'éditeur (big data, blockchain, machine learning…). Tarifés par abonnement en fonction des capacités souscrites, ils seront managés à distance par Oracle. Ils bénéficient par ailleurs d'une console de pilotage commune avec le cloud public de l'entreprise de Redwood City. Le prix d'entrée de la solution s'élève à 500 000 dollars par mois.

L'offre hybride la plus complète

En donnant ainsi la possibilité de déployer on-premise l'intégralité de ses services de cloud public, Oracle entend prendre l'ascendant sur AWS, Google Cloud et Microsoft Azure dans l'IT hybride. Tous trois commercialisent déjà des offres sur ce segment, mais elles se limitent à quelques briques. Pour l'heure, celles d'AWS (Outposts) recouvre les instances Amazon EC2, les unités de stockage Amazon EBS, la plateforme big data EMR ou encore la base de données managée RDS. Mais il s'agit là d'une toute petite fraction du portefeuille de produits d'AWS. Parmi les grands absents, on relève notamment l'environnement de stockage Amazon S3 qui devrait être intégré à Outposts d'ici la fin de l'année.

Même constat du côté de Microsoft et Google. Avec Azure Arc et Azure Stack, le cloud hybride du premier ne supporte qu'une petite dizaine de services : les instances et fonctions serverless Azure, le gestionnaire de cluster Service Fabric, le PaaS Azure App Service, les bases de données managées Azure SQL et PostgresSQL, ainsi que les principales briques de stockage du cloud américain (Azure Disk Storage, Azure Stockage Blob, Azure Table Storage). Pour la suite, Redmond planche sur l'intégration à l'édifice de sa technologie de Kubernetes as a Service (KaaS). Sur ce plan, Google n'a pas attendu. Il a même décidé de faire de Kubernetes le pivot de sa plateforme de cloud hybride (Anthos). Du coup, cette dernière se borne au KaaS du groupe de Mountain View (GKE). En vue de prendre en charge des architectures de microservices, Anthos est équipé en plus d'un service mesh et de dispositifs de sécurité et de configuration.

Comme ses concurrents, Oracle a aussi développé un KaaS qui a été intégré comme les autres services du cloud américain à son offre hybride.

Une solution anti-Cloud Act

"Dedicated Region Cloud@Customer s'adresse aux entreprises qui souhaitent adopter le cloud dans toute sa complétude, en respectant une gouvernance interne en matière de localisation et de sécurité des données. Elle répond également au besoin de faible latence", explique au JDN Steve Daheb, vice-président senior d'Oracle Cloud. Pour les organisations européennes, la solution est un moyen de prendre la main sur l'hébergement des données, et d'éviter de dépendre du Cloud Act américain. Une législation qui oblige, sur simple réquisition judiciaire, toutes les sociétés et providers cloud originaires des Etats-Unis (dont Oracle) à communiquer aux autorités fédérales des données en leur possession, qu'elles soient localisées ou non outre-Atlantique.

"Le Crédit Agricole CIB a consolidé l'ensemble de ses données financières dans Exadata Cloud@Customer"

A l'instar d'Outposts chez AWS, Dedicated Region Cloud@Customer s'adosse aux mêmes serveurs que ceux utilisés au sein du cloud public d'Oracle. Ce n'est pas le cas d'Azure Stack et Arc, ni de Google Anthos, qui se basent sur des serveurs de fabricants tierces.

L'offre d'Oracle repose notamment sur la plateforme de calcul Exadata du groupe américain. L'entreprise de Larry Ellison proposait d'ailleurs déjà à ses clients de déployer une version cloud de cette dernière chez eux. "Exadata Cloud@Customer a été mise en œuvre avec succès par des centaines de clients dont des grandes organisations dans la finance, les télécommunications, la santé, le secteur pharmaceutique et l'assurance", souligne Juan Loaiza, vice-président exécutif des technologies de base de données critiques chez Oracle. Parmi eux figure Crédit Agricole CIB, l'activité de banque d'investissement du groupe français du même nom. "Crédit Agricole CIB a consolidé l'ensemble de ses données financières dans Exadata Cloud@Customer. Ce qui lui a permis d'accélérer considérablement sa clôture de comptes. Mais également de réduire les coûts de ses opérations IT, ses informations financières étant fédérées dans une base unique managée par Oracle", détaille Régis Louis, vice-président de la stratégie produits d'Oracle pour la région EMEA.

AWS Outposts en ligne de mire

A l'occasion du lancement de son cloud hybride, Oracle annonce la mise à niveau de Cloud@Customer vers son architecture de données Exadata de dernière génération : Exadata Database Machine X8M Technology. Une baie qui embarque les unités Optane de mémoire SSD persistante d'Intel, combinées à des accès directs à 100 gigabit (RDMA) en Converged Ethernet (RoCE). L'objectif ? Dessiner un socle taillé pour Oracle Autonomous Database. "Grâce au machine learning, Autonomous Database automatise le provisioning, l'indexation, l'optimisation et le chiffrement des bases de données, mais aussi le patching de sécurité", rappelle Steve Daheb. Avec 4 000 clients revendiqués, le produit est notamment utilisé par le CERN, Siemens, Swisscom, Vodafone ou Sky Brasil.

Selon Oracle, "Autonomous Database sur Oracle Exadata Cloud@Customer atteint des performances jusqu'à 12 fois supérieures en termes d'entrées et sorties SQL, jusqu'à 10 fois supérieures en matière de débit SQL et 98% inférieur en latence SQL comparé à Amazon RDS sur AWS Outposts."

Schéma d'architecture d'Oracle Dedicated Region Cloud@Customer. © Oracle

A cela s'ajoute la prise en charge par Cloud@Customer de multiples clusters de machines virtuelles par rack Exadata, visant à répondre au maximum de configurations IT possibles, du développement jusqu'à la production haute performance. "Cette infrastructure matérielle et logicielle est exactement la même que celle d'Oracle Cloud. Ce qui permet de porter un workload (basé initialement sur l'environnement Cloud@Customer, ndlr) vers notre cloud public, et vice-versa", insiste Steve Daheb. Et Régis Louis de préciser : "Oracle Dedicated Region Cloud@Customer offre les mêmes choix en termes de compute : des processeurs Intel, AMD, par exemple, ou encore des processeurs taillés pour le calcul intensif."

Enfin, Dedicated Region Cloud@Customer pourra bénéficier de son architecture Kubernetes pour faciliter le déploiement d'applications, ainsi que leur migration vers le cloud public d'Oracle voire vers un autre cloud, et inversement.